Création de 95 emplois: réjouissances... et inquiétudes
Pendant longtemps, l’économie de SaintIsidore, dans la Péninsule acadienne, a tourné autour de l’agriculture. La construction d’une nouvelle usine de transformation de légumes à BoisGagnon, près de Saint-Isidore, permettrat-elle de relancer ce secteur, qui a perdu des plumes au fil des années?
Oscar Roussel, maire de Saint-Isidore, se permet de rêver aux retombées économiques potentielles de ce méga projet pour la municipalité.
«Saint-Isidore est une zone qui est historiquement reconnue pour son agriculture. Même s’il y a très peu d’agriculteurs de nos jours, il y a de très belles terres agricoles qui ne font qu’attendre des légumes qui pourraient y être cultivés et acheminés à Bois-Gagnon.»
«Au lieu de les laisser à l’abandon, peut-être qu’il y a des gens qui voudront s’adonner à l’agriculture, comme ça s’est fait il y a longtemps. Je n’ai pas une boule de cristal, mais ça pourrait être un élément encourageant.»
La semaine dernière, l’entreprise néoécossaise Oxford Frozen Foods a annoncé son intention d’agrandir ses installations de BoisGagnon en construisant une usine de transformation de légumes au coût de 25 millions $.
Un prêt à intérêts, remboursable en entier, de 13 millions $ a été accordé à Oxford Frozen Foods par Opportunités NB. Une subvention non remboursable de 3,25 millions $ a aussi été offerte par la province. Oxford doit aussi investir près de 13 millions $ dans ce projet.
Le type de produits qui seront préparés dans l’usine n’a pas été précisé, mais Oxford Frozen Foods apprête déjà des aliments panés destinés aux marchés mondiaux dans ses installations de la Nouvelle-Écosse. Y compris des rondelles d’oignons, des champignons et des courgettes panés ainsi que des bâtonnets au fromage. Dans ce cas, certains légumes utilisés proviennent de sources régionales, alors que d’autres sont importés de l’Ontario, des États-Unis et d’autres régions.
À moyen terme, l’entreprise promet de créer environ 95 emplois à temps plein. Oxford Frozen Foods espère produire dans son usine des aliments à valeur ajoutée destinée à l’exportation à longueur d’année.
Cette importante promesse de création d’emplois est aussi bien accueillie par le maire Roussel. Il espère que l’annonce donnera un peu d’espoir à des travailleurs saisonniers à la recherche d’un emploi permanent.
«Quand on regarde le contexte actuel où les gens doivent vivre du stress chaque année en raison de l’assurance-emploi, ceci pourrait régler le sort de 95 personnes dans la Péninsule acadienne qui pourront être à l’aise dans une usine neuve avec des emplois, on espère, bien rémunérés!»
L’annonce de la semaine dernière est un peu moins bien reçue par l’Union nationale des fermiers au Nouveau-Brunswick, pour qui la souveraineté alimentaire est un enjeu de premier plan dans la province, soit l’accès à une nourriture de qualité pour tous.
«On parle de production et de transformation d’aliments destinés en grande majorité à l’exportation, donc ce n’est pas quelque chose qui va augmenter le pourcentage d’aliments du Nouveau-Brunswick consommés ici», dit Rebeka Frazer-Chiasson, présidente de l’organisme.
Selon elle, de nombreuses personnes qui se lancent en agriculture au Nouveau-Brunswick le font avec l’intention de produire de la nourriture pour leurs communautés. Cependant, la province a plutôt tendance à soutenir de grandes entreprises produisant une petite variété de cultures pour le marché d’exportation.
«Y a-t-il une meilleure illustration de cela que l’annonce de l’usine de transformation d’Oxford Frozen Food qui reçoit des millions de dollars en subvention dans la Péninsule acadienne? Dans une province où nous ne nous nourrissons pas, notre gouvernement consacre des millions de dollars à la transformation de légumes qui ne seront probablement pas cultivés écologiquement, ne seront probablement pas payés équitablement et ne seront pas transformés avec la santé en tête.»