MONCTON: QUAND LE VOISINAGE NE VEUT PLUS DES ITINÉRANTS
Le programme d’intervention auprès des sans-abris du YMCA de Moncton est forcé de quitter ses locaux sous la pression du voisinage. Le propriétaire des lieux a résilié le bail à la suite des plaintes concernant la clientèle.
Cela fait 17 ans que le programme ReBrancher vient en aide aux sans-abris depuis son centre du 281 rue St. George, un immeuble partagé avec le bureau de Postes Canada. Les personnes vulnérables peuvent y trouver des vêtements, de la nourriture et des produits d’hygiène. Cependant, leur présence dérange. L’organisme a reçu le mois dernier une lettre du propriétaire qui a décidé de résilier le bail plus tôt, soit le 31 mai au lieu de la fin de 2018.
Cela faisait plusieurs années que des résidents et des entreprises avoisinantes se plaignaient de l’existence du centre. La GRC est intervenue à quelques reprises pour régler des conflits.
La décision a tout de même surpris Lisa Ryan, directrice par intérim du programme.
«Nous avons essayé de travailler à atténuer les préoccupations en installant des caméras vidéo, en augmentant la supervision sur place et en encourageant les clients à éviter de se rassembler autour de l’immeuble, assure-t-elle. Malheureusement, ces efforts n’ont pas calmé les personnes préoccupées. Nous espérons trouver un endroit abordable et durable où déménager, car le problème de l’itinérance ne disparaîtra certainement pas.»
L’organisme a jusqu’à la fin mai pour trouver un nouvel emplacement. Lisa Ryan espère pouvoir s’installer ailleurs dans le quartier, particulièrement touché par la pauvreté.
«Nous sommes très déçus et nous espérons
obtenir l’aide de la collectivité pour trouver un nouveau chez soi», lance-t-elle.
Mis sur pied par le YMCA en 2001, le programme d’intervention dans la rue devait répondre aux besoins urgents des itinérants qui réclamaient de l’aide.
Désormais, l’équipe de ReBrancher les aide aussi à entrer en contact avec les bonnes ressources communautaires et à se sortir de leur situation à plus long terme.
DÉPLACER LE PROBLÈME
Depuis 2016, Michel Mondesir va à la rencontre des sans-abris dans les rues de Moncton. L’intervenant communautaire du YMCA engage le dialogue pour leur apporter un soutien et les guider vers les ressources en matière d’hébergement, d’insertion ou de santé.
La nouvelle de l’éviction l’a ébranlé «C’est choquant, lâche-t-il. Ça ne va pas être facile de trouver un autre endroit...»
Michel Mondesir reproche à la communauté de vouloir déplacer le problème de l’itinérance plutôt que de s’y attaquer.
«Beaucoup de personnes ne veulent pas voir les pauvres. Il y a comme un tabou, c’est triste et ce n’est pas humain. La pauvreté existe et continuera d’exister.»
L’intervenant croit que les services offerts par le YMCA sont plus nécessaires que jamais.
En 2017, le centre d’accueil a reçu plus de 5750 visites.
Ce sont même 307 clients qui sont venus pour la première fois l’an dernier, ce qui représente une augmentation de 20% par rapport à 2016.
L’équipe envisage actuellement de changer sa façon de faire pour ne pas se confronter à la même situation à l’avenir.
Les employés pourraient être amenés à ne plus accueillir les clients dans les locaux, mais à les rencontrer davantage dans la rue.