Cour suprême: la juge en chef sortante fait son bilan
Arrêt sur l’aide médicale à mourir, bilinguisme des juges de la Cour suprême du Canada, querelle avec Stephen Harper, réalisations: la juge en chef Beverley McLachlin a abordé une foule de sujets lors de sa conférence de presse d’adieu, vendredi, à Ottawa.
La magistrate l’a fait avec la réserve inhérente à sa fonction, pendant un peu plus de 30 minutes, bien qu’à la toute fin, lorsqu’on l’a questionnée sur la façon dont on a interprété l’arrêt Carter sur l’aide à mourir, elle a offert une courte réponse - et un court sourire - qui en disaient long.
Voici un survol de ce que la juge en chef sortante du plus haut tribunal au pays avait à dire à son premier jour comme retraitée.
En février 2015, plus de 20 ans après avoir maintenu le caractère illégal du suicide assisté dans la cause de Sue Rodriguez, la Cour revenait sur sa décision en invalidant, dans l’arrêt Carter, les articles du Code criminel interdisant à un médecin d’aider un patient gravement malade à mourir.
Déjà, en 1993, dans l’arrêt Rodriguez, la juge McLachlin avait affiché ses couleurs. Elle avait inscrit une dissidence. Plus de deux décennies plus tard, elle était juge en chef d’une Cour qui a produit un arrêt unanime.
«J’avais le même point de vue avec Rodriguez et Carter. (...) Moi, j’ai toujours été d’avis que les gens devaient, selon la loi du Canada, avoir la capacité, dans certaines circonstances, de choisir de mourir», a-t-elle expliqué.
«Ce qui a changé, c’est la preuve sociale. (...) La société a changé, nous avons eu de la preuve plus complète sur le sujet, et ça a été important dans le changement de position», a exposé la juge en chef sortante.
Elle a offert deux mystérieuses réponses à ce même sujet quand, à la fin de la conférence de presse, on lui a demandé si les politiciens avaient bien compris l’arrêt Carter - la loi fédérale est considérée par plusieurs spécialistes comme plus restrictive que la décision.
«Je suis certaine que les gens qui l’ont lu ont compris», a-t-elle offert avec un sourire.
Est-ce à dire que certains ne l’ont donc pas lu?
«Pas de commentaire», a-t-elle lâché avant de tirer sa révérence.
Il y a quelques jours, le comité permanent des langues officielles a produit un rapport unanime recommandant d’enchâsser dans une loi l’obligation du bilinguisme pour les juges du plus haut tribunal au pays.
Qu’en pense la magistrate de la ColombieBritannique, qui maîtrise elle-même l’anglais et le français? «C’est au gouvernement, selon la Constitution, pas à moi, de déterminer les critères pour les juges», a-t-elle tenu à spécifier au départ.
«Mais je peux dire que de plus en plus, on a des juges bilingues à la Cour, et je pense que c’est important d’avoir des juges bilingues. Est-ce que la Cour peut fonctionner avec un, deux, trois juges qui ne sont pas bilingues? Oui. L’histoire (l’)a prouvé», a souligné la juge.
«Mais idéalement, il faut avoir un haut niveau de bilinguisme sur le banc», a-t-elle ajouté.