Acadie Nouvelle

Les droits des priants

J’ai entendu Dany Laferrière parler des droits des lecteurs. Il disait que ceux-ci ont le droit de ne pas aimer un livre. De ne pas en terminer la lecture. De commencer par la fin. D’inventer des «mensonges blancs» pour avoir le temps de lire.

- scomo@nbnet.nb.ca

J’ai pensé m’inspirer de sa chronique pour écrire la mienne. Pour parler de la prière alors que certains aspirent, en ces jours de rentrée, d’y consacrer un peu de temps chaque jour.

Nous avons parfois une image idéalisée de la prière. Tellement que nous pensons que ce n’est pas pour nous. Il nous arrive d’envier la prière de certaines personnes qui semblent si attentionn­ées à ce qu’elles vivent et qui semblent en retirer tant de bienfaits. Mais attention à notre imaginatio­n: la prière de l’autre peut être faite de combats qui ne se voient pas.

La prière est pour tous. Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises prières. Pour Augustin, le simple désir d’être en communion avec Dieu est déjà une prière. Il ne faut pas chercher la perfection dans toutes nos démarches de prière. J’ai préparé une liste de cinq droits des priants.

D’abord, tout priant a le droit d’être distrait. Souvent, le fait de s’arrêter fait remonter à la mémoire les événements de nos vies. Nous passons en revue ce que nous avons fait et ce qu’il nous reste à faire. Au lieu de nous inquiéter de ces distractio­ns, nous pouvons tenter de discerner la trace de Dieu dans nos vies et trouver sa volonté en demandant: «Qu’est-ce que Tu attends de moi dans cette situation?» Passer sa vie en revue peut être le commenceme­nt d’une prière où l’on tourne peu à peu notre regard sur Dieu.

Le priant a le droit de réfléchir. Il n’est pas nécessaire que toute la prière soit un dialogue avec Dieu. D’ailleurs, entre la réflexion et la prière, la limite n’est pas claire. S’arrêter pour réfléchir sur la vie, sur Dieu et son oeuvre peut conduire à prier. De nombreux psaumes sont des méditation­s sur Dieu avant que le psalmiste s’adresse à Lui. Peu à peu, on passe d’un monologue intérieur à un dialogue avec Dieu. Ce n’est qu’après avoir dit «Le Seigneur est mon berger» que le psalmiste lui dit «Tu es avec moi».

Le droit de changer de lieu. Certes, il est profitable d’une certaine routine dans la prière: choisir un moment qui revient périodique­ment, avoir une démarche semblable (par exemple s’asseoir, prendre sa Bible, etc.) et être dans le même lieu. Mais il est parfois nécessaire de faire autrement.

S’il n’est pas toujours possible de prier le dimanche dans son église, il est possible d’aller ailleurs. Des gens expériment­ent parfois des bienfaits à changer de lieux. Les intentions de prière varient parfois selon les contextes.

Le droit de changer de forme de prière. Tantôt une prière de demande est davantage appropriée à ce qui se vit en moi ou autour de moi. Une autre fois, une prière d’action de grâce convient davantage à la suite d’un bienfait. Parfois, c’est une prière de louange qui monte spontanéme­nt en face d’une merveille de la création ou d’un passage biblique.

Enfin, la prière nous donne le droit de faire tomber les masques devant Dieu. Inutile de lui cacher des pans de notre vie.

Parfois, on voudrait s’abandonner, mais sans tout offrir, de peur qu’Il nous prenne quelque chose qu’on croit essentiel. Être soi-même devant Dieu, c’est aussi avoir le droit d’exprimer sa colère, sa déception, voire son amertume. La prière nous donne le droit d’être soi. Parfois blessé et meurtri. Ou encore debout et confiant.

La prière ne vise pas à faire de Dieu le serviteur de nos volontés, mais à nous faire serviteurs de Sa volonté. Nos demandes ne sont pas toujours répondues selon nos désirs. Dieu ne veut pas nous faire perdre ce qui est le plus précieux en vue d’un profit immédiat. Il fait en sorte que «toutes choses concourent au bien de ceux qui l’aiment» (Rm 8).

La prière transforme intérieure­ment. Elle pacifie le coeur et purifie le regard. Elle nous garde dans l’esprit de la gratitude. Elle nous permet de nous situer d’une manière juste devant Dieu: comme des bénéficiai­res de sa bonté. Elle fait du bien. Allez-y! Essayez! Vous avez le droit d’essayer… et tant de droits comme priants!

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La prière ne vise pas à faire de Dieu le serviteur de nos volontés, mais à nous faire serviteurs de Sa volonté. – Gracieuset­é
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