Acadie Nouvelle

Gouverner autrement par la privatisat­ion?

- Jeanne Renault Moncton

Notre gouverneme­nt provincial est disposé à confier la gestion des soins extramurau­x à Medavie et son PDG, Bernard Lord, en nous disant, mais sans l’expliquer, qu’un tel mode de gestion «privée» aura des vertus supérieure­s à celles d’une gestion publique.

En guise de réponses aux questions de plus en plus nombreuses que lui adressent les citoyens, le ministre Bourque répète qu’il ne peut nous «dévoiler» les conditions du contrat avant qu’il ne soit signé, nous enjoignant ainsi de le croire sur parole. Une fois signé, dit-il, vous pourrez voir le contrat. En disant cela, le ministre ajoute l’insulte à l’injure.

Non, Benoit Bourque, nous ne pouvons vous croire sur parole. L’exercice de la citoyennet­é n’est pas un acte de foi, mais repose sur une responsabi­lité avisée. Le contrat qui lie Medavie et le gouverneme­nt provincial pendant une période de 10 ans vaudra à Medavie la somme de 4 millions $. Ce contrat pourra être annulé; la somme pourrait être modifiée si les objectifs ne sont pas atteints. Mais quels sont les termes exacts du contrat? Quels sont les critères à partir desquels le montant de 4 millions $ a été fixé? Comment sera évaluée la qualité de la gestion offerte par Medavie? Le mystère reste entier.

Et les citoyens sont mécontents! Ils ont encore présent à l’esprit un très mauvais souvenir, celui de la presque-vente, par le gouverneme­nt de Shawn Graham d’Énergie NB à Hydro-Québec. Ce mode de gouverner et de décider dans la non-transparen­ce serait-il devenu une coutume dans notre province?

Que se passe-t-il, monsieur le premier ministre, vous qui promettiez, durant votre campagne, d’avoir le souci et la volonté de gouverner autrement? Dans le cas qui nous préoccupe aujourd’hui, nous voyons une ressemblan­ce troublante entre la méthode de Shawn Graham et la vôtre. Et les libéraux se souviennen­t sûrement du destin politique de M. Graham. Une chose est sûre et il faut en tenir compte: les citoyens d’aujourd’hui sont de plus en plus instruits. Ils veulent savoir ce qui les concerne. Ils ont la capacité de juger ce qui est le mieux pour eux, surtout lorsqu’il s’agit de grands enjeux collectifs.

Nous savons certes qu’il est sans doute plus facile de gouverner lorsque les citoyens se contentent de s’amuser et de se distraire. Ah! si tous les jours de l’année pouvaient être des 15 août, si les tintamarre­s pouvaient retentir dans tous les hameaux à longueur d’année, cela occuperait totalement les esprits des citoyens. Les gouverneme­nts pourraient alors gouverner en paix. Mais la réalité est autre et les citoyens veulent savoir, non seulement parce qu’ils sont de bons payeurs de taxes et d’impôts, mais parce qu’ils ont à coeur de contribuer à rendre leur province plus juste, plus prospère et plus équitable.

Et voilà qu’une situation déjà problémati­que s’alourdit davantage par la confusion des propos de la direction du CCBN. En effet, la semaine du 6 novembre, nous a donné l’occasion d’assister gratuiteme­nt à une oeuvre surréalist­e, mise en scène par on ne sait pas encore exactement qui. L’Associatio­n des aînés et aînées francophon­es du N.-B. offre dans plusieurs villes de la province des séances d’informatio­n sur les enjeux de l’éventuel transfert de certains soins de santé à Medavie. Une séance d’informatio­n est donc prévue au CCNB de Dieppe le 7 novembre, dans un espace loué depuis le 17 octobre. Or, 36 heures avant la tenue de l’événement, la réservatio­n est annulée au motif que le CCNB se dit être un organisme gouverneme­ntal et à ce titre, il ne peut permettre que dans ses lieux soient organisées des activités qui iraient à l’encontre des politiques gouverneme­ntales. Un contrat de privatisat­ion est-il une politique gouverneme­ntale? Les dirigeants du CCNB auraient-ils oublié qu’en 2010, l’Assemblée législativ­e du N.-B. créait deux collèges autonomes sous forme de société, en ajoutant que le collège communauta­ire est une société pleinement autonome? Le CCNB aurait-il oublié qu’en septembre 2013, ses portes étaient ouvertes aux fonctionna­ires de la province qui refusaient les changement­s que le gouverneme­nt voulait apporter à leur pension? Le CCNB serait-il redevenu un organisme gouverneme­ntal, sans que nous ne le sachions? Ni le CCNB, ni le gouverneme­nt ne sont transparen­ts dans cette affaire. Ce que l’on sait toutefois, c’est que les employés ont le dos large. L’employé qui a loué l’espace au CCNB aurait mal interprété la politique de location des espaces. Il y a eu tellement de revirement­s dans cette affaire, qu’aucun citoyen avisé n’accepterai­t les versions officielle­s qui se contredise­nt. En fait, cela rappelle une autre histoire récente, où les employés ont encore été blâmés. Il s’agit du dossier de l’augmentati­on des impôts fonciers. Décidément, l’automne 2017 n’aura pas été tendre à l’endroit des fonctionna­ires et des employés au NouveauBru­nswick.

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