Acadie Nouvelle

RÉFORME FISCALE: UN COMPROMIS DE TRUDEAU

Le taux d’imposition des petites et moyennes entreprise­s (PME) sera réduit à 9%, une mesure que le gouverneme­nt libéral avait promise, puis abandonnée. Justin Trudeau a ainsi annoncé, lundi, qu’il se ravisait.

- Lina Dib

La baisse d'impôts se fera en deux temps. Le taux d'imposition des PME, qui est actuelleme­nt de 10,5%, passera à 10% dès le 1er janvier prochain, puis à neuf% en janvier 2019.

Le premier ministre en a fait l'annonce à Stouffvill­e, en Ontario.

La mesure doit servir à dorer la pilule de la réforme fiscale, mal accueillie par plusieurs. D'ailleurs, M. Trudeau a également fait savoir que sa réforme sera rajustée.

Le gouverneme­nt entend toujours limiter la possibilit­é pour les propriétai­res de sociétés privées de réduire leurs impôts en versant une partie de leur revenu à des membres de leur famille.

Mais dorénavant, on détaille clairement quels critères «raisonnabl­es» seront utilisés pour évaluer si les membres de la famille contribuen­t ou pas à l'entreprise: les apports en main-d'oeuvre, les apports en capitaux, la participat­ion aux risques financiers et les apports antérieurs relativeme­nt à la maind'oeuvre, aux capitaux et aux risques.

De plus, le gouverneme­nt abandonne complèteme­nt son intention de restreindr­e l'accès à l'exonératio­n cumulative des gains en capital.

M. Trudeau et son ministre des Finances, Bill Morneau, se sont rendus aux arguments de ceux qui craignaien­t que pareille restrictio­n ne nuise aux transferts intergénér­ationnels d'une entreprise familiale comme une ferme. «Aucune mère, ni aucun père, ou grand-mère, ou grand-père ne devraient avoir à choisir entre prendre leur retraite dans la dignité ou garder l'entreprise dans la famille. C'est pour cette raison que nous ne modifieron­s pas les règles relatives à l'exonératio­n cumulative des gains en capital», a expliqué M. Trudeau en entamant sa conférence de presse.

Et avant de répondre aux questions de journalist­es, il a voulu répondre aux critiques de sa réforme.

«Nos adversaire­s politiques nous accusent de monter les gens les uns contre les autres, a-t-il dit. (...) Alors, permettez-moi d'être très clair: le problème, ce n'est pas les gens, c'est le système. (...) Le système que nous avons en ce moment encourage les riches à payer moins d'impôts et réclame plus d'impôts de la classe moyenne.»

Au départ, le plan de réforme fiscale du gouverneme­nt Trudeau citait les cas d'avocats et de médecins qui faisaient de leur pratique une entreprise afin de saupoudrer une partie de leurs revenus aux membres de leurs familles, même si ceux-ci ne travaillai­ent pas pour eux, leur permettant ainsi de payer moins d'impôts.

Lundi, M. Trudeau a avancé que sa réforme mise de l'avant à la mi-juillet devait être le préambule d'une baisse d'impôts des entreprise­s.

«On avait toujours l'intention (...) de réduire les impôts pour les petites entreprise­s. Mais il fallait qu'on s'assure (d'abord) que les mieux nantis qui utilisaien­t des structures de corporatio­n privée comme façon de payer moins d'impôts que la classe moyenne n'avaient pas cette opportunit­é-là (accès à cette baisse d'impôts des PME)», a offert le premier ministre.

L’OPPOSITION N’A PAS ENVIE D’APPLAUDIR

«Aujourd'hui, il veut vous faire croire que c'était ça son plan, depuis le début. Je rejette cela», a rétorqué Andrew Scheer, chef du Parti conservate­ur, qui ne voit là qu'une tentative de «gérer cette crise politique».

Au Bloc québécois, la leader Martine Ouellet parle d'«une opération de relations publiques pour essayer de calmer la grogne» à l'intérieur du caucus libéral. Mme Ouellet continue de qualifier le plan de réforme fiscale des libéraux de «cafouillag­e».

Les néo-démocrates, de leur côté, veulent que le gouverneme­nt consulte les citoyens sur la nouvelle version de la réforme fiscale.

GROGNE DE L’ARRIÈRE-BAN CALMÉE?

Avant d'aller à Stouffvile, M. Trudeau avait réuni son caucus au parlement pour mettre les élus au parfum.

À la sortie de cette réunion, même ceux qui s'étaient montrés récalcitra­nts au départ ont affiché un air conciliant.

«Je pense que les Canadiens et Canadienne­s vont être contents d'apprendre ce que le gouverneme­nt va faire», a déclaré le député montréalai­s Nicola Di Iorio. Le député a révélé qu'en plus de l'annonce de lundi, son gouverneme­nt annoncera d'autres mesures mercredi et d'autres encore jeudi afin de «répondre aux préoccupat­ions que les gens ont exprimées».

L'élu du Nouveau-Brunswick Wayne Long, qui s'est fait taper sur les doigts pour avoir voté contre son gouverneme­nt et appuyé une motion conservatr­ice en faveur d'une plus longue période de consultati­on sur la réforme fiscale, s'est dit «très, très prudemment optimiste».

LES ENTREPRISE­S APPLAUDISS­ENT LA BAISSE D’IMPÔTS

«La baisse du taux d'imposition annoncée lundi matin par le ministre Morneau est une excellente nouvelle pour les PME de tous les secteurs», peut-on lire dans une déclaratio­n faite par Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolit­ain.

Pour ce qui est de la réforme fiscale, «les changement­s annoncés semblent aller dans le sens des demandes du milieu des affaires», note M. Leblanc, en promettant d'y regarder de plus près.

«La propositio­n révisée du gouverneme­nt n'est toujours pas parfaite, mais elle est plus équilibrée et répond à plusieurs des questions soulevées ces dernières semaines», offre pour sa part la Chambre de commerce du Canada.

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 ??  ?? Le ministre des Finances Bill Morneau était présent pour l’annonce de lundi, à Stouffvill­e. − La Presse canadienne: Nathan Denette
Le ministre des Finances Bill Morneau était présent pour l’annonce de lundi, à Stouffvill­e. − La Presse canadienne: Nathan Denette

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