PLONGEON DANS LA RÉALITÉ VIRTUELLE
Avec la vidéo en réalité virtuelle 360, chaque film est différent selon la personne qui le regarde. Plusieurs cinéphiles ont goûté à cette forme de cinéma immersif au FICFA qui a offert une sélection de quatre créations diverses, dont celles de Francine Hébert et Paul Arseneau.
Contrairement au cinéma traditionnel présenté en salle, la vidéo 360 se regarde seul, à l’aide d’un casque de visionnement. Le spectateur plonge ainsi dans une réalité virtuelle et compose en quelque sorte sa propre histoire et mise en scène. Daniel Chiasson, qui a assisté à la projection de mercredi au Festival international du cinéma francophone en Acadie, a été complètement absorbé par l’expérience.
«Nous avons le choix de l’image qu’on veut regarder dans toute la sphère qui est disponible. On peut regarder à terre, sur le côté, dans le ciel. On choisit l’image et on peut s’en départir quand on veut et revenir aussi vite. Ça nous donne une sensation de liberté contrairement au vidéo traditionnel qui nous cadre dans une image seulement. J’aurais pu continuer l’expérience sur une période plus longue», a exprimé Daniel Chiasson.
Celui-ci venait de visionner le court métrage de Paul Arseneau qui propose une visite dans une boucanière de la région de Cap-Pelé. Paul Arseneau, qui oeuvre dans le milieu du cinéma depuis une trentaine d’années, a eu envie de participer à cet atelier de trois jours offert par l’ONF afin de pousser sa créativité dans une forme de travail qu’il n’avait jamais touchée. Son projet et celui de Francine Hébert ont été sélectionnés parmi les huit propositions soumises à l’ONF. Les deux projets sont très différents.
Francine Hébert propose un voyage poétique, tandis que Paul Arseneau arrive avec une approche plus documentaire. M. Arseneau emmène le public dans une usine de transformation de hareng par le truchement de la réalité virtuelle. On se retrouve carrément dans l’usine entouré des employés et même du réalisateur qui explique son projet. Parallèlement à cette visite, on fait la rencontre de l’artiste Julie Caissie et sa mère qui vivent près de la boucanière. Le réalisateur fournit une vision panoramique de son environnement, grâce à la caméra sphérique.
«Lorsqu’on imagine une histoire pour le cinéma ou la télévision, on a tendance à l’imaginer devant soi parce qu’on est devant un écran, alors que là il fallait regarder en haut, à côté, à gauche, derrière, pour penser à des actions. C’est vraiment tout autour de soi visuellement et acoustiquement», a raconté le cinéaste qui qualifie son travail d’exercice exploratoire.
Le court métrage d’André Roy a été le premier film de l’ONF tourné en vidéo 360 en Acadie. Francine Hébert estime que certains sujets se prêtent mieux au cinéma immersif. À son avis,
en est un bel exemple. Issue de tradition documentaire, la réalisatrice touchait pour la première fois à cette forme de cinéma. Elle propose une réalisation inspirée de ses préoccupations environnementales tout en explorant un cinéma plus expérimental. Son film invite le public à s’immerger dans l’espace. Pour reconstituer cet univers, elle a plongé une caméra 360 dans le fond d’un aquarium dans lequel elle a laissé tomber des objets scintillants. Le spectateur se sent un peu comme s’il était dans l’espace entouré de planètes et d’étoiles.
«Ç’a été une improvisation parce que ce matin avant d’aller en montage, j’ai passé en entrevue ma fille de 9 ans et mon fils de 4 ans pour avoir le contexte narratif du film. On s’est complètement éloigné du documentaire que je fais habituellement. C’est une exploration de la forme.»
Outils de pédagogie, de création, de méditation ou encore de plaisir, le cinéma immersif a sa place, estiment Paul Arseneau et Francine Hébert. L’ONF prévoit qu’environ 20% de sa production sera réalisée en format 360, a appris Francine Hébert. Selon les deux réalisateurs, cette forme ne remplacera pas le cinéma traditionnel. La cinéaste souligne que la communion avec le public dans une salle de cinéma demeure essentielle. Le cinéma 360 n’est pas pour tout le monde puisque certaines personnes peuvent être affectées par le vertige pendant le visionnement. Paul Arseneau considère qu’après 10 minutes de visionnement, on veut passer à autre chose.
«J’espère que le cinéma traditionnel ne disparaîtra pas parce qu’on a besoin de voir un film en public. Pendant le festival, on vit beaucoup d’expériences collectives et je vois ça comme une forme de partage», a commenté le réalisateur.