Acadie Nouvelle

Attentat à la mosquée de Québec: Bissonnett­e plaide coupable et risque 150 ans de prison

- Stéphanie Marin

Dans une salle de cour où les émotions étaient à fleur de peau, Alexandre Bissonnett­e a demandé pardon pour avoir ouvert le feu dans la Grande Mosquée de Québec en janvier 2017, tuant six hommes et faisant plusieurs blessés. «J’ai été emporté par la peur, par la pensée négative et une sorte de forme horrible de désespoir», a déclaré le jeune homme, mercredi, pendant que les veuves des victimes sanglotaie­nt.

Il a finalement plaidé coupable aux six accusation­s de meurtre au premier degré et de six tentatives de meurtre avec une arme à autorisati­on restreinte. Cette décision en a surpris plusieurs, dont le juge du procès, car il avait d’abord enregistré lundi matin des plaidoyers de non-culpabilit­é.

Ce changement de cap de dernière minute fait en sorte qu’il n’y aura pas de procès.

Et ses conséquenc­es sont lourdes: le jeune homme de 28 ans est passible d’une peine de 150 ans de prison.

Alexandre Bissonnett­e a tenu à lire mercredi en cour une déclaratio­n qu’il avait écrite au préalable.

«À chaque minute de mon existence je regrette amèrement ce que j’ai fait, les vies que j’ai détruites, la peine et la douleur immense que j’ai causées à tant de personnes, sans oublier les membres de ma propre famille, a-t-il lu. J’ai honte. Honte de ce que j’ai fait.»

D’un ton calme et posé, il a dit ne pas savoir pourquoi il a ouvert le feu dans un centre de culte musulman et même avoir de la difficulté à croire l’avoir fait.

«Malgré ce qui a été dit à mon sujet, je ne suis ni un terroriste, ni un islamophob­e.»

Le jeune homme a ajouté qu’il avait des pensées suicidaire­s depuis un bon moment et était obsédé par la mort. «C’est comme si je me battais avec un démon qui a fini par m’avoir», a-t-il dit.

«J’aimerais vous demander pardon pour ce que j’ai fait, mais je sais que mon geste est impardonna­ble», a-t-il conclu, en jetant un bref coup d’oeil vers les gens présents dans la salle. Une femme a laissé échapper un cri.

Le juge François Huot, de la Cour supérieure, a entériné mercredi matin les plaidoyers de culpabilit­é enregistré­s par l’accusé lundi.

Il a prononcé le mot «coupable» 12 fois, en autant de salves le condamnant.

De nombreuses personnes dans la salle de cour ont alors éclaté en sanglots. La tension était palpable: plusieurs femmes de la communauté musulmane pleuraient et d’autres écoutaient le juge d’un air tendu et crispé. Les gens se tenaient la main et essuyaient leurs larmes. Une femme semblait prier, les yeux fermés.

Alexandre Bissonnett­e a écouté le juge en gardant la tête baissée. Il a aussi essuyé des larmes.

Les six veuves des hommes abattus le 29 janvier 2017 étaient dans la salle. Elles ont quitté le palais de justice sans vouloir parler aux journalist­es.

Le Directeur des poursuites criminelle­s et pénales (DPCP) s’est dit satisfait du résultat.

«Nous souhaitons de tout coeur que la culpabilit­é d’Alexandre Bissonnett­e permette aux survivants d’assouvir leur soif de justice et d’apaiser leurs souffrance­s», a déclaré devant les journalist­es Me Thomas Jacques, le procureur de la Couronne.

Il a aussi insisté sur le fait qu’il n’y a eu aucune entente sur la peine.

Me Jacques promet de réclamer une peine qui reflétera l’ampleur des «crimes odieux» commis.

Le procureur d’Alexandre Bissonnett­e, Me Charles-Olivier Gosselin, a indiqué que son client était «un jeune homme troublé» et qu’il allait présenter, dans le cadre des représenta­tions sur la peine, une preuve détaillée sur son état de santé et son potentiel de réhabilita­tion.

Les représenta­tions sur la peine auront lieu à partir du 10 avril.

 ??  ?? Alexandre Bissonnett­e - La Presse canadienne
Alexandre Bissonnett­e - La Presse canadienne

Newspapers in French

Newspapers from Canada