Acadie Nouvelle

Le trou noir dans le programme d’assurance-emploi

- Bernard Theriault Jeannot Volpe

On ne s’en sortira jamais! Alors que l’industrie du crabe et du homard a connu en 2017 sa meilleure année en termes de valeur de débarqueme­nts, voilà que nos travailleu­rs saisonnier­s retombent à nouveau dans un trou noir qui menace l’économie de notre région. Je sympathise de tout coeur avec les saisonnier­s, mais j’ai parfois l’impression qu’ils se trompent de cible en attaquant de façon si virulente nos politicien­s fédéraux.

Les députés Serge Cormier, Jim Flannagan, René Arsenault et le ministre Dominic LeBlanc ont fait plus pour régler le sort des travailleu­rs saisonnier­s dans les six derniers mois que quiconque durant les vingt dernières années. Le premier ministre Trudeau a rempli sa promesse en début de mandat de réduire les heures d’admissibil­ité et de réduire de moitié les semaines d’attente. Il faut comprendre que des changement­s à la loi de l’assurance emploi, ça prend du temps, et jamais n’a-t’on vu un gouverneme­nt aussi sympathiqu­e à la cause des travailleu­rs saisonnier­s! Ce que je reproche aux leaders du mouvement ouvrier, c’est de viser les mauvaises cibles, comme si quelqu’un quelque part avait un agenda politique.

Parlons un peu des deux porte-paroles des saisonnier­s. Le premier, Jean Maurice Landry, est candidat néo-démocrate dans BathurstEs­t-Nipisiguit-St-Isidore, et le second, Fernand Thibodeau, qui, après avoir annoncé en grande pompe qu’il sera candidat néo-démocrate dans Tracadie, voit son congrès de mise en candidatur­e annulé moins de 24 heures avant la date prévue et nous annonce après qu’il ne sera pas candidat. Que s’est-il donc passé? On annonçait que les travailleu­rs saisonnier­s s’étaient trouvés un allié à Ottawa en la personne de Pierre Laliberté, le représenta­nt des employés sur la Commission de l’assurance-emploi. Après une brève vérificati­on, on constate que si ce M. Laliberté est un défenseur des travailleu­rs, il a aussi été candidat NPD à l’élection fédérale de 2005.

Ça sent la politique à plein nez! Il y a des gens qui ont sûrement avantage à ce que rien ne soit réglé avant les élections d’automne.

Travailleu­rs et travailleu­ses, le vrai coupable dans cette histoire n’est sûrement pas votre députation qui se débat sans compter pour régler votre problème. Les vrais coupables ne seraient-ils pas l’industrie de la transforma­tion et les pêcheurs qui, dans les cinq dernières années, ont vu leur revenu doubler pour une ressource qui appartient à tout le monde, mais dont la richesse ne semble pas se rendre aux travailleu­rs? Si les crabiers utilisaien­t l’argent qu’ils dépensent en frais légaux contre le gouverneme­nt fédéral pour bonifier le salaire des employés, y’en aurait pas de trou noir.

Un peu comme au temps des colonies, on voit les transforma­teurs, ainsi que les pêcheurs s’enrichir alors que le salaire des employés d’usines n’a à peu-près pas augmenté depuis 20 ans. Plus facile de chialer après le politicien que de dénoncer celui qui donne les gros timbres, n’est-ce pas? Observons ce qui va se passer dans les prochaines semaines, où, devant la crise de la baleine noire, les pêcheurs voudront capturer leur quota le plus vite possible. La saison du camping va être longue cette année! Bref, c’est toute la société qui doit réfléchir devant cette situation; regardons-nous dans le miroir, car il en va de l’avenir de nos régions.

D’où vient le trou noir qui affecte les travailleu­rs qui occupent des emplois saisonnier­s? D’après Francis McGuire, sous-ministre durant les années McKenna, c’est en partie dû au fait que les travailleu­rs du N.-B. sont prisonnier­s du piège de la dépendance à l’assurance-emploi répétitif.

Pendant que des emplois sont disponible­s dans la région, des revenus trop généreux d’assurance-emploi rivalisent avec de vrais emplois, créant une perte pour les entreprise­s qui ont besoin de travailleu­rs. Selon lui, le système précurseur à l’assurance-emploi que l’on connaît aujourd’hui n’avait jamais été prévu pour remplacer les emplois.

Toujours selon M. McGuire, des travailleu­rs locaux sont capables de vivre avec des emplois saisonnier­s comblés par un système d’assurance-emploi sans devoir chercher des emplois à temps plein. Entretemps, des entreprise­s tentent d’attirer des travailleu­rs de l’extérieur de la province.

Mon collègue chroniqueu­r m’a ouvert tout grande la porte pour en parler la semaine dernière en donnant l’exemple de Westco Sunnymel au Madawaska comme un exemple de réussite dont les libéraux veulent maintenant prendre le crédit. Ça prend du front tout le tour de la tête et une barre dans le dos.

M. Thériault était le conseiller principal et a été proactif avec Shawn Graham dans l’idée de s’opposer à la venue de Sunnymel. Ils ont même passé un projet de loi pour empêcher la compagnie de construire au N.-B. La compagnie Westco Sunnymel a dépensé des milliers de dollars en frais légaux et perdu quelques années à se battre contre un gouverneme­nt aveuglé par la partisaner­ie politique et qui voulait créer un trou noir. Ils ont ridiculisé les travailleu­rs du Madawaska en Chambre en les comparant à des poulets. Mon collègue chroniqueu­r était aussi conseiller principal de M. Graham dans le désastre financier Atcon lorsque des dizaines de millions de dollars ont disparu en plus de quelques autres décisions douteuses, faisant ainsi augmenter la dette provincial­e de quelques milliards.

Je comprends très bien la frustratio­n de mon collègue lorsque je parle de l’héritage du gouverneme­nt Graham, mais comme dirait celuici, c’est un incontourn­able. M. Thériault parle du dossier du chantier naval de Bas-Caraquet et de la création d’emplois. Je suis très fier pour les travailleu­rs de ce chantier qui ont par contre reçu plus de 30 millions $ pour la création de 75 emplois, selon le ministre lors de l’annonce.

Au Madawaska, le groupe Westco Sunnymel a créé plus de 300 emplois avec quelques centaines de milliers de dollars provenant du gouverneme­nt provincial.

Le trou noir de l’assurance-emploi a été créé et entretenu par des gouverneme­nts libéraux successifs qui veulent garder une partie de la population dépendante des programmes au lieu de favoriser leur indépendan­ce financière par des emplois à temps plein.

Je suis d’accord avec M. McGuire à l’effet que la solution doit venir des gouverneme­nts et de l’industrie. Les gouverneme­nts devraient aider les travailleu­ses et travailleu­rs qui peuvent et veulent travailler en facilitant l’accès aux emplois disponible­s, plutôt que d’encourager la dépendance financière pour des fins politiques.

 ??  ?? Des dizaines de travailleu­rs saisonnier­s ont participé à plusieurs manifestat­ions concernant le trou noir de l’assurance-emploi au cours des dernières semaines. - Archives
Des dizaines de travailleu­rs saisonnier­s ont participé à plusieurs manifestat­ions concernant le trou noir de l’assurance-emploi au cours des dernières semaines. - Archives
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada