LÉGALISATION DE LA MARIJUANA: «C’EST DE LA FOUTAISE»
Le projet de loi C-45 visant à légaliser le cannabis à des fins récréatives est actuellement devant le Sénat. Et jusqu’à présent, il est très loin d’avoir convaincu le sénateur restigouchois de sa pertinence.
Lorsqu’il a été nommé sénateur, en 2012, Paul McIntyre était loin de se douter qu’il devrait, quelques années plus tard, étudier un projet de loi portant sur la légalisation du cannabis.
La semaine dernière, le sénateur a pris la parole devant le Sénat lors de la deuxième lecture de projet de loi. Il tenait mordicus à faire part à ses confrères de certaines de ses craintes. Si plusieurs facettes ne lui plaisent guère, deux points en particulier l’inquiètent.
D’abord le respect des traités internationaux portant sur le contrôle des stupéfiants. Dans son allocution, le sénateur a dit craindre que la décision de légaliser le cannabis à des fins récréatives fasse en sorte que le Canada ne respecte plus certains traités internationaux.
«C’est incompatible avec plusieurs pays», a répété M. McIntyre en entrevue.
Selon son interprétation, le Canada enfreindrait trois traités de l’Organisation des Nations unies dont il est signataire, soit la Convention unique sur les stupéfiants de 1961, la Convention sur les substances psychotropes de 1971 et la Convention de l’ONU contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988.
«C’est important pour nous d’honorer nos engagements internationaux. Si jamais on veut se sortir de ceux-ci, il faut aviser nos partenaires et il y a toute une procédure qui entoure cela. Mais jusqu’ici, le Canada est silencieux. On ne sait pas comment il entend concilier sa volonté de légaliser et le respect de ces traités», indique-t-il.
Et puis, il y a les effets à long terme sur la santé ainsi que sur le système de santé en général. Le sénateur estime que la légalisation va à l’encontre des objectifs de prévention que le Parlement devrait promouvoir.
«On connaît les effets néfastes de l’utilisation du cannabis à court et à long terme sur la santé. Et cela aura définitivement des impacts et des coûts non négligeables sur le système de santé», estime-t-il.
LE GOUVERNEMENT VA TROP VITE
Le sénateur a poussé plus loin sa réflexion. Avocat de formation, il croit que l’idée que la légalisation serve à désengorger le système judiciaire est grandement surfaite. Car si les cas de possessions risquent de se faire plus rares, les cours risquent, selon lui, d’être accaparées par les cas de conduite sous influence et de contestations.
«La légalisation de la marijuana, c’est de la foutaise, ça n’a aucun sens! On n’a pas besoin de ça. Ça me préoccupe personnellement et je sais que de nombreux autres sénateurs sont du même avis. On découvre des failles dans le projet de loi presque tous les jours.
«En fait, s’il y avait un vote sur la question à ce moment-ci, le résultat serait très serré», affirme McIntyre.
Il maintient que le gouvernement a erré dans la conception du projet de loi et qu’il va beaucoup trop vite dans sa volonté de légaliser.
«On a besoin de plus d’études entourant cette question. Car en voulant aller trop rapidement, j’ai peur que plusieurs éléments nous échappent. Mais s’il doit être adopté, je veux que ce projet de loi soit exemplaire», dit-il.
Son souhait sera d’ailleurs exaucé puisque le projet de loi sera à nouveau scruté par la loupe des sénateurs. Et le Restigouchois sera de la partie.
Le 15 février, les leaders du Sénat ont en effet conclu une entente pour qu’un vote ait lieu le 22 mars pour le renvoi à l’étude du projet de loi devant les comités sénatoriaux. Cinq comités se pencheront plus en profondeur sur les détails du projet de loi C-45.
Le sénateur McIntyre participera à deux de ces cinq comités sénatoriaux, plus précisément le Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ainsi que le Comité permanent de la Sécurité nationale et de la Défense.
Le sénateur siège par ailleurs en ce moment sur un comité qui étudie un autre projet de loi connexe – le C-46 – qui lui, est destiné à donner plus de pouvoir aux forces policières, notamment en ce qui concerne la détection des drogues.
À la suite des travaux de ces cinq comités, le Sénat débattra de la question jusqu’à la date limite pour le vote, soit le 7 juin.