La saison qui prend son temps
Hier, c’était l’été. Aujourd’hui, c’est l’automne! La durée du jour est égale à celle de la nuit. Pas pour longtemps: la nuit va prendre peu à peu le dessus. C’est le temps de profiter des heures d’ensoleillement. Aussi de se reposer d’un été chargé pour
Lorsque je mets mon linge dans la laveuse...
«Lynn et Annie, laissez-moi finir ma phrase!» Mes soeurs ne croient pas que je fais du lavage. L’une d’elles a pu s’étouffer avec sa gorgée de café pendant que l’autre est crampée de rire en lisant cela. Je leur concède que je ne fais pas toujours mon lavage. Pas souvent. Mais ça m’arrive parfois.
Je recommence. Lorsque je mets mon linge dans la laveuse, je choisis la plupart du temps le cycle régulier (ou une fonction semblable, au centre). J’évite les cycles plus intenses qui me semblent disproportionnés pour mes besoins. Je pense ainsi économiser de l’eau et de l’énergie. J’utilise rarement le cycle délicat. Et pourtant.
Dans le cycle des saisons, c’est le cycle délicat que je préfère. Ça tombe bien: la terre vient d’activer cette commande avec l’équinoxe d’automne.
L’été, on est assurément sur le cycle rapide. Tout va vite. Personne ne songe à économiser son énergie! C’est la saison des ouragans au sud et dans nos agendas remplis pour ne rien manquer et avoir les meilleurs choix pour les concerts, les festivals, les voyages, etc. Il faut profiter de tout. Surtout du soleil!
Au matin, lorsque l’astre solaire se montre le bout du nez, on court à la plage, on monte sur le vélo, on prépare le barbecue, on va aux fraises. On se dit que demain, il pourrait pleuvoir... et qu’on pourra alors se reposer. Mais voilà le problème de cet été: on n’a pas eu de pluie! Chaque journée de soleil était comme la dernière dont on voulait profiter au maximum. Aujourd’hui, plusieurs sont brûlés… par le soleil! Et le cycle rapide!
L’automne, me semble-t-il, c’est la saison pendant laquelle on change le cycle: on l’apporte au cycle délicat. Cette saison prend son temps. Contrairement à l’été. Et au printemps.
En juin, la nature passe du printemps à l’été en quelques jours. Un jour on gèle et le lendemain on sue. Un jour, les arbres bourgeonnent timidement et le lendemain, ils sont déjà tout garnis.
Au printemps, la nature est comme les adolescents en poussée de croissance. Ils se couchent avec des bras d’enfants… et se lèvent le lendemain avec la longueur des bras d’adultes. Heureux ceux pour qui les bras s’allongent la même nuit que leurs jambes!!!
À ce temps-ci de l’année, la nature est au ralenti. Il y a encore plusieurs journées ensoleillées, chaudes, pour nous habituer peu à peu aux froideurs. Du t-shirt on passe à la chemise. Ensuite, on déroule les manches. On ajoute une petite laine. Et un manteau. Presque sans s’en rendre compte, on passe du maillot de bain à la tuque.
Les arbres aussi prennent leur temps. Ils changent de couleurs graduellement: du vert au jaune, à l’orangé, au rouge flamboyant! Et les feuilles tombent. Les unes après les autres. Pas simultanément comme les bourgeons qui pointent au printemps.
La nature est comme ces adultes qui prennent des années avant de devenir vieux. Et lorsqu’ils le sont devenus, personne ne s’en est aperçu. C’est peut-être pour cela qu’on parle du 3e âge comme l’automne de la vie: la saison qui prend son temps.
Dans le cycle de saisons, l’automne s’accorde avec le cycle délicat. Comme la terre qui s’engourdit, on se terre nous aussi dans nos maisons avec ceux qu’on aime: nos proches, nos amis, soi-même! Comme les grandes marées qui s’étirent le plus loin possible sur la grève, on aime étirer le temps passé avec un bon livre ou s’étirer lorsqu’on est blotti dans sa couverture de laine.
Lorsque je sors mes chandails de laine à ce temps-ci de l’année, j’ai toujours la même question pour ma mère: «est-ce qu’on peut mettre cela dans la laveuse?» Et elle de répondre: oui, mais au cycle délicat! Voilà ce que j’aime de cette saison: les p’tites laines et… le cycle délicat!