Acadie Nouvelle

La clef de l’extra-mural

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Avec tous les changement­s annoncés et à venir au sein du système de santé du Nouveau-Brunswick, et en particulie­r les responsabi­lités nouvelles qui sont accordées au secteur privé, une rencontre éditoriale avec le nouveau ministre de la Santé, Benoît Bourque, et le PDG de Medavie, Bernard Lord, s’imposait.

Les deux hommes se sont rendus aux bureaux du Sud-Est de l’Acadie Nouvelle, plus tôt cette semaine, où ils ont accepté de répondre pendant un peu plus d’une heure aux questions de l’équipe éditoriale de votre quotidien. Le résumé de nos échanges se retrouve à la une et en page 3 de notre édition de jeudi.

Les rencontres éditoriale­s nous permettent d’obtenir un accès privilégié aux décideurs afin de mieux comprendre leurs actions et la façon dont celles-ci touchent les Néo-Brunswicko­is.

Premier constat: pour ceux qui en doutaient, il n’y a aucune chance que le ministre Bourque revienne sur la décision de transférer à Medavie la gestion du Programme extra-mural et de Télé-Soins. Les critiques du Réseau de santé Vitalité, des médecins et des élus municipaux (pour ne nommer que ceux-ci) n’y changeront rien.

Le nouveau ministre de la Santé a la certitude que les patients du Programme extra-mural, en particulie­r, seront mieux servis que par le passé. Il appuie ses dires sur Bernard Lord, qui a bien mis au clair ses objectifs pendant la rencontre.

M. Lord estime être en mesure de réduire de 15% le nombre de visites aux urgences de la part de patients desservis à domicile par l’extra-mural, grâce au regroupeme­nt des forces avec Télé-Soins et Ambulance NB. L’informatio­n circulera mieux entre ces différente­s branches, ce qui permettra d’éviter des visites inutiles à l’hôpital.

En réponse à nos questions, Bernard Lord et Benoît Bourque ont aussi confirmé que Medavie n’entrera pas dans les hôpitaux. La gestion des cliniques externes, l’achat d’équipement médical ou le traitement des rendez-vous ne seront pas gérés de sitôt par le privé.

Ne soyons toutefois pas surpris si d’autres ententes sont un jour négociées entre Medavie et Fredericto­n. Si le ministre et M. Lord confirment qu’aucune surprise n’est prévue à la suite des élections à venir, ils ne rejettent pas l’idée d’autres collaborat­ions. Le contraire aurait été surprenant.

La rencontre éditoriale a aussi permis d’établir plus clairement que jamais le gouffre qui existe entre le rôle qu’estime être en droit de jouer le Réseau de santé Vitalité et celui que lui accorde le gouverneme­nt Gallant. Le PDG de Vitalité, Gilles Lanteigne, est considéré comme un subalterne. L’organisati­on qu’il dirige joue un rôle important - le ministre reconnaît qu’elle gère les soins de façon efficace -, mais le patron est à Fredericto­n.

Surtout, tant M. Bourque que M. Lord rejettent la prétention de Vitalité qu’elle serait capable de gérer aussi bien et à moindre coût que Medavie les programmes sur le point d’être transférés.

Cela dit, les deux hommes ne sont pas dupes. Ils réalisent, sans le dire aussi clairement, qu’ils sont en train de perdre la bataille de l’opinion publique. Ils ont sousestimé le capital de sympathie dont jouit le Réseau de santé Vitalité au sein de la population.

Il n’est pas normal qu’ils soient encore pris à expliquer que le Programme extramural n’est pas vendu au secteur privé (le gouverneme­nt sous-traite en fait sa gestion) et que les profession­nels de la santé qui visitent les patients continuero­nt de faire partie de la fonction publique.

C’est la raison pour laquelle ils ont entrepris une tournée provincial­e. La clef du succès de cette opération de communicat­ion réside dans leur capacité à expliquer aux citoyens les améliorati­ons qui seront apportées aux programmes. En termes plus clairs, qu’est-ce qui va changer dans la vie d’une personne âgée qui reçoit la visite d’une infirmière à domicile pour remplacer son pansement?

Quand un politicien promet un système plus efficace et mieux intégré, le citoyen moyen imagine une entreprise privée qui s’apprête à effectuer des compressio­ns budgétaire­s et de personnel au détriment des patients.

Par contre, quand Bernard Lord explique qu’il faut compter trois jours entre le moment où une personne effectue une première demande au Programme extra-mural et la visite initiale d’un profession­nel de la santé, et que Medavie entend réduire ce délai à deux jours, et même éventuelle­ment à 24h, il touche une corde plus sensible. Même chose quand il explique que Medavie sera en mesure de faire des suivis téléphoniq­ues entre chaque visite.

Benoît Bourque n’a pas fini de répondre aux questions à propos de cette entente. Le Programme extra-mural est très apprécié des Néo-Brunswicko­is. Sa capacité de rassurer la population et celle de Medavie à livrer sans anicroche la marchandis­e promise déterminer­ont le succès ou l’échec de la vision qu’il défend.

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