Kenya: la Cour suprême annule l’élection de Uhuru Kenyatta
La Cour suprême du Kenya a annulé vendredi l’élection du président Uhuru Kenyatta, le mois dernier, et appelle maintenant à la tenue d’un autre scrutin d’ici 60 jours. Tom Odula
Le plus haut tribunal du pays a conclu que l’élection avait été inconstitutionnelle, ébranlant cette nation d’une cinquantaine de millions d’habitants qui voit pour la première fois de son histoire un scrutin présidentiel être invalidé.
M. Kenyatta a déclaré qu’il est «personnellement en désaccord» avec la décision de la Cour suprême, mais qu’il la respecte. Il a ensuite décoché des flèches en direction des juges, affirmant que «six personnes ont décidé d’aller à l’encontre de la volonté du peuple».
M. Kenyatta a aussi lancé un appel au calme et à la paix dans un pays qui a parfois été déchiré par les violences électorales.
L’opposition kényane a célébré la décision de la Cour suprême dans les rues, en se réjouissant de ce rare revers pour M. Kenyatta, le fils du premier président du pays. Il s’agit aussi du plus récent chapitre dans la longue rivalité qui oppose les principales familles politiques du Kenya.
Le chef de l’opposition, Raila Odinga, le fils du premier vice-président du pays, a salué une «journée historique» pour le peuple du Kenya et pour toute l’Afrique.
Les juges de Cour suprême ont donné raison à quatre contre deux à M. Odinga, qui soutient que le processus de vote électronique a été piraté et manipulé en faveur de M. Kenyatta. Ce dernier avait remporté un deuxième mandat à la tête du pays avec 54% des voix.
Le tribunal ne blâme toutefois pas M. Kenyatta ou son parti pour les problèmes. Il dit plutôt que la commission électorale s’est rendue coupable «d’illégalités et d’irrégularités (...) dans la transmission des résultats». Un jugement plus détaillé sera publié d’ici 21 jours.
M. Odinga a réclamé le démantèlement de la commission électorale et dit que l’opposition demandera des poursuites en justice contre les responsables électoraux.
Le président de la commission électorale, Wafula Chebukati, a dit vendredi que de nouveaux employés seront embauchés avant le vote, et il a demandé le dépôt d’accusations contre tout employé responsable de malversations.
Une vingtaine de pays, dont les États-Unis, qui avaient déjà félicité M. Kenyatta pour sa victoire, ont publié un communiqué conjoint dans lequel ils affirment que la décision de la Cour suprême «démontre la résilience de la démocratie du Kenya et son engagement envers la primauté du droit».
On constatait une forte présence policière dans les rues de la capitale, Nairobi, avant l’annonce de la décision, vendredi. Les organisations de défense des droits de la personne affirment que les forces de sécurité ont tué 24 personnes depuis le scrutin du 8 août.