Acadie Nouvelle

Formation en santé: l’Acadie dépendante des autres provinces

- Anne-Marie Provost anne-marie.provost@acadienouv­elle.com

Les francophon­es du Nouveau-Brunswick sont dépendants des université­s des autres provinces pour recevoir un diplôme dans plusieurs secteurs de la santé et rien ne les oblige à revenir pratiquer dans la province. Alors qu’il y a pénurie de dentistes et des difficulté­s de recrutemen­t de physiothér­apeutes, la question se pose à savoir si le système devrait être revu.

Pascal Dumas, originaire de Balmoral, dans le nord de la province, rêvait d’être dentiste quand il était plus jeune.

«Je voulais être dentiste depuis l’âge de 14 ans. La plupart du monde de mon âge avait peur d’y aller, mais moi j’aimais ça», raconte-til.

Le Nouveau-Brunswick n’offre pas de formation universita­ire en dentisteri­e. Comme plusieurs autres qui veulent étudier dans ce domaine, l’étudiant a d’abord complété un diplôme des sciences de la santé (DSS) à l’Université de Moncton. Il a soumis sa candidatur­e en 2015 à l’Université de Montréal et à l’Université Laval en médecine dentaire, mais il a été refusé.

Si Pascal Dumas a laissé sa déception derrière lui, il trouve que les régions plus éloignées sont pénalisées par le système.

«Je trouve ça dommage parce que les gens qui vont vouloir travailler dans le Nord sont des gens de la place. C’est rare que quelqu’un déménage dans une petite ville s’il vient de Montréal ou de Québec», pense-t-il.

Les étudiants du Nouveau-Brunswick sont en compétitio­n avec ceux du Québec lorsqu’ils font une demande d’admission pour avoir accès aux programmes en santé qui ne sont pas offerts en français dans la province.

Le nombre de places ouvertes dans les université­s québécoise­s en médecine dentaire est de cinq par année pour les étudiants néobrunswi­ckois, en vertu d’une entente de longue date.

Mais les chiffres des dernières années montrent que dans presque tous les programmes en santé couverts par cette entente, le nombre maximal d’étudiants permis est loin d’être toujours atteint, malgré un nombre parfois élevé de demandes d’admission.

À titre d’exemple, en 2017, un seul NéoBrunswi­ckois a été admis en médecine dentaire alors que 13 personnes avaient soumis leur candidatur­e. En 2016, deux étudiants ont été admis malgré 13 demandes.

En plus de la dentisteri­e, sept autres programmes en santé sont accessible­s en français uniquement à l’extérieur de la province. C’est le cas pour la physiothér­apie, où il y a des difficulté­s de recrutemen­t dans certaines cliniques et dans le secteur public.

Le responsabl­e des programmes spéciaux de la Faculté des sciences de l’Université de Moncton, Stéphan Reebs, précise que «si les Néo-Brunswicko­is ne réussissen­t pas à se classer parmi le contingent de tête qui inclut les Québécois, alors ce ne sont pas toutes les places ouvertes qui sont remplies».

M. Reebs ne se sentait pas en mesure de commenter à savoir si l’entente répond aux besoins du marché du travail.

La Commission de l’enseigneme­nt supérieur des provinces maritimes (CESPM), qui supporte l’entente entre le NouveauBru­nswick et les université­s québécoise­s, indique avoir un rôle purement administra­tif et ne pas pouvoir commenter l’efficacité de l’entente.

Celle-ci a coûté 4,7 millions $ au NouveauBru­nswick pour l’année 2016-2017 et 161 étudiants en ont profité.

De son côté, le ministère de la Santé a répondu par courriel à notre demande d’entrevue.

Un porte-parole affirme que la compétitio­n explique pourquoi des places ne sont pas comblées.

«Les étudiants de nos jours sont beaucoup mieux informés quant à leurs options de carrières, et ce, dans plein d’autres domaines. Le domaine de la santé est donc en compétitio­n avec d’autres domaines pour un même bassin d’étudiants», écrit Paul Bradley.

DES DIPLÔMÉS QUI NE REVIENNENT PAS

Les cohortes devraient-elles être plus grandes? Est-ce que la formation préparatoi­re devrait être améliorée? Est-ce que le gouverneme­nt provincial devrait carrément mettre sur pied ses propres programmes, malgré les ressources que cela implique? C’est ce que se demandent des profession­nels et des étudiants avec qui nous avons discuté.

«Je pense que c’est en lien avec les cohortes à l’université qui ne sont pas assez grandes et le fait qu’on n’a pas de programmes ici au Nouveau-Brunswick. Dans ma cohorte, nous étions neuf du Nouveau-Brunswick sur 36. Mais nous sommes seulement la moitié à être revenue», souligne le physiothér­apeute JeanMichel Cormier, qui a étudié à l’Université d’Ottawa et qui travaille maintenant chez Max Health Institute à Shediac.

Il déplore la disparitio­n en janvier 2016 du programme de rabais sur les droits de scolarité, qui donnait un crédit d’impôt aux diplômés établis dans la province après leurs études.

«Une des choses qui nous a incités à revenir, ma conjointe et moi, c’était une bourse pour revenir dans la province et qui payait la moitié des frais de scolarité, jusqu’à un certain montant», raconte M. Cormier.

Du côté du ministère de la Santé, on indique que des initiative­s ont été mises en place pour faciliter le retour après les études.

Un programme existe pour permettre aux étudiants de certaines discipline­s de revenir au Nouveau-Brunswick pour effectuer leurs stages cliniques.

Ceux qui s’engagent à venir pratiquer au sein d’une régie de la santé (Vitalité et Horizon) peuvent également obtenir un montant d’argent pour leur déménageme­nt.

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Pour faire ses études en dentisteri­e, les jeunes du Nouveau-Brunswick doivent sortir de la province. - Archives

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