Connecter avec la réalité
Avec les médias sociaux, désormais plus rien ne peut nous étonner. Entre les photos des petits monstres, je suis tombé, mardi, sur deux nouvelles diamétralement opposées.
L’une, un texte de Nicolas Steinbach, portait sur le codage et l’usage du numérique en salle de classe. L’autre, un texte de Jean Twenge, une psychologue de l’Université de San Diego, tentait de voir si les téléphones intelligents et les tablettes n’étaient pas en train de détruire la nouvelle génération.
C’est à en perdre son latin… ou plutôt son langage numérique!
En fait, comme enseignants, parents ou grands-parents, qu’est-ce qui est le mieux pour nos enfants?
La professeure Twenge rapporte une série de faits. Les adolescents âgés de 12 à 17 ans ne se souviennent pas ou peu de l’époque avant les tablettes et les téléphones intelligents. Le iPhone vient d’ailleurs de fêter ses 10 ans. Ils ont connu, pour beaucoup d’entre eux, l’internet à haute vitesse, accessible sur le bout des doigts.
Un enfant de cette génération, que l’auteure nomme iGen, peut revoir sa vie entière sur l’un des médias sociaux qu’utilisent ses parents. Il a, probablement, lui aussi, un compte sur Facebook, Instagram ou Snapchat. Enfin, il peut tout voir sur YouTube et Netflix. Il n’aura d’ailleurs pas assez d’une vie pour tout regarder ce qui l’intéresse.
Bien que tout cela soit fantastique, il y a aussi des effets négatifs qui sont préoccupants. Par exemple, les plus récentes statistiques nationales montrent qu’aux ÉtatsUnis, 56% des élèves de 8e année qui passent plus de 10 heures par semaine devant les écrans affirment être malheureux. Encore plus préoccupante est l’information suivante: en 2011, pour la première fois, chez les adolescents, il y avait plus de morts par suicide que par homicide.
Comment est-ce possible? La professeure Twenge rappelle que les personnes qui passent plus de temps devant les écrans se retrouvent plus souvent seules. C’est logique. Elle soutient l’hypothèse, pour expliquer le lien entre les écrans et la détresse psychologique, que les médias sociaux ont pour effet d’augmenter le sentiment d’abandon et de rejet.
À un âge où l’opinion de ses amis compte pour beaucoup dans l’estime de soi, l’anxiété augmente quand une photo de soi publiée n’atteint pas le nombre de «j’aime» espéré. D’autres ados éprouvent un sentiment d’exclusion lorsqu’ils voient leurs amis avoir du plaisir dans des fêtes où ils n’ont pas été invités.
Donc, les téléphones intelligents et leur utilisation ont un effet marqué sur des aspects importants de leur vie. Entre autres, ils fréquentent moins leurs amis. Ils obtiennent de plus en plus tard leur permis de conduire. Ils s’engagent plus vieux dans une relation amoureuse. Ils se sentent plus seuls. Et ils ont moins d’heures de sommeil.
De toute évidence, la technologie numérique est là pour rester. Plus que jamais, nous devons investir dans la recherche de bonnes pratiques pédagogiques pour permettre aux enfants d’apprendre à bien se servir de la technologie. Mais ces bonnes pratiques doivent également tenir compte de la santé mentale des jeunes.
La courbe d’apprentissage est énorme quand on y pense. Comme adultes, bien souvent, nous devons apprendre en même temps que nos enfants. Ça n’a sans doute jamais été aussi vrai que maintenant. Bien sûr, il y a des vertus pédagogiques à apprendre aux élèves à se servir des technologies numériques et à faire du codage pour repousser les limites de l’univers virtuel… mais il faut aussi apprendre aux enfants à décoder la réalité naturelle même si parfois, il peut être frustrant et difficile de ne pas pouvoir la contrôler!