Acadie Nouvelle

Donner de la valeur au bonheur et à la paix de l’âme

Il y a des sujets dont on ne parle pas… ou peu… ou avec beaucoup de difficulté­s. La mort fait partie de ces sujets. Le suicide est un sujet dont on parle encore moins tellement il est contre nature. Il y a des sujets dont on ne parle pas… ou peu… ou avec

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À la fin des années 1990, l’école Mathieu-Martin et toute la communauté de Dieppe et du Grand Moncton vivaient sans doute les moments les plus difficiles de leur histoire. Il y a les suicides d’adolescent­s, mais il y a aussi, forcément, une sorte d’ombre qui plane partout autour. Quand une personne en vient à la conclusion que se donner la mort constitue une solution, c’est que vivre fait affreuseme­nt mal.

La mort qu’une jeune personne se donne à elle-même est peut-être l’acte le plus incompréhe­nsible qu’elle puisse faire. L’avenir lui appartient. Pourquoi veut-elle y renoncer?

La mort, dans ce cas, est comme un trou noir qui aspire toute la lumière. La mort, dans ce cas, laisse un vide. La vie a horreur du vide. L’humain a horreur du vide.

Samara Grace Chadwick, ancienne élève de l’école Mathieu-Martin, a eu une sorte d’appel à revisiter ses souvenirs et ceux des autres élèves qui allaient à cette école à la fin des années 1990. Lundi, au théâtre Capitol, elle a présenté le film-documentai­re qu’elle a réalisé, 1999. Ce faisant, elle semble avoir comblé une partie de ce vide. Elle a donné une voix, non seulement aux personnes qui sont toujours là, mais aussi à celles qui sont parties.

Que peuvent bien dire toutes ces voix? Je ne le sais pas plus que vous. J’observe cependant qu’elles brisent l’isolement. J’observe qu’elles donnent beaucoup de sens à la vie du simple fait qu’elles s’expriment. J’observe aussi que l’être humain a bien du mal à trouver un sens à sa vie lorsqu’il est isolé, lorsqu’il se renferme sur lui-même tel un trou noir.

Quand la vie ne peut pas s’exprimer, c’est l’asphyxie, la souffrance et la douleur. Y a-t-il seulement quelque chose de plus pénible qu’être incapable de mettre en mots sa souffrance? Y a-t-il seulement quelque chose qui soulage plus que lorsqu’une personne nous aide à nommer notre douleur?

Comme si le fait de savoir qu’on n’est pas seul, comme si le fait d’être compris, comme si l’empathie à elle seule enlevait un lourd poids sur les épaules… comme si l’empathie donnait sens à la vie.

Dieu merci, cette vague de suicides s’est arrêtée. Elle a toutefois laissé des familles et des proches dans le vide, l’isolement et la souffrance. Nous pansons les plaies que laisse chaque suicide. Parfois, elles ne guérissent pas complèteme­nt.

Mais, malgré la douleur, il faut s’ouvrir et témoigner de ce qu’on vit. Parce que parler de souffrance, c’est commencer à s’en distancier. Parler de souffrance, c’est donner de la valeur au bonheur et à la paix de l’âme.

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