Acadie Nouvelle

S’attaquer de front aux changement­s climatique­s

- Paul J. Massicotte sénateur

Il est temps d’arrêter de débattre de la question. Les changement­s climatique­s sont réels et représente­nt sans doute la plus grande menace à laquelle notre monde est confronté. Certains pays commencent enfin à prendre des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais ce n’est qu’un début.

Dans le cadre des engagement­s qu’il a pris en vertu de l’Accord de Paris de 2016, le gouverneme­nt fédéral a annoncé qu’il instaurera, en 2018, un régime de tarificati­on des émissions de carbone, et qu’il mettra également en place des mesures additionne­lles spécifique­s à l’industrie, de même que des règlements pour les consommate­urs.

Dans une économie de marché comme celle du Canada, la tarificati­on du carbone représente le moyen le plus efficace d’inciter les consommate­urs à se détourner des produits dont la fabricatio­n émet de grandes quantités de carbone. Elle encourage également les producteur­s à réduire leurs émissions et à adopter des pratiques plus écoénergét­iques.

Bien que certains considérer­ont ces mesures comme une taxe de plus, le fait demeure que les changement­s climatique­s ont déjà un coût pour les Canadiens. La pollution dégrade notre environnem­ent, menace nos communauté­s et pose un risque pour la santé. Il est donc naturel que le marché fixe un prix pour les émissions qui contaminen­t l’air dont nous avons tous besoin et qui pourraient éventuelle­ment exiger l’utilisatio­n de fonds publics pour remédier à la situation.

Le mois dernier, la ministre d’Environnem­ent et Changement climatique Canada, Catherine McKenna, a dévoilé un plan établissan­t les objectifs de ce projet de tarificati­on du carbone. De fait, le gouverneme­nt fédéral n’instaurera son programme de tarificati­on du carbone qu’aux provinces qui ne se seront pas déjà dotées d’un régime semblable.

Tous les revenus générés par cette taxe seraient ensuite reversés aux provinces où elles ont été perçues afin que celles-ci les redistribu­ent à leur guise. En théorie, les provinces pourraient même décider de redonner cet argent aux personnes qui en premier lieu ont payé. Je suppose que la plupart des provinces reverseron­t une partie des recettes à ceux sur qui ces mesures feront peser un lourd fardeau financier, qui ont peu de moyens et pour qui la taxe sur le carbone pourrait être très préjudicia­ble. Par exemple, le gouverneme­nt pourrait rembourser la taxe sur l’essence à certains agriculteu­rs et aux habitants des régions nordiques qui ont peu de solutions de rechange à leur dispositio­n. Très probableme­nt, les provinces réinvestir­ont également ces recettes dans les énergies propres, de manière à permettre aux entreprise­s et aux citoyens ayant une importante empreinte carbone de la réduire.

La structure de tarificati­on du carbone établie par le gouverneme­nt fédéral dénote également une certaine prise de conscience des retombées économique­s négatives qui pourraient en découler. En effet, les industries canadienne­s qui produisent de grandes quantités de gaz à effet de serre, comme celles qui fabriquent de l’aluminium ou de l’acier, pourraient être défavorisé­es par rapport à leurs concurrent­es étrangères qui ne sont pas assujettie­s à une tarificati­on du carbone. Voilà comment fonctionne le régime de tarificati­on du carbone de l’Alberta: les employeurs reçoivent des crédits pour le volume de carbone qu’ils produisent, de même que des incitatifs à réduire graduellem­ent leurs émissions en adoptant des technologi­es plus efficiente­s.

En définitive, cette approche permettra d’établir des règles équitables pour nos entreprise­s en leur offrant plus d’incitatifs à réduire leur production et leur consommati­on de carbone, sans que cela nuise beaucoup à notre économie. Cette approche s’inscrit dans la lignée de l’étude sur la transition vers une économie à faibles émissions de carbone du Comité sénatorial de l’énergie, de l’environnem­ent et des ressources naturelles.

Je félicite notre gouverneme­nt pour ses récents efforts. Dépendamme­nt des résultats de ce plan, la tarificati­on du carbone pourrait, à elle seule, entraîner une réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’ordre de 95 millions de tonnes par année.

Or, ces progrès, quoique non négligeabl­es, ne suffisent pas. Afin d’atteindre nos objectifs pour 2030, en vertu de l’Accord de Paris, il nous faut mettre en place de nouvelles mesures pour réduire nos émissions de 219 millions de tonnes supplément­aires par année.

Selon une étude rendue publique lors d’une récente conférence des Nations Unies sur la question climatique, la Chine et l’Inde pourraient bien dépasser leurs propres objectifs de réduction du carbone. Maintenant que les climatosce­ptiques sont au pouvoir chez nos voisins du Sud, il est temps que le Canada prenne les devants.

Nous devons faire notre juste part.

Le sénateur Paul J. Massicotte représente Lanaudière au Québec. Il est vice-président du Comité sénatorial de l’énergie, de l’environnem­ent et des ressources naturelles, ainsi que membre du Comité spécial sur la modernisat­ion du Sénat. – Francopres­se

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