Armes à feu: Ottawa présente un projet de loi pour resserrer les contrôles
Ceci n’est pas un registre. C’est le message qu’ont martelé le premier ministre Justin Trudeau et son ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, après le dépôt du projet de loi sur le contrôle des armes à feu, mardi, à Ottawa.
La mesure législative C-71 obligera les marchands d’armes à conserver pendant au moins 20 ans les données sur les armes à feu sans restriction. Les acheteurs, eux, feront l’objet de vérifications plus rigoureuses avant d’obtenir un permis d’armes à feu, selon le texte de loi.
Les autorités tiendront compte d’une série de facteurs pour déterminer l’admissibilité, notamment si «le demandeur a été déclaré coupable ou absous» d’infractions criminelles ou s’«il a été traité pour une maladie mentale», précise-t-on.
Cet examen ne sera plus limité aux cinq ans précédant la demande de permis, comme la loi l’exige actuellement: toute personne qui déposera une requête de permis d’armes à feu verra les renseignements de toute sa vie être scrutés par les autorités.
Le projet de loi abroge aussi une directive adoptée sous les conservateurs qui permettait au gouvernement d’abaisser la classification des armes à feu. Au passage, Ottawa renvoie dans la catégorie des armes prohibées deux groupes d’armes, le CZ 858 et SwissArms.
Il y aurait environ 700 armes de ce type en circulation, selon des fonctionnaires fédéraux. Une clause de droit acquis a été incluse pour éviter de pénaliser leurs actuels propriétaires, qui bénéficieront d’une amnistie de trois ans pour se conformer aux nouvelles exigences.
Le ministre Goodale s’est félicité d’avoir accouché d’un projet de loi «équilibré» qui est le reflet d’un «bon et solide consensus canadien» sur un sujet «polarisant». Il n’a pas voulu dire s’il faisait consensus au sein du caucus libéral.
Selon The Hill Times, une publication spécialisée en politique fédérale, des élus libéraux de circonscriptions rurales ont exprimé en réunion de caucus leur inquiétude à l’approche du dépôt de C-71, craignant que celui-ci ne nuise à leur réélection, mais Justin Trudeau n’a pas bronché.
Le député montréalais Nicola Di Iorio n’a pas voulu revenir sur ce qui s’est dit en caucus, car ces discussions sont censées être confidentielles, mais il a soutenu que le premier ministre était «très conscient de l’état de vulnérabilité dans lequel ça place des députés».
Un état de vulnérabilité dans lequel se trouvent aussi les libéraux, politiquement parlant, depuis l’époque de Jean Chrétien, dont le gouvernement avait créé un registre national des armes à feu qui s’était avéré coûteux et qui était vilipendé par les groupes de défense des armes à feu.
Le gouvernement Trudeau a d’ailleurs maintes fois répété qu’il n’avait pas l’intention de ressusciter le registre. Et mardi, tant le premier ministre Trudeau que son vieux routier de ministre de la Saskatchewan se sont fait un point d’honneur de le préciser.
«On n’est pas en train de restaurer un registre. Nous sommes en train d’exiger que les détaillants adoptent de meilleures pratiques», a tranché le premier à l’entrée de la période des questions. «Ceci n’est pas un registre», lançait le second peu avant, en conférence de presse.