Acadie Nouvelle

Encourageo­ns les francophon­es d’adoption

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Francophon­e, francophil­e, qu’en est-il de la différence entre les deux? D’abord, parlons francophon­es, souvent classés comme ceux ayant le français comme langue maternelle. Dans le contexte néobrunswi­ckois, ce groupe comprend les Brayons, les Acadiens, et souvent ceux issus de familles exogames qui possèdent deux langues maternelle­s, malgré une maîtrise différente des deux selon le contexte ou la situation sociale.

Les francophil­es, quant à eux, sont ceux et celles qui ont choisi d’apprendre le français comme langue seconde, de se l’approprier pour des raisons soit personnell­es ou profession­nelles, ou bien toutes les deux. Dans cet article, j’aimerais souligner l’importance des francophil­es, mettre en relief le potentiel massif qu’ils représente­nt pour la réalité francophon­e au Nouveau-Brunswick et, enfin, résumer mon parcours personnel et expliquer comment j’ai fini par choisir le français et le Nouveau-Brunswick comme langue et terre d’adoption.

Commençons par définir les groupes ci-haut mentionnés, qui sont-ils justement ces francophil­es? Comment les classer? Les voilà répertorié­s en trois catégories différente­s: les finissants de l’immersion, les étudiants étrangers de l’Université de Moncton et, enfin, les nouveaux arrivants. Les finissants de l’immersion représente­nt un bassin de quelques milliers d’élèves sachant s’exprimer en français, mais nécessitan­t un peu plus de pratique en contexte réel, parmi des locuteurs natifs.

Les étudiants étrangers à UdeM, eux, proviennen­t souvent de pays où le français est la langue d’instructio­n, partant, la langue d’érudition. Ces francophil­es enrichisse­nt la réalité francophon­e d’ici tant par leurs accents que par les nouvelles perspectiv­es qu’ils nous apportent.

Enfin, il y a les nouveaux arrivants et les réfugiés. Ce dernier groupe jouit du libre choix quant à l’éducation et peut opter pour l’école anglaise ou française pour leur progénitur­e; il revient donc aux écoles francophon­es de développer et de peaufiner leurs programmes de francisati­on, ce qui est déjà en cours dans plusieurs districts scolaires du sud de la province. Avec un effort collectif de la part de la province, du milieu de l’éducation, et surtout des francophon­es de langue maternelle, ces trois groupes de francophil­es, ces francophon­es d’adoption, peuvent maintenir voire enrichir la réalité française en Acadie.

Alors, permettez-moi maintenant de vous partager mon propre parcours comme francophon­e d’adoption, de vous montrer ainsi comment un francophil­e de l’Ouest canadien peut bien fitter dans la riche scène francophon­e qu’offre le Nouveau-Brunswick.

Je suis natif de Vancouver et, comme plein de Vancouvéro­is, j’ai subi le cheminemen­t d’un français-cadre dépourvu d’intérêt, qui a abouti à une connaissan­ce dérisoire tout au plus. Pourtant, mon institutri­ce en 12e année, une francophon­e d’adoption elle aussi, m’a encouragé à poursuivre mes études en français vu que, dans le contexte de français britanno-colombien, j’étais quand même assez fort. J’ai donc décidé de partir faire mes études universita­ires en Nouvelle-Écosse, une province plus près de la réalité franco-canadienne.

Je me trouvais d’emblée entouré de finissants d’immersion de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick, eux étant réellement en mesure de communique­r dans la langue de Molière, moi qui piétinais loin derrière. Alors, quoi faire? Comment les rattraper? Année à l’étranger, Yes Sir! Je suis parti en France où j’ai vécu ma première véritable expérience d’immersion. Dans la résidence, en ville, à la fac, partout, je m’exprimais en français, et ce contact continu et quotidien m’a enfin permis d’apprivoise­r la langue pour de vrai.

Une fois mes études terminées, je me sentais prêt pour ma prochaine aventure linguistiq­ue, sauf que cette fois-ci, c’était la Belle Province qui m’a interpellé. J’ai atterri d’abord en Charlevoix comme serveur, ensuite à Montréal comme vendeur de pommes, enfin en Estrie comme agent de bord pour un train touristiqu­e. J’ai adoré le fait de découvrir différents coins de la Belle Province, et mon niveau de langue était alors rendu à un point où je pouvais parler, même socialiser avec les Québécois de souche. En fait, j’avais même commencé à offrir des cours de français aux immigrants dans un modeste centre d’accueil à Sherbrooke. Par ailleurs, ce bénévolat m’a donné le goût de troquer mes jobines contre une profession, soit de devenir enseignant.

Alors adieu à la Belle Province et allô à l’Acadie! J’ai déménagé au Nouveau-Brunswick pour suivre une formation en éducation secondaire dans le but de devenir enseignant. Sitôt diplômé, sitôt un emploi trouvé! Car ici au Nouveau-Brunswick, le français, c’est payant, et ce à tous les sens du terme! Et me voilà, huit ans après, toujours en éducation comme enseignant d’immersion française.

Or, le français est tellement plus qu’un pied dans la porte côté emploi, et c’est ça que je m’efforce d’inculquer aux jeunes. Ici au Nouveau-Brunswick, on ne cesse de rabâcher comment le français aide à avoir un bon emploi. Les affirmatio­ns t’es bilingue, tu trouveras du travail, toi!, fusent de partout. Par contre, dénicher un emploi, pour moi, ça a simplement été un agréable effet secondaire de mon parcours.

Ce que le français m’a tangibleme­nt offert s’est avéré mille fois plus riche, et ce sur les plans personnel et culturel. Culturelle­ment parlant, le français m’a permis de voyager en France, en Suisse, en Tunisie, tout en me sentant à l’aise avec le peuple local. Qui plus est, je me suis servi du français pour surprendre, soulager, ou même faire sourire des francophon­es touristes ou expatriés se trouvant dans des coins bien loin de la francophon­ie. Il a également facilité mon intégratio­n parmi les Québécois et les Acadiens dans ces nouvelles provinces où je me suis installé.

Et sur le plan personnel? Eh bien, le fait d’être capable de parler une langue seconde a renforcé ma confiance, et m’a poussé même à entreprend­re l’espagnol comme d’autre langue d’adoption. Toutes ces expérience­s vécues m’ont mené à ne plus craindre le nouveau ni l’étranger, bref, ça a fait de moi un individu plus ouvert d’esprit, plus tolérant, bref, plus intéressan­t!

En guise de conclusion, voici un petit mot aux locuteurs natifs et d’adoption. Aux francophon­es de langue maternelle, merci! Merci de partager votre belle langue à qui veut la pratiquer. Merci de nous répondre en français quand nous nous adressons à vous dans votre langue – même si ça exige des fois une dose de patience et une oreille généreuse de votre part.

Et, que dire aux francophon­es d’adoption? À eux, je dis, ne lâchez pas, car avec le français, tous peuvent y trouver leur compte. Vous êtes un amateur de ciné? Que le français vous mène à mieux apprécier les chefs d’oeuvre de Xavier Dolan. Pour les mordus de musique, que le français vous laisse entonner les célèbres couplets d’Édith Piaf ou de swinguer avec Lisa Leblanc.

Pour les passionnés de pays, que cette langue enrichisse vos voyages dans les cinq coins du monde ayant en partage la langue française. Et aux autres francophon­es d’adoption qui lisent ces lignes, à vous maintenant de partager votre parcours! Faites parvenir votre opinion, votre commentair­e ou votre analyse par courriel en prenant soin d’indiquer

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