Acadie Nouvelle

Papier journal: une autre pomme de discorde avec les États-Unis

On parle beaucoup du différend canado-américain sur le bois d'oeuvre, mais un autre litige commercial risque de frapper durement l'industrie des produits forestiers en 2018.

- Mia Rabson

Après le bois d'oeuvre et le papier surcalandr­é, c'est au tour du papier journal de faire l'objet d'une enquête du départemen­t américain du Commerce, qui devrait décider en mars si le Canada fait du dumping. Le gouverneme­nt américain a amorcé en août une enquête à la suite d'une plainte de la North Pacific Paper.

L'entreprise de l'État de Washington reprend les mêmes arguments avancés dans le dossier du bois d'oeuvre: les papeteries canadienne­s feraient du dumping en vendant aux États-Unis le papier journal à un prix inférieur à la valeur du marché, et Ottawa subvention­nerait de façon déloyale son industrie forestière. Le départemen­t américain du Commerce a imposé des droits compensato­ires et antidumpin­g sur une bonne partie des importatio­ns de bois d'oeuvre canadien et sur le papier surcalandr­é.

«Les gens en parlent moins que le bois d'oeuvre, mais dans l'industrie, on craint que ce dossier soit plus dommageabl­e encore», explique Derek Nighbor, directeur de l'Associatio­n des produits forestiers du Canada.

L'imposition de droits compensato­ires toucherait environ 25 scieries au Canada, la plupart situées au Québec et en Ontario. Le Canada est le plus important exportateu­r de papier journal dans le monde, un marché canadien dominé par la montréalai­se Résolu Produits forestiers. Selon le départemen­t américain du Commerce, les Canadiens ont exporté aux États-Unis pour environ 1,6 milliard $ de papier journal en 2016.

LA NOTE AUX CONSOMMATE­URS

Même si M. Nighbor est convaincu que le papier journal a un bel avenir devant lui pour encore plusieurs années, il rappelle qu'avec l'essor des médias numériques, les ventes diminuent d'environ 10% chaque année. Il soutient par ailleurs que plus d'un millier de petits et moyens journaux aux États-Unis ont demandé à Washington de ne pas imposer de droits compensato­ires, parce qu'ils ne pourraient pas assumer une hausse des coûts du papier.

M. Nighbor et l'Associatio­n américaine des constructe­urs d'habitation­s soulignent qu'au bout du compte, ce sont les consommate­urs qui subissent les effets de ces droits compensato­ires. Les prix des maisons et des matériaux de constructi­on pour remettre sur pied la Floride et le Texas après le passage des ouragans Irma et Harvey, l'an dernier, ont ainsi grimpé.

La faible valeur du dollar canadien et la forte demande de bois d'oeuvre aux ÉtatsUnis ont aidé les producteur­s canadiens à surmonter les effets de ces droits compensato­ires. Ainsi, M. Nighbor ne croit pas que des scieries ont mis à pied des travailleu­rs jusqu'ici. «Nous sommes en meilleure posture que ce que nous avions craint (...) mais ça demeure préoccupan­t pour 2018. Il ne faudrait pas que le litige s'enlise encore trois ou quatre ans et que le marché ralentisse.»

M. Nighbor soutient par ailleurs que la scierie américaine de la côte Ouest qui a porté plainte ne bénéficier­ait probableme­nt même pas d'une baisse des importatio­ns de bois d'oeuvre canadien, qui sont surtout destinées aux États de l'est et du Midwest. «C'est juste pour nous enquiquine­r», croit-il.

Ottawa et Washington tentent toujours de renégocier l'accord commercial sur le bois d'oeuvre pour remplacer une entente qui a expiré en 2015. Le Canada conteste aussi les droits compensato­ires américains sur le bois d'oeuvre en vertu de l'Accord de libre-échange nord-américain et devant l'Organisati­on mondiale du commerce.

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