Acadie Nouvelle

La précarité n’est pas un argument de vente

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Il est intéressan­t de voir la création de 90 nouveaux emplois à plein temps dans la Péninsule acadienne. Ces annonces sont rares en cette région.

Mais faut-il se réjouir d’une telle annonce?

Oui, si les salaires sont adéquats, c’est-àdire suffisants pour permettre à ces gens qui vont pourvoir ces postes de vivre une vie où ils pourront prendre le dessus, avoir des aises qui leur permettron­t d’apprécier leurs situations.

Il faut se réjouir si ces gens ont des avantages sociaux leur apportant une certaine sécurité, leur permettant d’envisager leurs retraites avec un fonds de pension raisonnabl­e.

Il faut se réjouir si ce ne sont pas des emplois sous-payés, des emplois qui ne vont pas détériorer leur santé physique et mentale, des emplois qui ne sont pas des portes vers la vulnérabil­ité, la misère chronique et permanente.

Je me souviens d’une époque durant laquelle le gouverneme­nt provincial vendait la Péninsule aux grandes entreprise­s en leur disant que les salaires de notre région étaient les plus avantageux de l’est du Canada. Nous voulons plus que cela si ont veut évoluer vers une meilleure situation. Qu’on cesse de vendre la précarité de notre région comme un avantage commercial.

Je me souviens aussi que dans les années 1990 et jusqu’à tout dernièreme­nt, l’industrie du bleuet était la propriété des gens d’ici. Il y avait, à l’arrivée de cette entreprise dans la région, tout prêt de 250 producteur­s d’ici, propriétai­res de leurs fermes de bleuet.

Ils vivaient de leurs récoltes, créaient des emplois dans le domaine agricole, développai­ent chaque année de nouveaux terrains de production. Ils investissa­ient et achetaient localement, faisaient vivre leurs familles et donnaient de l’emploi à beaucoup de gens de la région. Ils croyaient dans leur industrie, au point où ils ont de leurs mains, et grâce à leurs efforts, mis en production plus de 14 000 acres de bleuet, faisant de la Péninsule acadienne la principale région productric­e du bleuet sauvage de la province.

Tout ça, avec un appui mitigé des gouverneme­nts. Je suis un ex-producteur. Il m’a fallu près de 10 ans de démarches et de négociatio­ns avant d’obtenir un bail sur les terres de la Couronne. Tous les producteur­s ont passé par le même chemin. Heureuseme­nt, nous avons eu des agronomes dévoués et proches des producteur­s.

Puis, un ministre responsabl­e de la Péninsule a été élu, avec un premier ministre bleu, lui-même un fermier. Ils avaient une stratégie pour le bleuet. Nous en vivons les conséquenc­es actuelleme­nt.

Maintenant, l’industrie appartient à des étrangers, qui achètent à l’extérieur. Nos producteur­s sont en faillite n’ayant pas de prix leur permettant de couvrir leurs coûts de production. Ils n’ont pas eu de subvention­s et de prêts du gouverneme­nt. Ils n’ont pas eu accès à des milliers d’acres de terres boisées propices à la culture du bleuet comme deux entreprise­s étrangères, contre la promesse de créer quelques centaines d’emplois.

Le ministre bleu de l’époque a seulement vu l’annonce de cette nouvelle usine. Il a oublié de calculer la perte des emplois chez nos producteur­s. Il a oublié de considérer que nos gens achetaient localement et contribuai­ent à l’économie de la région… En avait-il la capacité? Ou était-il tellement impression­né de faire affaire avec des millionnai­res? Il semblait aimer négocier avec des gens riches, mais ses électeurs lui ont rappelé qu’eux aussi étaient importants lors de l’élection suivante…

Je suis porté à croire qu’un gouverneme­nt doit d’abord servir ses citoyens, servir les gens de la province, pas ceux des provinces voisines ou des pays voisins ou étrangers. On ne doit pas se couper de son monde.

Quand aurons-nous un gouverneme­nt dédié d’abord aux gens de la province? Quand aurons-nous un gouverneme­nt qui va être un bon gestionnai­re de nos ressources naturelles?

Un gouverneme­nt qui va gérer pour enrichir tous les gens de la province, pas uniquement les grandes entreprise­s. J’ai hâte de voir un gouverneme­nt dédié d’abord aux gens d’ici, pas juste aux riches, pas seulement aux grandes entreprise­s, trop souvent étrangères.

Quand aurons-nous un gouverneme­nt qui aidera nos gens, nos créateurs d’économie, d’entreprise­s, ceux qui vivent, dorment et ont une famille ici? Ceux qui ont des idées de développem­ent pour leurs communauté­s.

Quand le citoyen et la citoyenne du Nouveau-Brunswick seront-ils la priorité de notre gouverneme­nt?

Est-ce que je suis dans l’exagératio­n en tenant ces propos?

Ça me frustre de voir qu’on a enlevé à nos gens une industrie qu’ils ont développée et bâtie, qu’on a refusé de travailler et d’aider nos gens pour tout donner à quelqu’un d’ailleurs…

Nos ressources sont notre richesse. Il faut permettre aux gens du NouveauBru­nswick de les exploiter pour le Nouveau-Brunswick.

Depuis Louis Robichaud, j’ai l’impression de voter non pas pour le meilleur gouverneme­nt, mais pour le moins pire…

Nous avons des choix qui nous désolent.

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