Hauts fonctionnaires: Fredericton rejette le bilinguisme obligatoire
Le gouvernement du premier ministre Brian Gallant sert à nouveau une fin de non-recevoir à la commissaire aux langues officielles dans le dossier du bilinguisme des hauts fonctionnaires.
Malgré le constat accablant de Katherine d’Entremont, Fredericton persiste et signe: pas question d’exiger le bilinguisme dans la haute fonction publique.
Le français est pourtant une denrée rare dans les plus hautes sphères du gouvernement, selon ce que révèle une étude du commissariat.
La majorité des organismes et des municipalités francophones sondés par le bureau de Mme d’Entremont affirment qu’ils n’arrivent pas toujours à communiquer en français avec la haute direction des ministères ainsi qu’avec des agences gouvernementales.
En fait, seuls quatre répondants sur 21 ont indiqué que le français était «toujours utilisé» lors des rencontres avec les hauts fonctionnaires provinciaux.
Près de la moitié des répondants ont indiqué que l’anglais était «souvent ou parfois» la seule langue utilisée lors des rencontres avec les hauts fonctionnaires.
Afin d’améliorer la situation, Mme d’Entremont demande au gouvernement d’exiger le bilinguisme dans toutes les nouvelles nominations aux postes de sousministre, de sous-ministre adjoint ou de cadre supérieur à compter de 2020.
Elle avait fait une recommandation semblable au gouvernement en 2015 qui avait été rapidement repoussée du revers de la main par la province.
Jeudi, le ministre responsable des Langues officielles, Donald Arseneault, a répondu à Katherine d’Entremont que «chaque ministère possède des gens capables de servir les Néo-Brunswickois dans les deux langues».
«Chaque fois qu’un groupe veut parler dans la langue de son choix, il est capable de le faire», assure le ministre.
La commissaire note dans son rapport que certains hauts dirigeants qui se déclarent bilingues ont en réalité une maîtrise du français «insuffisante» pour mener leurs affaires dans la langue de Molière en réunion.
À l’opposé, certains représentants francophones qui doivent se résoudre à converser en anglais avec les hauts fonctionnaires se disent limités dans leur capacité à s’exprimer avec toute la subtilité requise.
L’interprétation simultanée est rarement offerte lors des rencontres avec la haute direction des ministères et des organismes gouvernementaux, constate Katherine d’Entremont.
«Il suffit d’inverser la situation pour comprendre à quel point c’est inacceptable. Si une organisation anglophone avait rendezvous avec des hauts fonctionnaires et qu’ils ne pouvaient pas parler dans leur langue… ça n’arrive jamais», raconte-t-elle.
Fait intéressant, la majorité des répondants «ne s’attendent pas à ce que les ministres soient bilingues», indique la commissaire.
«Toutefois, selon eux, l’unilinguisme d’un ministre ne devrait pas empêcher des représentants d’organismes de s’exprimer en français», souligne le commissaire.
Pour une rare occasion, l’opposition officielle partage l’opinion du gouvernement concernant le bilinguisme de la haute fonction publique.
Le député progressiste-conservateur Bruce Northrup estime que c’est une bonne chose quand les membres de la haute fonction publique sont bilingues, mais pas au point de l’inscrire dans la loi.
«Je pense que c’est une question de bon sens, mais ce n’est pas nécessaire de légiférer», indique l’élu unilingue anglophone qui a été ministre durant quatre ans sous David Alward.
«Je ne suis pas bilingue et ça n’a jamais été un problème. Je me suis rendu dans le nord du Nouveau-Brunswick, j’avais d’excellents employés avec moi, et ça n’a jamais été un problème», dit-il.
«Tous les sous-ministres avec qui j’ai fait affaire étaient bilingues durant mes quatre années.»
«Ces résultats ne sont pas acceptables dans la seule province officiellement bilingue du Canada», déplore la commissaire dans son rapport annuel 2016-2017.