ALCOOL: DES ALLIÉS POUR GÉRARD COMEAU
L’intérêt pour l’affaire Gérard Comeau devant la Cour suprême du Canada ne se dément pas. Une douzaine de groupes présenteront leur point de vue sur le commerce interprovincial devant le plus haut tribunal du pays en plus des avocats de l’homme de Tracadie et des procureurs généraux de la plupart des provinces et des territoires.
Le geste anodin, bien qu’illégal, d’un homme qui souhaitait économiser quelques dollars en allant faire provision de bières dans la province voisine est véritablement en train de se transformer en débat national sur le commerce et le libre-échange au sein de la fédération.
Douze groupes représentant 21 organisations ont reçu l’accord de la Cour suprême pour participer à l’appel du jugement en faveur Gérard Comeau par la province du Nouveau-Brunswick.
La longue liste des intervenants va des géants de la bière Molson et Labatt jusqu’à l’Institut économique de Montréal en passant par le service d’expédition FedEx et le groupe médiatique Cannabis Culture qui possède aussi des dispensaires illégaux de marijuana.
M. Comeau, un retraité de la région de Tracadie, a reçu une contravention en 2012 pour avoir rapporté du Québec une quantité de bières et de spiritueux qui dépassait la limite permise par la loi provinciale.
Ses avocats ont cependant réussi à convaincre le juge Ronald LeBlanc de la Cour provinciale que la loi allait à l’encontre de l’article 121 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui stipule que tous les produits cultivés, fabriqués ou manufacturés dans une province doivent être admis dans les autres provinces sans «franchise».
Le Nouveau-Brunswick, qui a porté la décision en appel, est d’avis que le juge LeBlanc y est allé d’une interprétation tellement littérale de l’article 121 qu’elle pourrait «mettre fin au fédéralisme canadien» tel qu’on le connaît si la Cour suprême n’infirme pas son jugement.
Au-delà du monopole provincial sur la vente de l’alcool, la décision du juge de première instance pourrait mettre un terme à l’ensemble des barrières non tarifaires sur le commerce interprovincial comme la gestion de l’offre.
Les associations de producteurs de lait, d’oeufs et de poulet du Canada font notamment partie de ceux qui ont obtenu le droit d’intervenir devant la Cour suprême lorsque l’affaire sera entendue en décembre.
La victoire de M. Comeau «pourrait entraîner la destruction de la gestion de l’offre, un système de réglementation en place depuis des générations, dont dépendent les moyens de subsistance de milliers d’agriculteurs du pays», préviennent les producteurs dans leur requête d’intervention déposée au tribunal. Molson et Labatt, qui sont représentés dans cette affaire par Canada’s National Brewers, semblent vouloir défendre le statu quo, tout comme le gouvernement du Québec, selon les documents déposés au tribunal.
Les juges entendront les arguments des parties à Ottawa les 6 et 7 décembre.