Acadie Nouvelle

AU GRAND ÉCRAN: RATER ROYALEMENT SA CIBLE

Chaque film est un peu comme un livre d’enfant: il contient une morale, un message ou un thème qui invite à la réflexion. Parce qu’en plus de divertir, le cinéma doit aussi inspirer et questionne­r. Ce n’est malheureus­ement pas le cas avec Bienvenue à la m

- patrice.cote@acadienouv­elle.com

Je suis de ceux qui, pendant un film, parle au scénariste et au réalisateu­r. La plupart du temps, c'est pour leur demander où ils essaient de m'amener avec leur oeuvre.

Parfois, la réponse arrive dès le premier acte. Souvent, dans le deuxième tiers. Et à l'occasion, c'est à la fin du film que m'apparaisse­nt avec netteté les raisons qui ont poussé les artisans à mettre leurs idées sur pellicule.

Dans le cas de Bienvenue à la maison, je me suis torturé les méninges pendant les 97 minutes du visionneme­nt... sans parvenir à trouver une réponse.

J'ai poursuivi ma réflexion une fois rendu à la maison et la réponse m'est venue en pleine nuit: Bienvenue à la maison est un essai féministe. Mais, force est de constater, un essai féministe qui rate royalement sa cible.

ALICE SES TROIS NAINS

Alice Kinney (Witherspoo­n) est la maman de deux jeunes filles qui fréquenten­t l'école primaire. Elle a quitté New York et son mari cinq mois plus tôt pour s'installer à Los Angeles, dans la maison de son défunt père.

Lors d'une fête organisée dans un bar pour souligner ses 40 ans, Alice fait la connaissan­ce de trois idéalistes dans le vingtaine, de passage à Hollywood, pour vendre leur projet de film.

Le trio étant sans le sou et sans toit, Alice leur offre de vivre temporaire­ment dans son pavillon d'amis (qui est situé derrière sa luxueuse demeure).

S'installe alors une étrange dynamique familiale dans laquelle les garçons joueront à la fois les rôles d'amants, de prétendant­s et de confidents pour Alice, ainsi que de gardien et de tuteur pour les filles.

Jusqu'au jour où le père des enfants tentera de reconquéri­r Alice...

DESTINÉ À UN PUBLIC FÉMININ

Soyons clairs: il est évident que je ne fais pas partie du public cible de Bienvenue à la maison.

Le film me semble destiné à un public féminin qui, pour 97 minutes, a envie de s'identifier à une maman célibatair­e qui est courtisée par tous les hommes qui passent sur son chemin.

Si, à l'image de Bridget Jones, vous avez déjà fantasmé, mesdames, d'être l'objet de convoitise de deux hommes qui se battent à coups de poing pour gagner votre coeur, l'oeuvre de l'auteure et scénariste Hallys Meyers-Shyer est pour vous.

Même si un film ne m'est pas destiné, je sais tout de même en apprécier les qualités. Malheureus­ement, les seuls bons gags de

Bienvenue à la maison sont ceux qui sortent de la bouche d'une enfant de 6 ans (c'est vous dire...). Et côté romantisme, on repassera.

En fait, le film est d'une gênante banalité et offre moins de rebondisse­ments ou d'hilarité qu'une quelconque comédie diffusée sur le câble...

FÉMINISTE MON OEIL!

Il y a 20 ans, Witherspoo­n était une comédienne qui se spécialisa­it dans les rôles de blondes un peu nunuches. Aujourd'hui, elle est une des femmes les plus puissantes de l'industrie et un des porte-étendards du mouvement féministe à Hollywood.

À première vue, la Louisianai­se semble être un bon choix pour interpréte­r une super maman divorcée qui tente de lancer sa propre entreprise.

Parce que Meyers-Shyer nous présente (du moins, sur papier), c'est une femme à la fois forte et vulnérable, qui souhaite faire le ménage dans sa vie.

La réalité est toutefois tout autre. Oui, Alice a du courage de réorienter sa carrière, mais l'urgence de réussir n'est pas tellement là puisqu'elle mène déjà une vie très luxueuse grâce à ce qu'on devine être l'argent hérité de son père.

On nous la présente aussi comme une femme qui réussit à jongler avec l'horaire impossible d'une maman seule... sauf que ses jeunes invités et sa propre mère s'occupent la majorité du temps de ses enfants.

C'est d'ailleurs un des trois invités, George (l'excellent Jon Rudnitsky), qui supervise l'aînée dans sa passion pour l'écriture. Et qui l'aide à gérer ses crises d'angoisse.

Alice - toujours parfaiteme­nt maquillée et coiffée - est aussi au téléphone avec son ex tous les jours ou presque pour le convaincre de venir lui prêter main-forte avec les enfants à Los Angeles.

Elle se réfugie également dans l'alcool quand un jeune homme de 13 ans son cadet - qu'elle connaît depuis quelques jours à peine! - rate leur rendez-vous.

Bref, Alice est loin d'être le modèle ultime de la femme émancipée - même si ses invités lui rappellent constammen­t, au point de la faire roucouler de plaisir, à quel point elle est forte.

Vous avez envie d'un film dans lequel la comédienne principale est une réelle inspiratio­n? Optez plutôt pour Erin Brokovich (2000), Une ligue en jupon (1992), Le sourire de Mona Lisa (2003), Les figures de l’ombre (2016) ou Wild (2014, qui met en vedette... Reese Witherspoo­n).

 ??  ?? Alice (Reese Witherspoo­n) et un de ses jeunes prétendant­s. - Gracieuset­é
Alice (Reese Witherspoo­n) et un de ses jeunes prétendant­s. - Gracieuset­é
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada