Se déprogrammer pour s’épanouir grâce à l’éducation
Jiddu Krishnamurti (1895-1986) ne provient pas du domaine de l’éducation. Cependant, ses réflexions sur le monde et la vie méritent une attention particulière d’autant plus que l’éducation y occupait une place centrale afin d’atteindre une société fondée
Même s’il n’est pas un pédagogue au sens traditionnel du terme, on peut classer ses idées pédagogiques dans la catégorie des pédagogues spiritualistes. Fortement influencé par sa culture indienne, il ne se réclame toutefois d’aucune religion. Il refuse d’ailleurs qu’on lui accorde le statut de maître ou de gourou, affirmant que personne n’a besoin de ce genre de béquille spirituelle ou psychologique.
Krishnamurti est un philosophe de l’harmonie de la personne avec l’humanité. Il dira, par exemple, que chaque être humain est «le dépositaire de toute l’humanité». Chacun est le monde et le monde est ce que chaque personne est. Si une personne se transforme, c’est la conscience de l’humanité tout entière qui change.
Ce que propose Krishnamurti n’a rien de facile. Il faut d’abord que chacun apprenne à vivre d’une manière qui permette son plein épanouissement. Or, la société, selon lui, impose des modèles aux enfants plutôt que de favoriser l’émergence de leur identité profonde et unique.
Ainsi, il faut proposer aux enfants un climat favorable à l’authenticité par la recherche de la connaissance lucide de soi et par la compréhension véritable des autres. Cette recherche est intérieure et elle doit émerger par un questionnement ou un regard critique et conscient. Les choix de vie (personnels, professionnels, citoyens, etc.) ne sont alors pas déterminés par ce qu’une personne veut, mais par ce que la personne est.
C’est dans ce contexte que Krishnamurti parle de déconditionnement. Il considère que nos sociétés, autant occidentales qu’orientales, conditionnent les êtres humains dès le plus jeune âge à vouloir agir selon des modèles qui emprisonnent la personne et qui l’empêche d’être qui elle est. Les conditionnements causent la frustration, la souffrance, la tristesse, le conflit, etc. Il importe alors de se déconditionner.
Krishnamurti implore par conséquent chaque enseignant à être profondément soucieux de l’épanouissement des élèves de sa salle de classe. En «déconditionnant», l’enseignant aide l’apprenant à se libérer de ses limites et de ses peurs. Pour y parvenir, Krishnamurti propose d’amener les élèves à méditer et aussi à s’engager dans des discussions et des réflexions collectives.
Bien évidemment, l’art du dialogue n’est pas un acquis pour tout le monde. Il faut une certaine ouverture d’esprit et une capacité d’introspection particulière tant pour les élèves que pour les enseignants. En réfléchissant ensemble, l’élève développe sa capacité d’écouter autant les autres que lui-même, en omettant les préjugés. Et ça, pour beaucoup de personnes, c’est comme faire un saut dans le vide!
Dans nos écoles, on retrouve de plus en plus d’idées qui se rapprochent de la pensée de Krishnamurti. On peut penser aux initiatives visant la gestion du stress et la prévention de la violence par la visualisation, la méditation et le dialogue. Mais Krishnamurti dirait sans doute qu’il est inutile de mettre en place ces initiatives si nous ne nous interrogeons pas d’abord sur ce qui cause le stress, la violence et l’intimidation.
Krishnamurti visera toute sa vie la libération et l’épanouissement de chaque personne nécessaire à la transformation radicale d’une société bonne. Ainsi, il insistera sur l’atteinte de l’harmonie de chacun avec lui-même, les autres et la nature. Pour ce faire, il suffit de recevoir la richesse de son coeur et de son esprit tout comme les doux rayons du soleil procurent la chaleur et la lumière nécessaire à la vie et au bonheur!