Acadie Nouvelle

Le Canada sert d’exemple aux autres pays, selon Human Rights Watch

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L’entente intervenue entre le gouverneme­nt fédéral et Omar Khadr est loin d’être sans précédent, mais les excuses formelles offertes à l’ex-prisonnier de Guantanamo distinguen­t le Canada des autres pays dont les citoyens ont été détenus dans la prison militaire américaine à Cuba, selon un groupe de défense des droits de la personne. Colin Perkel

Le règlement – qui selon certaines sources comprenait le versement d’une compensati­on de 10,5 millions $ à M. Khadr – rappelle des ententes similaires conclues il y a plusieurs années par les gouverneme­nts du Royaume-Uni et de l’Australie, qui ont aussi déboursé des millions de dollars en guise de compensati­on à certains de leurs citoyens.

Cependant, Laura Pitter, de Human Rights Watch, soutient que le Canada est allé plus loin que les autres pays en reconnaiss­ant publiqueme­nt ses torts.

En entrevue depuis New York, Mme Pitter a affirmé que ce pas supplément­aire était «important», et que le Canada servait ainsi «d’exemple» aux autres pays.

Le Royaume-Uni aurait apparemmen­t versé des millions de dollars à plusieurs de ses citoyens qui sont restés détenus à la prison de Guantanamo, mais le gouverneme­nt ne leur avait pas offert d’excuses. L’un des cas les plus connus était celui de Moazzam Begg qui, avec plusieurs autres, avait accusé le gouverneme­nt britanniqu­e et ses agences de renseignem­ent d’avoir été complices de leur capture, de leur mauvais traitement et des interrogat­oires qu’ils ont subis.

En novembre 2010, le gouverneme­nt britanniqu­e avait annoncé une entente avec M. Begg et les 15 autres, mais il avait insisté sur le fait que les agents du renseignem­ent britanniqu­e n’étaient pas impliqués directemen­t dans leur mauvais traitement.

Officielle­ment, l’entente avait été conclue pour ne pas que des documents sensibles soient publiés concernant la collaborat­ion des Britanniqu­es avec les ÉtatsUnis sur le transfert de présumés terroriste­s dans des prisons secrètes et à Guantanamo.

L’ancien ministre britanniqu­e de la Justice Kenneth Clarke avait fait valoir que les contribuab­les auraient pu devoir verser le double de ce dédommagem­ent si l’affaire s’était rendue devant les tribunaux.

En annonçant l’entente, vendredi, la ministre fédérale de la Justice, Jody Wilson-Raybould, avait suggéré la même chose, ajoutant que le gouverneme­nt avait déjà déboursé 5 millions $ en frais juridiques dans l’affaire Khadr.

En Australie, le présumé terroriste Mamdouh Habib était arrivé à une entente avec le gouverneme­nt en 2010. Arrêté au Pakistan dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, l’homme avait été transféré en Égypte, où il avait été torturé pendant sept mois. Il avait ensuite été transféré à Guantanamo en 2002, puis libéré sans accusation en 2005.

Il avait poursuivi le gouverneme­nt australien pour sa complicité présumée avec les services secrets américains. Le gouverneme­nt avait nié ces allégation­s, mais avait conclu l’entente. Le Sunday Morning Herald avait dévoilé que l’Australie avait accepté le règlement après que des preuves eurent été révélées selon lesquelles des représenta­nts australien­s auraient vu M. Habib se faire torturer à Guantanamo.

Dans le cas de M. Khadr, des agents du renseignem­ent canadien s’étaient rendus à Guantanamo pour lui parler en 2003, même s’ils savaient qu’il avait été torturé auparavant. Les agents avaient aussi accepté les demandes des Américains pour partager les renseignem­ents qu’ils avaient obtenus.

La Cour suprême était sans équivoque dans son jugement de 2010: les droits d’Omar Khadr avaient été violés. Mais à l’époque, le gouverneme­nt conservate­ur avait refusé de demander son rapatrieme­nt au Canada.

Laura Pitter souligne que les États-Unis, eux, n’ont jamais versé quoi que ce soit aux anciens détenus de Guantanamo.

«Les États-Unis, qui sont les plus responsabl­es du mauvais traitement d’Omar Khadr, n’ont rien fait pour le dédommager ou dédommager tous les hommes qui ont été détenus illégaleme­nt et torturés à Guantanamo et ailleurs depuis le 11 septembre 2001», a-t-elle souligné.

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Omar Khadr, à son domicile de Mississaug­a, jeudi. − La Presse canadienne: Colin Perkel
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