Privatisation dans les hôpitaux: le projet est au point mort
Le gouvernement Gallant est désormais prêt à changer son fusil d’épaule dans le dossier de la privatisation de l’entretien ménager, des services alimentaires et du transport des patients dans les hôpitaux.
Le ministre de la Santé n’écarte plus la possibilité d’abandonner le projet de privatisation des services non médicaux. La province comptait confier leur gestion pendant 10 ans à la multinationale française Sodexo.
Les négociations sont en suspens, a confirmé le ministre de la Santé Benoît Bourque en entrevue avec l’Acadie Nouvelle.
Le ministre a adopté une position moins ferme que celle de son prédécesseur, Victor Boudreau. Ce dernier avait répété pendant plusieurs mois qu’il ne reculerait pas et que la réforme serait menée à son terme, malgré l’opposition de Vitalité et des syndicats hospitaliers.
Sous la gouverne de Benoît Bourque, un groupe de travail formé de représentants du ministère, des deux régies de santé et des syndicats a été créé pour se pencher sur la question et évaluer d’autres options.
«On est en train de voir quelles sont les façons les plus efficaces d’offrir ces services», précise le ministre.
Si le ministre entend laisser une place à la consultation, le projet de privatisation n’est pas pour autant définitivement enterré.
«On va laisser le groupe de travail faire son étude. On regardera les recommandations et on prendra une décision à ce moment-là», affirme Benoît Bourque.
«Ce qui est important, c’est que les NéoBrunswickois aient le meilleur rapport qualité-prix et le meilleur service possible.»
Aucun échéancier n’a été fixé par le ministre. Il indique qu’une décision sera prise dans les prochains mois, «potentiellement» avant les élections de septembre 2018.
Ce changement de ton est bien reçu par la direction du Réseau de santé Vitalité.
«On voit ça de façon très positive, on avait clairement fait la démonstration que Vitalité était capable de faire mieux que le privé», avance le PDG, Gilles Lanteigne.
En juin 2016, le conseil d’administration de Vitalité s’était positionné à l’unanimité contre la privatisation. La direction de la régie francophone estimait pouvoir économiser à l’interne 25,7 millions $ sur 10 ans, alors que les épargnes de la proposition de Sodexo sont évaluées à 22,2 millions $.
«Nous sommes heureux que le ministère semble avoir écouté notre proposition», se félicite M. Lanteigne. Il croit que le réseau Vitalité est le mieux placé pour offrir de la nourriture saine.
Le réseau a d’ailleurs commencé à revoir en profondeur l’offre de ces cafétérias pour servir des repas plus équilibrés: adieu les frites, le poulet frit, les boissons sucrées et les pâtisseries.
«Pour nous, l’alimentation fait partie intégrante des soins, insiste Gilles Lanteigne. C’est au centre de l’expérience des patients. C’est l’occasion de les éduquer, de leur montrer ce qu’est une saine alimentation.»
La proposition de Sodexo prévoit des licenciements tandis que celle de Vitalité ne suggère que le non-remplacement des départs pour supprimer certains postes.
Les deux plans comprennent la fermeture de six cafétérias qui ne sont pas rentables: Sainte-Anne-de-Kent, Saint-Quentin, Grand-Sault, Campbellton, Caraquet et Lamèque. L’entreprise privée proposait en plus la fermeture de la cafétéria de Tracadie.
Daniel Légère, du Syndicat canadien de la fonction publique, préfère attendre avant de crier victoire.
«J’applaudirai M. Bourque quand le gouvernement fera un pas de plus et décidera qu’il n’y aura pas de privatisation, lance-t-il. On veut une décision finale avant les élections.»
Le syndicat entend peser de tout son poids pour faire de ce dossier un enjeu de la prochaine campagne électorale. Son porte-parole s’oppose à toute privatisation dans le domaine de la santé.
«Le secteur privé ne cherche pas juste à délivrer des services. Leur but c’est de réaliser des profits pour leurs actionnaires.»
«Le contrat n’est pas encore signé. On ne va pas de l’avant pour le moment.»
Avec la collaboration du Mathieu Roy-Comeau journaliste