Patients: inspirant voyage dans le quotidien des tétraplégiques
Il y a deux jours, je n’avais pas la moindre idée de qui est Grand Corps Malade. Aujourd’hui, j’ai le plus grand des respects pour ce chanteur français dont le combat contre la paralysie est raconté d’une façon merveilleusement crue dans Patients.
Anecdote: mercredi, mon ami et collègue Vincent Pichard m’a contacté sur Facebook pour me dire qu’il avait bien hâte de voir le nouveau film de Grand Corps Malade.
Ne sachant pas qui était Grand Corps Malade, j’en ai déduit qu’il s’agissait d’un collectif de cinéma indépendant français à la mode dont je découvrirais le travail dans Patients.
Une rapide recherche m’a toutefois fait réaliser que j’avais tout faux; Grand Corps Malade est en fait un joueur de basketball français qui, à la suite d’un accident, est devenu tétraplégique, puis chanteur.
J’espère que mes lecteurs d’ascendance française sauront me pardonner ce grave manque de culture! Fin de l’(embarassante) anecdote.
Patients est donc l’adaptation de la biographie de l’artiste. Et alors que je m’attendais à un film un peu nombriliste visant à mousser la musique et le livre de Grand Corps Malade, j’ai découvert une oeuvre inspirante, à la fois lourde et légère, qui nous immerge dans l’éprouvant combat physique et psychologique qu’est celui de la réadaptation.
LES MALHEURS DE BEN
Benjamin Vallier est un jeune adulte comme tous les autres. Jusqu’au jour où, en plongeant dans une piscine, il s’est fracturé une vertèbre.
Laissé tétraplégique partiel par l’accident, il amorce sa réadaptation dans un centre spécialisé, où il est cloué dans un lit, dépendant d’autrui comme un bébé naissant.
Malgré ses difficultés, Ben affiche un moral de plomb. Ses progrès sont lents, mais continus, et il peut un jour commencer à se déplacer en fauteuil roulant et découvrir l’univers qui s’étend au-delà de sa chambre.
Il se fera au passage quelques amis, dont le rationnel Farid (Soufiane Guerrab), la jolie Samia (Nailia Harzoune) et le ténébreux Steve (Franck Falise).
Entre deux éprouvantes séances de thérapie, les membres du groupe échangent sur les progrès et les difficultés de chacun, mais aussi sur leur statut de personne handicapée ainsi que sur leurs craintes et leurs angoisses face à l’avenir.
ODE AU COURAGE
Ne laissez pas le synopsis d’apparence banale de Patients vous duper. Aucun résumé ne saurait rendre justice à la richesse de cette oeuvre qui est en fait une très réussie ode au courage des malchanceux. Son plus grand accomplisse- ment est probablement de nous faire voir les personnes handicapées d’un tout autre oeil.
Patients se démarque en traitant un sujet extrêmement lourd avec humour, mais surtout, en mettant de côté les tabous.
Le choc de voir à quel point les pensionnaires du centre sont dépendants et l’impact que cela a sur leur intimité est parfaitement balancé par la finesse des blagues, notamment celles portant sur les «anciens» et les «nouveaux» handicapés.
Il y a fort à parier que le ton du film ne serait pas aussi à propos si ce n’était du jeu de Pablo Pauly. On achète sans hésistation son optimisme sans compromis et son éternel recours à l’humour.
Difficile d’ailleurs de ne pas s’émerveiller devant le langage non verbal du comédien quand les petites victoires de Ben se transforment en immenses bonheurs.
Autre qualité de Patients: l’originalité de ses images.
Mehdi Idir - qui a réalisé plusieurs des vidéos de Grand Corps Malade - parvient à tirer le meilleur d’une situation difficile, soit celle de filmer entre les quatre murs solidement défraîchis d’un centre de santé.
Étant limité dans le choix de ses décors, il a compensé en nous offrant des prises de vue souvent inorthodoxes, puisant avec brio dans son bagage d’expérience dans le domaine des vidéoclips.
Avec ses prises de vue atypiques et son traitement anticonformiste, Patients est véritablement est à l’image de son auteur, Grand Corps Malade.
Je peux vous assurer que je n’oublierai maintenant plus jamais ce nom. Ni son combat. Ni ses victoires. Respect.