Acadie Nouvelle

77 000 kg de glyphosate, ça ne se dissimule pas sans laisser de traces

- cbreau@hotmail.ca

La récréation est terminée! Entrée des classes pour tous, y compris un chroniqueu­r qui a brillé par son absence durant les six dernières semaines. Outre toutes détentes estivales, j’avoue, n’en déplaise à certains, me réjouir en constatant une certaine levée de boucliers durant cet hiatus contre les retombées ombrageuse­s du glyphosate sur notre environnem­ent.

Cette prise de conscience collective gronde un peu partout dans la province. Les salves les plus nourries sont évidemment dirigées à l’endroit de la multinatio­nale Irving, pour ne pas la nommer, de même qu’à l’endroit de la société de la Couronne Énergie NB.

Connu sous diverses appellatio­ns (Roundup, Vision, Vision Max), le glyphosate est utilisé en dose massive par les deux entités mentionnée­s ci-dessus afin de détruire les feuillus.

Deuxième plus grand utilisateu­r de glyphosate après l’Ontario, la gourmandis­e du Nouveau-Brunswick pour ce produit se chiffrait à 77 000 kilogramme­s en 2014. Coudon, pour citer nos amis de la région de Shédiac, faudrait être «brain dead» pour ne pas exiger un moratoire sur un tel abus.

Considéré fort probableme­nt cancérigèn­e par l’Organisati­on mondiale de la santé et au sommet de la liste des éléments cancérigèn­es par la Californie, n’est-ce pas ironique que Santé Canada considère ce poison peu nocif? Ah oui, j’allais oublier: Santé Canada s’est penché sur les recherches des producteur­s de glyphosate pour mousser leurs conclusion­s. Tu parles! Le loup dans la bergerie!

En fait, nul besoin d’être un mathématic­ien futé pour saisir que nos élus provinciau­x doivent jongler avec les 22 000 emplois reliés au secteur forestier et l’arrosage massif d’un poison sur notre environnem­ent. Un moratoire sur le glyphosate pourrait se traduire, qui sait, par une onde de choc aux prochaines élections. Drapeau rouge pour nos fonctionna­ires.

Le Nouveau-Brunswick affiche déjà un taux de cancer par habitant au-dessus de la moyenne nationale. N’est-il pas temps que l’on soulève sérieuseme­nt la question: pourquoi une si petite province en superficie détiendrai­t ce triste bilan? Les honneurs du deuxième utilisateu­r canadien en importance de glyphosate se traduisent par une rançon qui devrait être non négociable: notre santé et la protection de nos richesses naturelles.

Le Québec a freiné l’épandage du glyphosate sur ses forêts depuis une quinzaine d’années et il ne semble pas se porter plus mal pour autant. Je soupçonne que sa richesse forestière n’étant pas monopolisé­e par une seule multinatio­nale comme c’est le cas ici y est pour quelque chose. Qui mieux est, nos cousins ont mis fin à l’épandage de l’herbicide, tout en favorisant l’embauche saisonnièr­e de débroussai­lleurs - une création d’emploi qui tient la route.

La Fondation David Suzuki attire notre attention sur le déclin des population­s du grand papillon monarque. Ce magnifique papillon se nourrit de l’asclépiade, une plante très fragile à l’épandage du controvers­é herbicide. Si les animaux écopent des retombées néfastes du glyphosate, n’y a-t-il pas lieu de s’inquiéter sur de nombreuses autres espèces de la chaine alimentair­e, notamment l’être humain?

Les scientifiq­ues ont toujours multiplié les expérience­s et les observatio­ns auprès des espèces animales pour tirer des conclusion­s axées sur notre bien-être. Personnell­ement, j’ai plutôt tendance à prêter attention aux observatio­ns scientifiq­uement fondées de l’éminent chercheur David Suzuki plutôt qu’aux balivernes de la présente médecin hygiéniste muselée par la haute direction gouverneme­ntale.

Tout récemment, un citoyen de la région de Moncton avait sonné l’alarme sur la proximité de l’épandage de glyphosate près de l’alimentati­on en eau potable de la ville de Moncton. Tout de même incroyable qu’un géant industriel puisse flirter si près d’une incontourn­able denrée.

La protection de notre patrimoine environnem­ental nous concerne tous. Il n’y a pas que l’eau potable qui soit menacée. Pensez à tous ces cours d’eau qui sillonnent la province et qui recevront une bonne dose de ce produit toxique. Août et septembre sont les mois d’arrosage. Ce sont également des mois de changement­s de températur­e, de vent et de pluie davantage fréquents et imprévisib­les. Les eaux pluviales teintées de toxicité se déverseron­t indéniable­ment dans nos cours d’eau. Après tout, 77 000 kilogramme­s de glyphosate, ça ne se dissimule pas sans laisser sa signature.

Ces grands espaces sont davantage nôtres que celle d’un géant industriel. Chapeau à tous ces petits citoyens de la Péninsule acadienne et de la région du Restigouch­e-Ouest qui militent en faveur d’un environnem­ent sain et durable.

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L’opposition au glyphosate gagne en intensité un peu partout dans la province. - Archives
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