L’U de M a besoin d’une perle rare
Aussitôt que sera confirmée l’embauche de Raymond Théberge à titre de commissaire aux langues officielles du Canada, l’Université de Moncton se mettra en chasse afin de trouver un nouveau recteur. Elle devra tout mettre en oeuvre pour embaucher le meilleur candidat (ou la meilleure candidate) possible. Une évidence, dites-vous? Pas au pays de l’U de M.
À défaut de soulever l’enthousiasme, Raymond Théberge a tout de même obtenu la bénédiction du sénat ainsi que celle du comité permanent des langues officielles. Ne reste plus qu’à entériner sa nomination par la Chambre des communes. M. Théberge étant le choix des libéraux et ceux-ci étant majoritaires, nous parlons ici d’une formalité. Le tout devrait être réglé d’ici la fin de l’année.
S’enclenchera alors un long processus à l’Université de Moncton afin de trouver un successeur à M. Théberge. Il débutera à une date encore indéterminée. Cela se fera probablement dans les premiers mois de 2018, quand le Conseil des gouverneurs mettra en place un comité de sélection qui aura pour responsabilités d’annoncer le poste, d’étudier les candidatures, de réaliser les entretiens puis de soumettre ses recommandations au conseil. Des consultations seront également menées au sein de la communauté universitaire.
Nous espérons que l’Université de Moncton gérera la suite des événements avec plus de sérieux que la dernière fois.
N’ayons pas peur des mots. L’U de M s’est ridiculisée dans sa façon de gérer la succession d’Yvon Fontaine.
En janvier 2012, elle avait confirmé que Raymond Théberge et Marie-Josée Berger étaient les deux finalistes au poste de recteur. Il n’avait fallu à l’Acadie Nouvelle que quelques heures après l’annonce pour découvrir que Mme Berger était une figure controversée à l’Université d’Ottawa (où elle était doyenne). Les étudiants l’avaient qualifiée de piètre administratrice et l’accusaient d’avoir une attitude impitoyable à leur égard.
Le comité de sélection n’avait pas fait ses devoirs, ou encore avait sous-estimé l’impact qu’auraient ces révélations. Résultat, Raymond Théberge s’est imposé par défaut.
Par la suite, nous avons appris qu’une firme de «chasseurs de tête» embauchée par le comité de sélection avait aussi approché l’ancien ministre et ombudsman Bernard Richard.
Or, sa candidature a été rejetée, au motif de son manque d’expérience en milieu universitaire, mais dans ce qui avait les apparences d’un règlement de comptes. Des libéraux au sein du conseil d’administration de l’U de M ne voyaient semble-t-il pas M. Richard dans leur soupe depuis 2003, année où il a quitté la politique active pour accepter de devenir ombudsman à l’invitation du gouvernement progressiste-conservateur de Bernard Lord.
C’est ainsi que pour une question technique ou pour des motifs politiques (dépendant qui vous croyez), une excellente candidature a été écartée au profit de deux autres en provenance de l’Ontario qui n’avaient rien d’exceptionnelles.
L’année précédente (2011), l’Université de Moncton avait (encore) fait parler d’elle pour les mauvaises raisons, lors de la création d’un poste de vice-recteur. Un comité consultatif a évalué trois candidats et a recommandé à forte majorité l’embauche d’Yvon Dandurand, vice-recteur associé à la recherche et aux études supérieures à l’Université Fraser Valley, en ColombieBritannique.
La décision avait été infirmée par un Comité d’équité en matière d’emploi, à l’initiative du recteur Yvon Fontaine.
Toutes ces histoires ont nui à la réputation de l’Université de Moncton en lui donnant la réputation d’être un lieu où la petite politique et le grenouillage sont monnaie courante.
On peut aussi supposer que des personnes de qualité ont, au cours des dernières années, choisi de passer leur tour plutôt que d’envisager de mettre leur expertise au service de l’établissement de haut savoir acadien.
L’Université de Moncton ne doit pas répéter de tels fiascos.
Elle doit redoubler d’efforts pour non seulement choisir un recteur de qualité, mais aussi augmenter son bassin de candidatures d’exception en démontrant que les choses ont changé pour de bon à l’édifice Taillon.
Comme l’a bien expliqué le chef de bureau aux affaires publiques Pascal RaicheNogue, dans sa chronique dans l’Acadie Nouvelle la semaine dernière, notre université est à la croisée des chemins. La façon dont elle saura faire face à la dénatalisation et au déclin du nombre d’étudiants internationaux sera déterminante pour son avenir.
Si on se fie à la plus récente annonce de l’institution, sa réponse pourrait consister à augmenter de façon importante ses droits de scolarité. Pas exactement une vision d’avenir.
L’Université de Moncton a besoin d’une perle rare pour diriger sa destinée. Elle ne peut pas se permettre de rater son coup.