FRANCE DAIGLE: LE MYSTÈRE DES FACTURES DE ROGERS P. 6
Mardi soir, les élus de la Ville de Moncton ont décidé de tourner le dos à Croix Bleue Medavie, une entreprise située en face de l’édifice municipal, en choisissant de nouveaux fournisseurs en matière d’assurances collectives. C’était la «bonne décision à
La décision a été prise à la suite d’un processus d’appel d’offres auquel plusieurs entreprises ont participé. Une évaluation rigoureuse en trois étapes a permis de choisir trois nouveaux fournisseurs.
Le régime collectif d’avantages sociaux des employés coûtait à la municipalité 4,52 millions $ par année.
La facture du nouveau régime sera de 3,93 millions $, c’est-à-dire que des économies de 590 000$ par année seront générées.
«Ce n’est pas la décision la plus agréable, mais en même temps c’est la décision qui respecte la loi et c’est la décision qui est la plus logique et la plus responsable du point de vue financier», a analysé Frédérick Dion, directeur général de l’AFMNB.
La Loi sur la passation des marchés publics du Nouveau-Brunswick oblige les organismes publics, comme les municipalités, à suivre un processus rigoureux lorsque vient le temps d’acheter des services ou des produits dispendieux.
Ce processus est ouvert et transparent. Chaque entreprise désireuse d’offrir ses services a accès aux critères de la municipalité et à la grille d’évaluation utilisée pour évaluer les propositions des soumissionnaires.
Dans le cas de Moncton, la grille d’évaluation a été conçue par la municipalité en collaboration avec la firme Morneau Shepell, mais elle est aussi encadrée par la loi provinciale. Par exemple, une entreprise locale ne peut recevoir plus de 5% des points lors de l’évaluation de sa soumission en raison de sa proximité.
«La règle générale est qu’on ne peut pas favoriser un soumissionnaire d’une province plutôt qu’un autre à moins qu’il fasse partie d’une exception sous un accord de libre-échange. Nous n’avons pas fait une analyse afin de savoir si nous aurions pu utiliser cette exception parce que ça n’a pas été dans notre pratique d’utiliser une préférence locale au cours des dernières années, voire une décennie», a expliqué l’avocat de la Ville de Moncton, Nick Robichaud.
Chaque soumissionnaire a accès aux mêmes documents et à la même liste de critères pour «assurer un traitement équitable» de tous les partis impliqués dans le processus. En ne respectant pas le processus et en favorisant une compagnie locale plutôt qu’une autre, la Ville risque de faire face à la justice.
«LA MUNICIPALITÉ A BIEN AGI»
Pour M. Dion, le processus d’appel d’offres et la loi sur la passation des marchés publics sont nécessaires à une gestion transparente des municipalités.
«Si la municipalité ne va pas en appel d’offres, on va l’accuser de proximité, de collusion… Quand elle est transparente et qu’elle fait les exercices en fonction des lois en place, on lui reproche et on lui rappelle qu’elle devrait acheter local. À un moment donné, il faut se brancher et savoir ce qu’on veut. La loi, elle est là. D’un point de vue légal et moral, la municipalité a bien agi», a-t-il confié.
L’AFMNB est passée par ce processus il n’y a pas si longtemps. L’association offre un régime d’assurances pour les dommages à une quarantaine de municipalités au Nouveau-Brunswick. En testant les marchés et en faisant un appel d’offres, les membres ont économisé environ un million de dollars.
«Si tu subventionnes une entreprise locale, ça veut dire que tu factures davantage les citoyens. Ça revient à ça», a précisé M. Dion.
De son côté, Croix Bleue Medavie a décliné notre demande d’entrevue, mais a fait part de sa déception par courriel.
«Nous sommes déçus que la Ville choisisse de ne pas renouveler notre contrat pour les garanties de soins de santé compte tenu de notre présence importante à Moncton et de nos nombreux employés qui y vivent», a indiqué Dave Adams, directeur de marché pour le Canada atlantique.
«Si nous octroyons le contrat à un soumissionnaire sur le fait qu’il est basé à Moncton sans le communiquer, ce n’est pas juste pour les autres puisqu’ils n’étaient pas au courant que cela était pris en considération. À ce moment, nous sommes vulnérables à une action en justice», a précisé Me Robichaud.