MANGER LOCAL DANS LA PÉNINSULE ACADIENNE
Manger local dans la Péninsule acadienne, est-ce possible? C’est le défi que ce sont fixé le chef québécois, David Forbes, et la sommelière et propriétaire du restaurant de Paquetville, le Nouvo Caveau, Sonia Jalbert, pour l’événement culinaire La grande tablée, organisé jeudi. L’expérience met en exergue les manques en matière agricole, dans le Nord-Est de la province.
«Je suis surpris à quel point il n’y a rien ici. C’est comme si l’agriculture avait quasiment disparu», lâche le cuisinier de la Belle Province.
Dans son coin de pays, la réalité est différente, mais pas idéale pour autant.
«Il y a plus d’exploitations, mais il nous faut encore trouver le juste équilibre entre l’agriculture intensive et l’agriculture locale.»
Depuis l’ouverture de son restaurant en 2012, Sonia Jalbert s’efforce de proposer les denrées produites dans le Nord-Est. En période estivale comme en ce moment, celles-ci s’incrustent dans plus de la moitié des plats inscrits à la carte. La restauratrice aimerait qu’il y en ait davantage.
«Le plus difficile à se procurer, c’est la viande. Nous n’avons pas d’abattoirs dans la région. Ça complique les choses.»
Selon elle, les clients sont pourtant de plus en plus prompts à consommer local.
«En quatre ans et demi, les goûts et les connaissances des gens ont évolué. Ils ont le souci de bien manger. Mais il existe encore une marge, je trouve, pour les éduquer et les sensibiliser à la cuisine raisonnée.» Derrière cette expression, la jeune femme sous-entend faire attention à la provenance des produits achetés et à respecter les saisons de récolte.
«Manger des fraises de Californie en plein mois de janvier, ça n’a pas de bon sens.»
En dépit des difficultés, David Forbes et Sonia Jalbert ont réussi leur pari, jeudi soir.
Entre le carpaccio de flétan au jus de betterave, la crème d’oignons avec homard, pétoncles et pomme de terre, la purée de chou rave et le quatre-quarts crémeux citron, framboises et bleuets, les 150 convives qui se sont attablés ont dégusté une large majorité d’aliments issus de la Péninsule acadienne.
«Plus de 80% du menu était local», souligne David Forbes.
Le chef vante la qualité des produits qu’il a découverts ici.
«Le poisson est frais. Il est pêché la veille ou le matin même. Au Québec, ça prend plusieurs jours avant qu’il arrive dans nos cuisines. Vos légumes ont un goût incroyable.» Il souhaiterait changer les préjugés. «Les personnes qui s’imaginent qu’acheter local coûte plus cher ont tort. Elles ne réalisent pas que même à 50 cents de plus la livre, c’est de l’argent qui reste ici. Et ça devient exponentiel.»