Il est grand le mystère du temps
Après le temps de Noël, voici le temps ordinaire qui commence. Ce temps nous est donné pour écrire notre vie. Pour l’écrire avec le maître du temps et de l’histoire. Nous sommes un crayon entre les mains du Créateur qui écrit avec nous l’histoire de notre
Pour réfléchir sur le temps, j’aime ouvrir les livres de Jean d’Ormesson. Il fait partie des grands disparus de 2017. Il est parti à la fin de l’année dernière – ça semble déjà une éternité! Lors de l’hommage national à d’Ormesson, le président Macron a d’ailleurs déposé sur son cercueil un simple crayon… pour dire que sa vie a été au service de l’écriture.
D’Ormesson fait partie de ces intellectuels français que la France aime autant chérir que détester! Elle s’enorgueillit de leur présence, mais se révolte de leur rappel à l’ordre.
Appartenant à la bourgeoisie française, il a passé son enfance au château familial et dans les pays où son père a travaillé comme ambassadeur. Après ses études, il se lance dans l’écriture. Son succès ne sera pas immédiat. Mais il persévère en fréquentant les élus et les décideurs de la France soixante-huitarde. Nommé à l’Académie française en 1973, il militera pour la nomination de la première femme, Marguerite Yourcenar. Et des années plus tard, il le fera pour un Canadien d’origine haïtienne, Dany Laferrière.
L’année dernière, j’ai lu cet écrivain qui se disait catholique, sans avoir la foi: «Je ne sais pas si Dieu existe mais, depuis toujours, je l’espère avec force.». C’est toujours avec légèreté et gaieté qu’il abordait les mystères de la vie. Même pour parler du temps.
Pour répondre aux questions fondamentales, il dit que deux voies sont possible: celle de la science et celle de l’art. Cherchant à percer le mystère de la vie, il pose une question: le big bang se situe-t-il dans le temps ou a-t-il créé le temps? Pour certains, il prend place dans le temps, celui-ci existant avant l’espace. D’autres reprennent l’idée de saint Augustin soutenant que Dieu a créé le temps avec l’univers.
Si le big bang a créé le temps et l’espace, qu’est-ce que nous pouvons dire de l’avant?
Ce tout aurait-il surgi du rien? Derrière le mur de Planck, chacun y va de ses suppositions. Lorsque notre intelligence a atteint les limites du possible, chacun entre dans le royaume de la foi.
Le temps demeure un mystère. Il avance avec nous dans la vie. Ou plutôt: il nous fait avancer avec lui. Non seulement il nous accompagne, nous façonne et nous constitue. Il nous fait aussi grandir, vieillir et mourir. Le passé, lui, est déjà donné. Il est parti, disparu. Il n’est pas absent comme l’avenir opaque et imprévisible.
Rien n’est moins sûr que l’avenir. C’est pourquoi on formule des souhaits (en janvier, au commencement d’une nouvelle année) et on récite des prières. Pour se rassurer. Lorsque l’avenir arrive, il est semblable au présent et devient rapidement du passé.
J’aime la voie de l’art pour aborder le mystère. Peut-être encore plus que celui de la science qui se trouve souvent devant un cul-de-sac après avoir fait le tour d’une question. L’art fut le chemin de Jean d’Ormesson. Il n’explique pas tout (qui aurait une telle prétention?). Mais avec des mots et des images, il s’approche du mystère. Il est grand ce mystère de la vie.