Acadie Nouvelle

LE PEINTRE DES BOXEURS

- robert.lagace@acadienouv­elle.com @RobLagace

Quand tu as goûté une fois ce qu’est de boxer, c’est-à-dire de quitter fébrilemen­t un vestiaire avec gants matelassés, bottines et maillot pour se diriger vers un ring en compagnie de ton équipe de coin, où t’attend impatiemme­nt un public qui va t’encourager ou te huer, dépendant dans quelle ville où tu te trouves, et que tu donnes ou encaisses des directs, crochets et uppercuts pendant ne serait-ce que quatre rondes, ce n’est que là que tu comprends que boxeur ou boxeuse tu resteras jusqu’à la fin de tes jours.

Yvon Richard a vécu tout ça à la fin des années 1960 et au début de la décennie suivante. Il a foulé quelques rings du NouveauBru­nswick, de même que d’autres en Ontario et à New York.

Son fait d’arme demeure cependant la conquête des Gants Dorés en 1967, sous la gouverne de son oncle Gerry Doiron Sr. Il n’était alors âgé que de 17 ans.

Et même s’il s’en est séparé en 1971 - bien qu’il soit devenu arbitre quelques années plus tard -, il considère toujours la boxe comme sa première passion.C’est aussi à l’adolescenc­e qu’il a découvert les arts visuels, sa deuxième passion.

Avec le temps, comme quoi on peut sortir une personne de la boxe, mais pas sortir la boxe d’une personne, ses deux passions ont régulièrem­ent bifurqué dans le même chemin.

Si bien que par la force des choses, il est devenu en quelque sorte le peintre des boxeurs. Jacques LeBlanc, Tilmon «Tilly» LeBlanc, Paul Doiron, Émile Arsenault et Annie Mazerolle sont parmi la douzaine de pugilistes qui ont été immortalis­és en peinture par Yvon Richard.

«Au départ, c’était surtout l’abstrait qui m’intéressai­t. Mais j’ai fini par accepter de faire des portraits. J’ai vite découvert que j’aimais peindre sur mon sport favori. J’aime le réalisme que je peux apporter dans les scènes de boxe. Et puis, ça me permet en même de temps de replonger dans mon propre passé de boxeur», confie l’artiste originaire de Rogersvill­e.

Yvon Richard est particuliè­rement fier du tableau mettant en vedette Jacques LeBlanc, l’enfant chéri de Memramcook dont le surnom était chin of steel (mention d’acier) et qui a été intronisé au Temple de la renommée sportive du Nouveau-Brunswick en 2012. Il a entre autres livré des matchs de 12 rondes contre les anciens champions du monde Roberto Duran et Vinny Pazienza.

«J’ai toujours aimé Jacques comme boxeur. À mes yeux, il était un naturel. Il avait tout un menton. Sa grande qualité c’est qu’il pouvait voir un coup venir de tous les angles. J’ai toujours dit que s’il avait pu avoir un knockout punch, Jacques serait devenu champion du monde. J’en suis encore convaincu», dit-il.

L’artiste avait d’ailleurs une belle anecdote à raconter au sujet de l’ex-champion canadien des poids moyens.

«En 1989, Jacques était engagé dans une grosse rivalité avec Darrell Pee-Wee Flint. Ils sont même affrontés deux fois cette année-là. J’ai alors eu l’idée de faire une peinture de Jacques et une fois terminée, un ami m’a dit que ce serait une bonne idée d’aller la vendre dans le coin de Memramcook. Il m’a alors conseillé d’aller voir le propriétai­re de la taverne qui était un grand amateur de boxe», raconte-t-il.

«J’y suis allé et le gars était très intéressé. Malheureus­ement, il n’était pas prêt à payer le prix que je voulais. En sortant de la taverne, j’ai eu l’idée de demander à quelqu’un où habitait la famille de Jacques. Je m’y suis rendu et j’ai frappé à la porte. Une fois à l’intérieur, j’ai dit à Madame (Maria) LeBlanc que j’avais quelque chose à lui montrer. J’ai alors sorti la peinture et elle l’a regardé en silence. Puis, elle a levé les yeux pour me dire: «Ça, ça ne sort pas d’icitte!». Elle a ensuite appelé son autre fils (Richard) qui était dans le sous-sol. Il a lui aussi adoré mon travail. La toile n’est finalement jamais sortie de la maison», affirme Yvon Richard en riant.

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Émile Arsenault fait partie des boxeurs qui ont eu droit à une peinture d’Yvon Richard. - Gracieuset­é
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Annie Mazerolle a eu l’honneur de devenir la première boxeuse à se faire immortalis­er en peinture par Yvon Richard. - Gracieuset­é
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