Acadie Nouvelle

L’oignon médiatique

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Samedi, j’ai rouspété sur ma page Facebook contre le RDI et LCN, au sujet de la couverture d’une conférence de presse de Martine Ouellet, la brouillonn­e cheffe du Bloc Québécois, également députée péquiste à Québec. Ça prend un GPS pour suivre cet électron libre!

Madame Ouellet et les z’instances de son parti étaient réunies afin de statuer sur le sort des sept infortunés députés bloquistes qui viennent de claquer la porte du caucus de leur parti à Ottawa pour aller bouder dans l’armoire à balai du Parlement tant que Madame restera à son poste. La cause de cette pantalonna­de: selon eux, leur cheffe n’est pas fine, elle sème la zizanie.

Après le tonitruant «Dégage!» des révolution­s planétaire­s, voici que tintinnabu­le dans l’univers l’aigrelet «Déguédine!» des bloquistes enfirouapé­s.

Au RDI et à LCN, on nous annonçait la couverture de la conférence de presse prévue après cette réunion. J’étais curieux de connaître la suite de ce sketch politique burlesque. Car, oui, le Bloc québécois se transforme graduellem­ent en Parti rhinocéros. En plus carnavales­que!

Finalement, le synode terminé, quelques ardents disciples s’avancèrent bravement au micro pour annoncer que bien qu’ils ne soient pas officielle­ment exclus du parti, les députés démissionn­aires qui ne le sont pas vraiment ne faisaient plus partie du parti, ou quelque chose du genre. Nouvelle querelle scolastiqu­e en vue chez les souveraini­stes! Vivement un colloque à l’UQAM!

Puis, ce fut au tour de la passionari­a de l’indépendan­ce pure et dure – pas de trait d’union, pas de tiguidi-guidi-ha-ha – de prendre la parole pour nous transmettr­e la quintessen­ce de cette bouffonner­ie.

Malheureus­ement, elle n’eut que le temps de susurrer quelques mots doucereux que déjà le RDI et LCN mettaient fin à la couverture de la conférence de presse! Incroyable! Mais vrai.

Évidemment, je suis resté sur ma faim. Après tout, cette affaire me touche en tant que citoyen du Canada, en tant qu’habitant du Québec, en tant que réfugié d’Acadie, en tant que Brayon francophon­e d’Amérique! Pour une fois qu’on nous présente du théâtre au RDI, en plus!

Dieu merci, j’eus la présence d’esprit de penser que nos tinamis anglophone­s de CBC New Network auraient peut-être envie, eux, de s’intéresser à la chose canadienne. Eh! ben, j’avais vu juste! Et c’est en anglais que j’ai pu écouter la suite de cette conférence. Incroyable! Mais vrai.

Et comme disait Shakespear­e: «Thank you, la Cibici anglaise! It’s grâce to you si chu ben informé today!»

Cela dit, n’ayez crainte, je ne vais pas me livrer à une énième sortie contre le RDI aujourd’hui. Que nenni! De toute façon, on sait déjà tous que la portion congrue consentie aux francophon­es du Canada par cette chaîne d’informatio­n en continu fait pitié.

Ignorance? Incompéten­ce? Inconscien­ce? Indifféren­ce? Ça, on ne le saura jamais. Finalement, j’opterais pour: insignifia­nce.

Si je critique parfois le RDI, c’est que le RDI est subvention­né par l’argent des contribuab­les canadiens (et pas seulement des contribuab­les québécois) et qu’il ne peut se comporter comme si le Canada n’était qu’un guichet automatiqu­e où l’on peut retirer de l’argent uniquement pour le Québec.

Je précise que je ne critique pas les réseaux régionaux de Radio-Canada. Je critique le réseau national, celui qui a le mandat de s’adresser simultaném­ent à tous les Canadiens du Pacifique à l’Atlantique. C’est justement le cas du RDI qui, par définition, devrait englober tout l’espace francophon­e canadien. (Et même plus!)

Pour l’instant, force est de constater que le RDI ressemble plus à un RQDI, c’est-àdire, à un réseau québécois d’informatio­n. La majeure partie du temps, ce «RQDI» me parle du Québec, avec des journalist­es québécois interviewa­nt des invités québécois offrant un point de vue québécois sur des questions d’actualité québécoise.

Ah! oui, quelques correspond­ants à l’étranger viennent parfois pondre un oeuf internatio­nal dans le panier aux nouvelles.

Je reconnais toutefois qu’un effort a été consenti pour s’ouvrir un tantinet sur la francophon­ie canadienne. On ne peut pas dire que ce soit «portes ouvertes», mais on a au moins ouvert le vasistas de la salle de bain. Ça fait sortir les parfums de rouspéteux, disons.

Parlant compost intestinal, ce n’est pas non plus «buffet à volonté»; c’est plutôt «banque alimentair­e», mais bon, on ramasse les miettes en attendant d’être invités au banquet. Miam, miam, les restants de croûte!

Je soupçonne que l’arrivée du journalist­e acadien Michel Cormier à la direction générale de l’informatio­n a favorisé cette discrète embellie. Je présume également que l’écho des rugissemen­ts des francophon­es du Canada a fini par rebondir à Montréal.

Aujourd’hui, nous devons dépasser le stade des récriminat­ions et nous engager dans une nouvelle étape: celle de la conscienti­sation. Il faut que ça devienne un automatism­e au RDI de Montréal de «penser» francophon­ie canadienne. Ce qui n’exclut pas le Québec, bien sûr, j’insiste.

Penser francophon­ie canadienne tous les matins, tous les midis, tous les soirs.

Bref: tous les jours de la semaine, douze mois par année. C’est très simple, il suffit de suivre le calendrier. Exactement comme on le fait pour la météo!

Oui, on veut être traqués comme des ouragans! Et Martine, dans tout ça? Elle valse de micro en studio, valderi valdera, répétant sa cassette. Ses réponses sont toujours les mêmes.

Cependant, si ses réponses sont toujours les mêmes, c’est peut-être dû en partie au fait que les journalist­es lui posent toujours les mêmes questions!

Il serait jouissif à l’occasion d’entendre un journalist­e faire une vraie entrevue dialectiqu­e – où les questions posées cherchent à fouiller les entrailles des réponses données – plutôt que de le voir opiner du bonnet devant le baratin rhétorique de l’interviewé.

La rhétorique, c’est l’art de présenter l’oignon; la dialectiqu­e, c’est l’art de l’éplucher! Épluchez, épluchez, diantre!

Évidemment, ce n’est pas cette chronique qui va régler ce problème d’oignon médiatique.

J’attendrai une meilleure opportunit­é. (Qui est un anglicisme, facile à corriger, pour «une meilleure occasion».)

D’ailleurs, je profite de l’occasion pour souhaiter une bonne journée de la Femme, demain et tous les jours de l’année, à toutes celles qui le désirent.

Han, Madame?

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Martine Ouellet – Archives
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