Nigadoo: prise de bec autour de l’agrandissement d’une poissonnerie
«C’est une installation qui a sa place dans un parc industriel. Si tu fais des entrepôts, tu ne fais pas ça en plein milieu d’un village», lance Jean-Paul Arseneau.
Un entrepôt frigorifique pour poissons et fruits de mer a-t-il sa place quand il y a des maisons à moins de 100 mètres? C’est ce que remettent en question des résidents de Nigadoo, alors qu’un gros joueur économique de la région souhaite agrandir ses installations.
La Poissonnerie Arseneau, dont les activités incluent la transformation de produits marins, est établie en bordure de la rue Principale de Nigadoo depuis plus de 50 ans.
L’entreprise familiale est en expansion depuis plusieurs années et la construction d’un entrepôt frigorifique, dont la superficie pourrait être de 60 pieds par 120 pieds, est planifiée.
Le bâtiment sera un ajout de taille aux installations, ce qui inquiète certains des résidents qui demeurent à proximité de l’entreprise.
«On était correct avec les petites extensions, mais là c’est trop. Où est-ce que ça va s’arrêter?», lance Denise Roy.
L’Acadie Nouvelle a rencontré Mme Roy et six autres résidents du secteur, mardi soir. Ils vivent en face ou à côté de la poissonnerie. Ils craignent tous une augmentation du bruit, de la circulation et des odeurs.
L’affaire a aussi des airs de chicane de famille: l’homme est un des anciens propriétaires et ce sont ses neveux qui ont repris l’entreprise il y a près de dix ans.
Il n’y a pas de parc industriel à Nigadoo. Les parcs les plus proches sont à Petit-Rocher, le village voisin, à Beresford et à Bathurst.
Les résidents réclament une étude sur le bruit avant que la construction aille de l’avant. MOINS DE BRUIT, ASSURE LA POISSONNERIE
De leur côté, les dirigeants de la poissonnerie répliquent que les résidents ont mal compris le projet. En fait, disent-ils, l’entrepôt frigorifique, qui sera équipé d’un compresseur, fera moins de bruit que leur façon actuelle de procéder.
«L’été nous avons des conteneurs qui fonctionnent au gaz et qui font du bruit 24 heures sur 24. C’est justement pour éliminer le bruit qu’on veut construire l’entrepôt. On manque de place et nous sommes obligés de louer des conteneurs pour entreposer notre produit», explique le président, Martin Arseneau.
L’entrepôt servira en priorité à la poissonnerie, qui vend du poisson et des fruits de mer en gros à des distributeurs.
«On fait quatre fois plus de production qu’on en faisait il y a dix ans. On manque de place», précise Martin Arseneau.
L’homme explique la situation par l’évolution du marché. Pendant la saison haute, l’entreprise emploie 70 personnes.
La poissonnerie estime que ce sera plus simple pour le déroulement de ses activités si l’entrepôt est sur place et non pas dans un parc industriel. On juge aussi que ce sera mieux pour les fruits de mer et les poissons congelés, placés dans des boîtes.
«On veut éviter toute la pollution qu’on peut. En le sortant d’ici et en le mettant tout de suite là, il n’y a rien qui touche le produit et on a une plus grosse surveillance. C’est moins de main d’oeuvre et il y a moins de manipulation», explique Louise Roy, directrice des ressources humaines.
L’entrepôt frigorifique serait équipé d’un compresseur. L’Acadie Nouvelle a d’ailleurs pu constater à la poissonnerie qu’un compresseur est moins bruyant qu’un conteneur réfrigéré. CHANGEMENT DE ZONAGE CONTESTÉ
Le conflit entre la poissonnerie et les résidents a rebondi au conseil municipal. La poissonnerie aimerait construire son entrepôt sur un terrain vacant qu’elle a acheté à côté de ses installations, mais un changement de zonage est nécessaire.
Le conseil municipal est ouvert à ce que le terrain soit considéré comme industriel, mais il propose des restrictions qui empêcherait la construction d’un entrepôt frigorifique.
«Nous avons aussi voulu respecter les citoyens pour les questions de bruit. Comme l’entreprise ne voulait pas faire d’étude de bruit, nous avons dit que nous ne permettrions pas de bâtiments comme ça», explique le maire de Nigadoo, Charles Doucet.
Mais rien n’empêchera la poissonnerie de construire son entrepôt sur son terrain actuel. Elle envisage de le faire dans le stationnement, sur le bord de la route. Cette option déplait aux résidents comme à l’entreprise.
De son côté, le conseil municipal tente de trouver l’équilibre entre les deux camps.
«Il ne faut pas oublier que c’est une compagnie qui est là depuis plus de 50 ans. Ce n’est pas nous qui l’avons créé. On est obligé de vivre avec. Techniquement, elle n’est pas à la place où elle devrait être, mais elle est déjà là, alors il faut dealer avec ça», souligne le maire Doucet.
La prochaine étape pour le maire est de consulter leur plan d’urbanisme et de discuter avec d’autres villages. Une décision concernant le projet d’arrêté devrait être prise avant Noël.
En ce qui concerne le conflit, le maire préfère laisser les deux parties régler ça entre eux.
«J’ai consulté les maires d’autres villages avec plus d’expérience et, dans cette situation là, le village est mieux de ne pas se mettre au milieu de cette chicane. S’ils ont de quoi à régler, qu’ils le règlent entre eux», estime Charles Doucet.