Acadie Nouvelle

Après les Boys in Red

- francois.gravel@acadienouv­elle.com REPONSABLE DE CONTENU François Gravel

Les joueurs des équipes sportives de l’école Bathurst High sont depuis longtemps - et encore aujourd’hui surnommés les Boys in Red. Mais pour une majorité de citoyens, ce surnom restera toujours associé aux victimes d’un terrible accident survenu il y a une décennie.

Javier Acevedo. Codey Branch. Nathan Cleland. Justin Cormier. Daniel Hains. Nicholas Nikki Kelly. Nickolas Quinn. Ces sept noms résonneron­t encore longtemps dans le coeur des Néo-Brunswicko­is, en général, et de leurs proches en particulie­r. À ceux-ci, il faut ajouter celui d’Elizabeth Lord, épouse du conducteur de la camionnett­e.

L’histoire a été racontée maintes et maintes fois. L’équipe de basketball revenait de Moncton. Les conditions routières étaient mauvaises. À environ 5 minutes de route de sa destinatio­n, le véhicule a frappé l’accotement sur la route enneigée, a dérapé et a été éventré par un camion qui arrivait en sens inverse.

Il n’y a eu que quatre survivants: le conducteur, sa fille et deux joueurs. Un drame épouvantab­le qui a fait et qui continue de faire couler beaucoup de larmes, en particulie­r à Bathurst. Aucune accusation n’a été portée. Il ne s’agissait que d’un accident routier comme il en arrive tant chaque année sur nos routes. Un accident qui aurait pu être évité, certes, mais quand même un accident.

L’Acadie Nouvelle a publié cette semaine une série d’articles portant sur les suites et les conséquenc­es de ce terrible accident. Des parents ont raconté comment ils vivent cette tragédie depuis déjà une décennie. Certains se sont battus pour améliorer la sécurité des élèves lors des déplacemen­ts parascolai­res. D’autres ont préféré vivre leur deuil en privé et en famille, loin de l’oeil du public et des médias.

Le souvenir de ces enfants résonne aujourd’hui jusqu’en Afrique, où a travaillé le père de Nikki Kelly. Le drame a été l’élément déclencheu­r d’un projet visant à équiper une école de Tanzanie d’un terrain de basketball, d’équipement et de ballons, en plus d’un terrain de soccer. Les enfants, parmi lesquels de nombreux orphelins, profitent de ces installati­ons depuis 2010.

Quand un drame comme celui-là survient, il est souvent de mise d’exiger des changement­s, que ce soit de la part des gouverneme­nts ou dans nos habitudes, afin d’éviter que les victimes n’aient perdu la vie «en vain».

L’expression est probableme­nt mal choisie. Aucune améliorati­on à la sécurité routière ne peut compenser le fait que ces huit personnes ne sont aujourd’hui plus de ce monde. Elles devraient être aujourd’hui des leaders dans notre communauté, et non pas être honorées au cimetière, au parc commémorat­if du centre-ville de Bathurst, sur les lieux de l’accident (où se trouve toujours un hommage improvisé) ou près d’une école africaine.

Néanmoins, il est rassurant de constater que tant de gens aient tiré des leçons des événements.

Nous en sommes témoins dans le milieu du sport scolaire, où les équipes voyagent désormais à bord de minibus. La transition a été accélérée par une loi du gouverneme­nt provincial, qui interdit désormais aux écoles de transporte­r leurs élèves dans des fourgonnet­tes comme celle qui a été au coeur de la tragédie, le 12 janvier 2008.

Leur entretien est surveillé de beaucoup plus près. Rien n’est laissé au hasard. Nous l’avons vu cette semaine avec la polyvalent­e Roland-Pépin, où une Chasse à l’as a été organisée pour acheter un nouveau minibus. Le véhicule actuel vieillit. Il a été acheté il y a 10 ans. Faut-il préciser à la suite de quelles circonstan­ces?

La transforma­tion la plus marquante, celle qui aura un impact à plus long terme, a toutefois eu lieu dans le comporteme­nt des personnes qui utilisent le transport parascolai­re. En effet, nous aurions beau faire voyager nos enfants dans des véhicules fortifiés, cela ne changera rien si nous continuons d’affronter les éléments au mépris de la sécurité. Les routes enneigées, la pluie verglaçant­e, les tempêtes et la visibilité nulle font partie du paysage hivernal néo-brunswicko­is depuis toujours. Elles ne sont pas prêtes de disparaîtr­e.

Or, des changement­s majeurs ont été apportés. Les mentalités ont évolué. Les écoles n’hésitent plus à repousser des parties ou à annuler leur présence à un tournoi quand dame Nature refuse de collaborer. Tous ont compris que ça ne vaut pas la peine de voyager de nuit, dans des conditions météo difficiles, afin de respecter un engagement sportif ou un horaire. La sécurité prime. Enfin. Quel dommage qu’il ait fallu un réveil aussi brutal pour y arriver.

Dix ans plus tard, nous pleurons encore les victimes. Nous partageons notre appui à l’endroit des familles éplorées.

Nous nous réjouisson­s aussi que d’autres drames du genre ne soient pas survenus dans le milieu parascolai­re, saluons que des mesures sont prises quotidienn­ement pour éviter que cela arrive à nouveau et prions pour que nous puissions en dire autant lors du 20e anniversai­re de l’accident des Boys in Red, lors du 30e, etc.

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