Acadie Nouvelle

Résoudre les crises municipale­s

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Les disputes se multiplien­t ces derniers temps au sein des conseils municipaux en Acadie. L’ennui, c’est que personne ne sait exactement quoi faire dans ce genre de situations.

Il existe un peu plus d’une centaine de municipali­tés au Nouveau-Brunswick. La grande majorité d’entre elles n’ont rien de dysfonctio­nnelles.

Des divergence­s d’opinions entre élus ou avec la population peuvent pousser soudaineme­nt une municipali­té sous le feu des projecteur­s. Parfois, le problème se règle de luimême. Tout le monde vote, un arrêté est adopté ou rejeté et on passe à autre chose.

Par contre, il arrive aussi que les conflits dégénèrent.

C’est le cas à Beaubassin-Est ces jours-ci, où une conseillèr­e municipale a été montrée du doigt pour avoir présumémen­t utilisé son statut d’élue municipale pour tenter d’intimider des citoyens. Ça ne va pas mieux pour le maire Ronnie Duguay, qui fait face à des accusation­s de conflit d’intérêts et qui refuse de se retirer de son poste d’ici à sa comparutio­n au tribunal.

Pendant ce temps à Tracadie, deux clans s’opposent: sept conseiller­s, majoritair­es au conseil municipal, contre le maire Denis Losier et trois autres conseiller­s. Ces gens ne semblent pas pouvoir se blairer, au point où M. Losier a envisagé de démissionn­er. Cela, alors que celui-ci fait état de soupçons de collusion, de contrats «drôlement faits» et de cadeaux aux élus.

D’autres histoires ont aussi été médiatisée­s. À Dalhousie, un conseiller a été suspendu par le maire l’année dernière pour ses agissement­s jugés «agressifs» et «irrespectu­eux» envers les employés du conseil. L’affaire se rendra devant les tribunaux, le conseiller et la Ville se parlant désormais par avocats interposés.

Un scénario semblable s’est écrit à Beaubassin-Est (eh oui, encore là!) en 2017, quand le conseiller Michel E. Gaudet a été menacé d’expulsion du conseil municipal parce qu’il aurait «tenu un langage abusif ou inconvenan­t» à l’endroit de deux employés. Une motion visant à le destituer de son droit de représenta­tion auprès d’organismes externes a été défaite à 5 contre 4.

À Kedgwick, trois conseiller­s ont remis leur démission depuis les élections de 2016. Ils ont affirmé avoir eu maille à partir avec la mairesse ainsi qu’avec d’autres membres du conseil. Ils ont parlé d’entorses aux procédures et même d’une atmosphère malsaine.

Et que penser du vaudeville à Saint-André, dans le Nord-Ouest? Quatre démissions sont survenues à la table du conseil en l’espace de neuf mois, en 2016 et en 2017, y compris celle du maire Allain Desjardins.

Une petite visite dans les archives de l’Acadie Nouvelle nous révèle que ces situations ne sont pas si exceptionn­elles. Des déchiremen­ts seront toujours possibles, comme ce fût le cas en 2009 quand le Village de Baker Brook (qui fait aujourd’hui partie de la communauté regroupée de Haut-Madawaska) s’est retrouvé sous tutelle à la suite du départ précipité de trois conseiller­s. Des problèmes internes et des conflits de personnali­tés avec le personnel administra­tif permanent avaient été évoqués à l’époque.

Ces histoires ont un point en commun: dans tous les cas, les élus municipaux sont laissés à eux-mêmes. Ils doivent se débrouille­r pour trouver des solutions ou démissionn­er.

Il y a un vide au sein du ministère quand vient le moment de régler des conflits comme ceux-là.

Pourtant, celui-ci ne se gêne pas pour tenir la bride serrée dans d’autres circonstan­ces. La taxe foncière est directemen­t payée à la province, qui la redistribu­e ensuite selon son bon vouloir aux municipali­tés. Si celles-ci veulent emprunter des capitaux, elles doivent obtenir la permission d’une commission provincial­e.

Par contre, quand une municipali­té est paralysée en raison de conflits de personnali­tés, le gouverneme­nt s’en lave les mains. Il laisse les enfants se disputer sans s’en mêler.

Une lueur d’espoir est survenue à Tracadie, quand l’Associatio­n francophon­e des municipali­tés du N.-B. a proposé aux belligéran­ts de participer à un processus de médiation financé par la province. Le maire Losier a immédiatem­ent fait part de son intérêt, mais l’idée est tombée à l’eau quand il a refusé d’offrir des excuses publiques à l’autre camp.

Il n’est pas question ici de suggérer que Fredericto­n débarque avec ses gros sabots aussitôt qu’un conseiller et un maire se critiquent l’un et l’autre en pleine assemblée publique. Le ministre a d’autres chats à fouetter. Toutes les crises ne peuvent être résorbées. Et ce ne sont pas toutes les personnes prises dans une dispute qui ont suffisamme­nt de bonne volonté pour chercher des solutions.

Mais dans les cas où il existe une ouverture de part et d’autre, il serait bien que le ministère offre un programme, une aide ou les services d’un médiateur qui seraient offerts sur demande.

Nous croyons que le ministère de l’Environnem­ent et des Gouverneme­nts locaux doit offrir des outils aux élus municipaux et non pas se contenter de s’interposer en dernier recours, quand il ne reste plus d’autres options que la tutelle.

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