Les provinces envisagent une circulation plus libre de l’alcool
Pourra-t-on un jour commander du vin de la Colombie-Britannique en ligne ou traverser les frontières avec une importante cargaison de bière? Les ministres du Commerce ne semblent pas fermés à la possibilité. Simon Delattre
Les ministres du Commerce des provinces, des territoires et d’Ottawa étaient réunis vendredi à Dieppe pour faire le point sur l’Accord de libre-échange canadien. En vigueur depuis juillet, cette entente majeure a pour but d’éliminer les barrières commerciales entre provinces.
Le commerce de l’alcool a été exclu de cet accord, mais un groupe de travail sur les boissons alcoolisées doit remettre des recommandations d’ici juillet 2018. Aucune action concrète n’est ressortie des discussions de vendredi, mais les ministres ont appelé à plus de libre-échange dans ce secteur.
Selon Roger Melanson, ministre responsable du commerce, les provinces considèrent la possibilité de réduire les limites à l’importation d’alcool interprovinciale.
«Le comité examine si c’est possible de restreindre les limitations d’alcool que nous achetons dans une autre province pour amener chez nous, dit-il. Les consommateurs veulent avoir accès à plus de biens et de services et les entreprises veulent avoir accès à plus de marchés et d’opportunités.»
Au Nouveau-Brunswick, une loi de 1928 limite la quantité d’alcool qui peut être importée au Nouveau-Brunswick à une seule bouteille de vin ou de spiritueux, ou à 18 bouteilles de bière.
Ces restrictions sont au coeur de l’affaire Gérard Comeau. La Cour suprême du Canada devra se pencher sur la constitutionnalité de la loi provinciale le mois prochain.
«La décision aura probablement un impact sur la situation, mais je ne peux pas en dire plus», commente le ministre Melanson.
Lors de la rencontre, les ministres se sont également penchés sur les façons de permettre l’achat d’alcool en ligne d’un bout à l’autre du Canada.
«Nous savons que dans le monde d’aujourd’hui, les gens se procurent des biens et des services sur internet, souligne Roger Melanson. Le comité a étudié comment nous pouvons aller vers le cybercommerce et faciliter l’accès au marché pour la communauté d’affaires.»
Le gouvernement ontarien a proposé la création d’une plateforme en ligne qui permettrait un accès complet aux produits de partout au pays.
Actuellement, chaque province a son système de taxation et des frais s’imposent aux producteurs qui désirent se lancer dans d’autres juridictions.
«Le défi est que ces taxes rendent les produits moins compétitifs. C’est compliqué parce que ça implique des revenus pour les provinces et les territoires. On en discute, mais on ne peut pas garantir qu’on arrivera avec une solution», admet Brad Duguid.
«Nous avons fait plus de progrès que jamais auparavant sur ces questions. Nous avons l’opportunité de ne pas faire les mêmes erreurs que les Pères de la Confédération ont pu faire», ajoute-t-il.
Certains gouvernements restent réticents à l’idée de fragiliser un monopole de vente qui rapporte plusieurs millions de dollars chaque année.
Lors du procès de Gérard Comeau en Cour provinciale, un haut dirigeant d’Alcool Nouveau-Brunswick avait expliqué que l’abolition des limites à l’importation d’alcool entraînerait des conséquences dévastatrices sur les revenus de la société de la Couronne.
Roger Melanson explique que des études sont en cours pour évaluer les conséquences d’une réduction des barrières actuelles sur les finances de la province.
«Tous les provinces et territoires ont besoin des revenus générés par les ventes d’alcool, on ne le cache pas. Ceci dit, on veut aussi voir un meilleur accès et plus de libre échange entre les provinces. Il faut voir si on peut trouver un équilibre.»
«Nous allons encourager les juridictions à avoir un regard ouvert là-dessus, note le ministre du Développement économique de l’Ontario, Brad Duguid. L’accès en ligne est la façon la plus facile de s’assurer que les consommateurs puissent obtenir le produit de n’importe quelle province.»