BEAUBASSIN-EST: LE MAIRE ACCUSÉ AU CRIMINEL
Le maire de la Communauté rurale de Beaubassin-Est (CRBE) devra répondre à des accusations de natures criminelles. Ronnie Duguay aurait manqué à son devoir d’élu en omettant de se déclarer en conflit d’intérêts à deux reprises.
La première infraction alléguée à la Loi sur les municipalités remonte à 2016, alors qu’il était conseiller au quartier de Botsford.
Le 22 février, lors d’une réunion extraordinaire du conseil municipal, Ronnie Duguay serait demeuré à la table du conseil pour la discussion et le vote d’un point avec lequel il était en conflit d’intérêts.
Ce jour-là, deux motions pour des demandes de changement de zonage ont été adoptées à l’unanimité. La première, à la demande de Pierre Vautour, visait à faire passer le nombre de roulottes et de bâtiments accessoires à 12 et à 13 sur un terrain récréatif, respectivement. La deuxième demande, celle d’Edmond Gagnon, concerne l’agrandissement d’une usine de transformation de poisson.
L’acte d’accusation ne précise pas avec laquelle de ces deux motions Ronnie Duguay aurait été en conflit d’intérêts.
La deuxième infraction alléguée se serait produite le 14 mars, lors d’une réunion de travail. Il n’existe pas de procès-verbal de la réunion, mais l’Acadie Nouvelle est parvenue à obtenir copie de l’ordre du jour. Deux demandes de zonage y sont affichées, cette fois concernant les demandes de Noël Léger et de Leslie Léger.
Encore une fois, l’acte d’accusation ne précise pas en quoi, précisément, Ronnie Duguay aurait violé la loi en omettant de déclarer qu’il se trouvait en conflit d’intérêts
DE FAUSSES ACCUSATIONS
Contacté par l’Acadie Nouvelle, Ronnie Duguay confirme être demeuré à la table du conseil lors de points qui concernaient un membre de sa famille, mais nie qu’il s’agit d’un conflit d’intérêts. Il s’agissait de sa soeur, dit-il, qui contrevenait à un arrêté municipal sur le nombre de roulottes admissible par terrain.
Ronnie Duguay n’y voit aucun conflit d’intérêts, parce qu’il était prêt voter en faveur d’une poursuite de la municipalité contre sa soeur pour infraction d’un arrêté municipal.
«Ma soeur n’était pas conforme à un arrêté concernant les roulottes et moi je voulais voter pour que la municipalité l’emmène en cour si elle n’était pas conforme. Ça ne s’est pas rendu au vote de toute manière.»
Le maire estime que la GRC n’a aucune chance de remporter ce cas en cour provinciale. Il se plaint d’ailleurs de ne pas avoir été contacté par un policier pour discuter des accusations qui pèsent maintenant contre lui. Il estime qu’elles sont le fruit d’un complot d’anciens conseillers pour le destituer.
«C’est juste des accusations, ils n’ont rien du tout contre moi.»
Le maire a rendez-vous au Palais de justice de Moncton le 22 mars pour déposer son plaidoyer face aux accusations. S’il est reconnu coupable sur toute la ligne, il s’expose à une amende de 350$, d’une ordonnance de démission de ses fonctions et de ne plus jamais siéger à un conseil municipal.
Ronnie Duguay entend plaider non coupable.
DU JAMAIS VU AU N.-B.?
C’est la première fois que de telles accusations sont déposées contre un élu municipal en Cour provinciale au NouveauBrunswick, explique le caporal Daniel Poirier, du détachement de la GRC de Shediac.
C’est lui qui a déposé les accusations, au terme d’une enquête qui a débuté il y a près d’un an et demi.
«On n’a jamais vu ça avant, alors on voulait être certain de bien étudier la question et la Loi sur les Municipalités pour nous assurer de bien faire les choses. On a consulté des experts et mené notre enquête, puis on a jugé qu’il y avait matière à dépôt d’accusations.»
L’Acadie Nouvelle a tenté de corroborer ces informations. Selon un avocat qui ne souhaite pas être identifié, une accusation similaire aurait été déposée en 1986, dans une municipalité du Sud-Est, au sujet de l’attribution d’un contrat de conciergerie. Il nous a toutefois été impossible de confirmer ces faits de manière indépendante
UN HISTORIQUE DE CONFLITS
Le conseil municipal de la CRBE semble avoir le don de s’attirer les ennuis. En 2015, les élus se sont retrouvés au beau milieu d’une affaire gênante de destruction de documents publics et d’enregistrement sonore de réunions.
La Commissaire à l’accès à l’information, Anne Bertrand, a été saisie du dossier et a finalement déposé un blâme officiel.
En février 2016, le maire Jean-Albert Cormier, alors en poste, avait fait une sortie publique pour dénoncer «la politique de bas niveau» qui prenait alors place dans l’édifice municipal.
Et plus récemment, mardi, un conseiller a tiré la sonnette d’alarme quant au processus de sélection d’une nouvelle direction générale, accusant une conseillère de piper les dés en la faveur d’un candidat.