La robotisation est en marche dans le monde des pêches
La révolution des robots a commencé dans les usines de transformation. Les entreprises s’équipent déjà de machines capables de déplacer des cartons, de trier les huîtres ou de découper des crabes.
Un robot appelé Igloo a fait son apparition dans l’usine des Pêcheries Belle Île, sur l’île Lamèque. La machine prend la forme d’un bras articulé capable d’entreposer les stocks de crabes transformés.
Elle saisit les boîtes pour les placer sur des palettes dans une pièce réfrigérée. Ses capteurs lui permettent de s’adapter à la taille des cartons.
Il s’agit du premier robot commercialisé pour les besoins des usines de transformation de fruits de mer. Cube Automation, une entreprise de Tracadie, a développé ce qu’elle présente comme une solution à la pénurie de main-d’oeuvre dans le secteur.
L’investissement ravit Yoland Chiasson, directeur des finances et de la qualité des Pêcheries Belle Île.
«Le robot est exact, il ne fait pas d’erreur, alors qu’un être humain peut mettre la boîte au mauvais endroit après 12 heures de travail.»
Deux techniciens suffisent désormais à superviser une tâche qui mobilisait jusque-là six personnes. Le robot exécute un travail qui était dur et usant pour les employés, poursuit M. Chiasson.
«Ce sont des tâches exigeantes physiquement. Ce n’est pas évident de trouver des personnes pour ça. Un robot peut soulever des boîtes pendant 12 heures. Il y a aussi tout l’aspect santé et sécurité, ça nous permet de réduire les risques de blessure.»
La direction de l’usine envisage d’automatiser davantage de tâches pénibles et répétitives au cours des prochaines années.
«Il pourrait y avoir des robots impliqués dans l’emballage, la mise en boîte et même la transformation du poisson.»
Ce n’est pas le seul transformateur pour lequel travaille Cube Automation. Certaines usines pourraient bénéficier du nouveau Fonds des pêches de l’Atlantique, qui prévoit 400 millions $ sur sept ans pour le développement de nouvelles technologies dans les secteurs de la pêche, de l’aquaculture et de la transformation.
Roch Chiasson, directeur des ventes de l’entreprise de Tracadie, croit que le recours aux robots va se généraliser dans l’industrie dans la prochaine décennie.
«Il y a encore quelques années, il y avait plein de brevets sur les robots. Quelques géants comme GM ou ABB avaient la mainmise sur l’industrie. Aujourd’hui, on a plus de robots spécialisés développés par des petites entreprises, c’est devenu plus accessible.»
Les outils de programmation se sont simplifiés et le prix de la technologie a chuté considérablement. Selon Roch Chiasson, l’industrie de la transformation y trouve un moyen de répondre à une réglementation toujours plus sévère.
«Les nouvelles normes de santé et de sécurité au travail font en sorte que soulever des boîtes pesantes au-dessus des épaules devient de moins en moins permis. Il y a aussi des nouvelles normes de sécurité alimentaire qui font que les produits doivent être mis dans les congélateurs rapidement. Les usines à poisson ressemblent de plus en plus à des salles d’opération.»
Le robot développé par l’entreprise de Tracadie a aussi l’avantage d’assurer la traçabilité des produits et d’alléger la paperasse.
«La bureaucratie qui vient avec les normes de sécurité alimentaire est une lourdeur pour les manufacturiers. Il faut noter de quel pêcheur vient le produit, les températures de cuisson, dans quelle boîte, où c’est envoyé... Notre robot réduit l’ouvrage de 70%.»
D’autres industries s’apprêtent à faire le pas de l’automatisation. La Maison Beausoleil de Néguac se prépare à lancer une unité robotique destinée au tri des huîtres.
Le projet devrait se concrétiser à la fin mars, précise le directeur général Amédée Savoie.
«Les robots vont sélectionner les huîtres par longueur et par grosseur puis les mettre en boîte. On va toujours avoir besoin de monde, mais du monde mieux payé et mieux formé», explique l’ostréiculteur.
La demande d’huîtres du Nouveau Brunswick, prisées par les consommateurs chinois, ne cesse d’augmenter. Le personnel peine à répondre à la charge de travail lors de la saison automnale.
«On a beaucoup de demandes. Parfois ,on ne peut pas performer alors que les employés donnent leur maximum. Les employés sont de plus en plus rares et ça prend de la technologie. Si l’industrie ne fait rien, on va avoir des problèmes d’ici 10 ans», lance Amédée Savoie.