DES ÉCOLES FANTÔMES
La situation est connue, de moins en moins de jeunes fréquentent les écoles de la province, ce qui force des fermetures. Mais qu’arrive-t-il avec les bâtiments une fois vides? L’Acadie Nouvelle a obtenu et compilé des informations sur les 20 dernières années. Bilan: les contribuables paient souvent pour des bâtiments qui seront éventuellement détruits.
À Saint-Sauveur dans la Péninsule acadienne, l’école La Découverte a fermé ses portes cette année, faute d’un nombre suffisant d’élèves. Cela s’ajoute à d’autres fermetures dans le DSL dont le presbytère, menacé de démolition. Le coup a été dur pour des citoyens.
La communauté fait maintenant face au défi de donner une seconde vie au bâtiment avec un projet qui servira à revitaliser le village.
«Souvent ce qui arrive, c’est que les communautés sont laissées à elles-mêmes avec un bâtiment et plus ou moins de solutions. Il faut trouver un investisseur qui soit prêt à faire quelque chose avec l’édifice. Ça représente tout un défi», souligne Danny Comeau, président du DSL de Saint-Sauveur.
Des citoyens ont des idées et veulent travailler fort pour faire de l’ancienne école un espace central au village. Des approches seront faites pour trouver des investisseurs.
«C’est un beau bâtiment qui est quand même assez récent, qui date de 1986, avec un beau grand terrain et un parc. Déjà, la communauté est en train de s’organiser pour faire quelque chose avec le parc», dit M. Comeau.
Une entente avec le district scolaire a été signée pour que le district assure temporairement l’entretien de l’école.
LA MOITIÉ DES ÉCOLES DÉTRUITES
Le destin de l’ancienne école de SaintSauveur pourrait être plus funeste: à l’instar de plusieurs autres, faute d’entretien, le bâtiment pourrait éventuellement être démoli.
L’Acadie Nouvelle a rassemblé et colligé de l’information en provenance des trois districts scolaires francophones, du ministère des Transports et de l’Infrastructure, du ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance, de municipalités ainsi qu’en consultant des articles dans les médias.
Bilan: 31 fermetures d’écoles ont eu lieu depuis 1998 dans les trois districts francophones, majoritairement dans le nord de la province, contre 13 ouvertures, principalement dans le Sud (voir encadré).
Sur la trentaine de fermetures, 14 écoles ont été démolies. Dans trois cas, un nouvel établissement scolaire a vu le jour en remplacement.
Dans le Restigouche, le bilan récent est particulièrement sombre. Les écoles Arthur-Pinet d’Eel River Crossing, Coin des amis de Dundee et Domaine des copains de Balmoral n’ont jamais trouvé preneurs. Après leur fermeture, elles ont dépéri et ont été envahies par les moisissures. Invendables, elles ont été démolies.
Dans les 20 dernières années, des écoles fermées ont donc été entretenues et chauffées aux frais des contribuables avant d’être détruites.
Du côté du ministère des Transports et de l’Infrastructure, un responsable des communications explique par courriel que l’objectif est de vendre les bâtiments le plus rapidement possible afin de limiter les frais d’entretien à long terme.
«Surtout pendant les mois d’hiver alors que les propriétés doivent être chauffées. Les décisions sont basées dans le meilleur intérêt des contribuables et des communautés», précise le ministère.
Lorsqu’une école ferme, le bâtiment est habituellement déclaré en surplus par le district scolaire et le ministère de l’Éducation, à moins d’une entente spéciale.
L’administration passe ensuite sous la juridiction du ministère de l’Infrastructure. Celui-ci vérifie avec les autres ministères s’il y a des besoins ou si la municipalité veut l’acheter. Si personne n’est intéressé, le ministère met la bâtisse en vente.
Selon nos données, dans les trois districts francophones, sept anciennes écoles ont été vendues et quatre sont à vendre.
Deux ont des projets avec la communauté et quatre ont un statut inconnu.
La vente d’une ancienne école ne signifie pas toujours qu’un projet va y voir le jour.
À Rivière-du-Portage, dans la Péninsule acadienne, la fermeture de l’école L’Amitié avait déchiré la communauté en 2012. Depuis, le bâtiment a perdu de son lustre et se décompose tranquillement dans le paysage.
Les vitres de l’école ont été placardées avec des panneaux de bois. Sur l’ancien terrain de jeu, des structures de métal rouillées sont encore debouts dans l’herbe trop haute.
Devant l’école, on retrouve une pancarte «À vendre», arrachée du sol et posée contre un arbre. À la porte d’entrée, une affiche a été collée sur la vitre. «Entrée interdite, propriété privée», peut-on y lire. Un numéro de téléphone dirige les curieux vers le ministère de l’Infrastructure, responsable de vendre les biens excédentaires.
Selon le ministère, l’école a été vendue en août 2014. Des résidants à proximité ne seraient pas mécontents de voir le bâtiment démoli.
«C’est laid, rien ne se passe avec ça, ils ne feront jamais rien avec ça et le gouvernement laisse ça moisir», a lancé une voisine de l’école qui ne veut pas être identifiée.
À Saint-Arthur, dans le Restigouche, l’école Rendez-vous des jeunes avait fermé ses portes en 2009. Elle a été vendue cinq ans plus tard à des investisseurs privés. Mais le bâtiment a été remis en vente et l’ancienne école est encore vide à ce jour.