Des voyants rouges au PC
Les progressistes-conservateurs font du surplace depuis l’automne.
Le dernier sondage en date de la firme Corporate Research Associates nous révèle que les libéraux jouissent d’une confortable avance dans les intentions de vote. Ces données nous en disent long sur la difficulté du chef progressiste-conservateur Blaine Higgs à s’imposer à titre de premier ministre en attente.
Les sondeurs ont moins bonne presse ces temps-ci, notamment en raison de leur incapacité à prédire de grands bouleversements politiques (le Brexit, l’élection de Donald Trump, la majorité remportée par les libéraux de Justin Trudeau...).
Ceux de Corporate Research Associates (CRA) concernant les intentions de vote au N.-B. sont toutefois intéressants du fait qu’ils sont réguliers (aux trois mois) et que la marge d’erreur des électeurs décidés est semblable d’une fois à l’autre (elle tourne généralement autour de 4,5%, 19 fois sur 20). Ils nous offrent donc un élément de comparaison fiable à travers le temps. Si un parti politique perd la confiance de l’électorat, cela finit par se répercuter dans les données colligées par la firme néo-écossaise.
Le sondage dévoilé mardi nous révèle que 47% des électeurs décidés appuient le Parti libéral. C’est un chiffre impressionnant. À titre comparatif, cette formation politique a remporté la majorité des sièges aux dernières élections en obtenant 42,72% du vote populaire.
La comparaison est toutefois imparfaite. Les chiffres obtenus par les libéraux dans le sondage de CRA ne comprennent que les électeurs qui ont déjà fait leur choix en vue du prochain scrutin. Toujours selon CRA, 30% des électeurs (en baisse de 6% depuis trois mois) sont toujours indécis.
Notons aussi que le taux de satisfaction du gouvernement continue de dépasser 50%, ce qui est très élevé. Enfin, la popularité personnelle de Brian Gallant est en hausse à 36% (+5%) alors que celle de Blaine Higgs est en baisse, à 20% (-3%).
Tout n’est pas joué. Les partis de l’opposition ont encore amplement de temps pour renverser la vapeur. Ces chiffres sont toutefois très encourageants pour le premier ministre Gallant. S’il garde le cap, il pourrait très bien devenir en 2018 le premier chef de parti à être réélu premier ministre du NouveauBrunswick en 15 ans.
Si l’heure n’est pas à la panique au sein de la garde rapprochée de Blaine Higgs, elle devrait cependant commencer à porter plus d’attention aux voyants rouges qui clignotent sur le tableau de bord.
Deux éléments majeurs sont survenus depuis un an. Le Parti progressiste-conservateur a élu un nouveau chef et le Parti libéral s’est embourbé dans une crise, après la révélation que Service NB a truqué à la hausse les évaluations foncières de milliers de NéoBrunswickois.
Ces deux événements auraient normalement dû avoir un impact à la hausse plus important sur les intentions de vote à l’égard des bleus. Or, il n’en est rien.
Une partie de ce phénomène s’explique par le calendrier. La saison estivale est souvent favorable aux gouvernements. Il est plus difficile de marquer des points contre le parti au pouvoir quand l’Assemblée législative est en vacances et que le premier ministre fait la tournée des festivals.
Cela dit, les conservateurs font du surplace depuis l’automne. S’ils n’ont pas pu profiter de quelque chose d’aussi grave que le scandale des impôts fonciers, il est à se demander de quelle manière ils pourront ébranler le gouvernement. On constate d’ailleurs aussi un certain essoufflement de l’intérêt de l’opinion publique pour les sujets martelés par ceux-ci depuis 2014, tels les dossiers linguistiques (les fameux autobus «bilingues») et le scandale Atcon.
Leur tâche est devenue encore plus compliquée depuis le remaniement ministériel du 5 septembre. En évinçant Victor Boudreau et Donald Arseneault du Cabinet, Brian Gallant enlève à l’opposition ses têtes de Turc favorites. M. Boudreau, en particulier, était souvent montré du doigt, notamment en raison de son rôle dans un projet de camping à Shediac et par ses controversées réformes en santé.
Ils ont été remplacés par Benoît Bourque (Santé) et Brian Kenny (porte-parole pour les langues officielles), deux hommes qui traînent un moins lourd bagage.
Ils devront toutefois faire leurs preuves. Benoît Bourque, en particulier, sera mis à l’épreuve dès le retour des députés à la législature cet automne. Nous ignorons toujours s’il poursuivra la mission de son prédécesseur de privatiser le Programme extra-mural et TéléSoins, de même que les services de cafétéria et d’entretien des hôpitaux, ou s’il mettra fin à ces réformes controversées et impopulaires.
Pour Blaine Higgs, c’est là que se trouve la clef. La santé est depuis longtemps un enjeu très sensible auprès de l’électorat. Si les progressistes-conservateurs n’arrivent pas dans les prochains mois à profiter de l’opposition aux réformes pour fragiliser le gouvernement Gallant, ils risquent fort bien de poireauter quatre ans de plus dans l’opposition.