LE LUXE AUX FRAIS DES CONTRIBUABLES
Le plus récent rapport de la vérificatrice générale du Nouveau-Brunswick révèle un train de vie luxueux chez Atcon alors que l’entreprise de Miramichi sollicitait l’aide financière de la province.
Selon Kim MacPherson, Atcon a dépensé 735 000$ en produit de luxe à des fins personnelles sur une période de trois ans avant sa faillite qui a coûté plusieurs dizaines de millions de dollars aux contribuables.
Atcon a notamment fait l’achat d’une propriété de vacances dans les Caraïbes et de bijoux en plus de faire la location d’une voiture de luxe. Des cotisations à des régimes enregistrés d’épargne-retraite et des versements pour les impôts sur le revenu des particuliers ont également été effectués à partir des comptes de l’entreprise, selon Mme MacPherson.
«Certains membres de la famille des cadres supérieurs clés, qui ne semblaient pas être présents de façon régulière et soutenue chez Atcon, ont reçu des salaires importants», note aussi la vérificatrice générale.
«Pour certaines de ces personnes, nous avons trouvé peu d’éléments probants indiquant qu’elles avaient fait un travail quelconque chez Atcon.»
De 2008 à 2010, Atcon a également loué un avion d’affaires au coût de 8,2 millions $.
«Nous avons été étonnés de constater qu’une société subissant de fortes tensions financières et approchant la province pour de l’aide financière avait un bien aussi extravagant qu’un avion d’affaires. La province était au courant de l’existence de l’avion», assure la vérificatrice dans son rapport.
Au fil des ans, le gouvernement du N.-B., principalement à l’époque du gouvernement libéral de Shawn Graham, a accordé 63,4 millions $ en aide financière à l’entreprise de Miramichi malgré l’opposition des experts de la fonction publique.
La majorité de cet argent a été perdu lorsque Atcon a fait faillite en 2010.
Durant son enquête, la vérificatrice générale a interviewé six ministres du cabinet du premier ministre Brian Gallant qui étaient aussi ministres à l’époque: Donald Arseneault, Victor Boudreau, Rick Doucet, Ed Doherty, Brian Kenny et Denis Landry.
MM. Arseneault, Boudreau et Doherty ont quitté le cabinet depuis et ont annoncé qu’ils ne solliciteraient pas de nouveau mandat lors des prochaines élections.
La vérificatrice générale a discuté avec ces ministres afin de comprendre pourquoi le gouvernement de l’époque avait consenti à aider financièrement Atcon alors que l’avenir de l’entreprise était extrêmement sombre.
«Il semble que la décision était fondée sur plusieurs facteurs, incluant une économie déprimée à Miramichi et le grand nombre d’entreprises qui seraient touchées négativement par la défaillance d’Atcon», avance Kim MacPherson dans son rapport d’une centaine de pages.
La situation de l’entreprise était telle qu’il aurait dû être clair pour le gouvernement à l’époque que les derniers 50 millions $ consentis à Atcon par la province ne seraient pas suffisants pour sauver l’entreprise, atteste Mme MacPherson.
Dans son précédent rapport, la vérificatrice générale avait mis au jour que le cabinet de l’époque avait été à l’encontre de la recommandation de ses fonctionnaires en renonçant à certaines garanties sur ses investissements au profit de la banque d’Atcon.
Selon la vérificatrice, les six ministres n’ont présenté «aucune justification claire» pour cette décision qui a coûté de 12 millions $ à 19 millions $ aux contribuables au moment de la faillite de l’entreprise.
«La banque, très astucieusement, a manoeuvré pour atténuer ses pertes potentiellement substantielles alors que le cabinet a ignoré les conseils de ses bureaucrates en révisant considérablement les mesures visant à protéger la province face à la détérioration de la santé financière d’Atcon», résume Mme MacPherson.
En réponse au rapport de la vérificatrice générale, le président du Conseil du trésor, Roger Melanson, a admis que tenter de sauver l’entreprise était une erreur.
«La décision qui a été prise à cette époque, avec l’information que nous connaissons aujourd’hui, a été une erreur, c’est clair.»
M. Melanson n’a cependant pas été capable de fournir plus de détails concernant la décision du gouvernement de renoncer à certaines garanties au bénéfice des créditeurs d’Atcon.
«Je ne faisais pas partie de ce gouvernement», s’est-il contenté de dire.