OTTAWA INVITÉ À ACCORDER UN STATUT SPÉCIAL AU N.-B.
La SANB propose l’adoption de changements majeurs à la Loi sur les langues officielles. Devant le comité sénatorial, lundi soir à Ottawa, ses dirigeants ont argumenté qu’il est grand temps que le Nouveau-Brunswick cesse d’être traité comme les autres province.
Le président par intérim de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick, Joey Couturier, ainsi que deux de ses collègues étaient de passage dans la capitale nationale afin de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles.
Il mène présentement une ambitieuse étude sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles (LLO), adoptée en 1969 et qui n’a subi qu’une seule révision majeure depuis (en 1988).
Dans un communiqué de presse publié quelques heures avant sa comparution, Joey Couturier a indiqué que la contribution de son organisme s’inscrit «dans une démarche qui cherche à donner au Nouveau-Brunswick la reconnaissance qui lui revient».
Il a qualifié le mémoire de «cri du coeur pour la cohérence en ce qui a trait au Nouveau-Brunswick dans le régime constitutionnel canadien»
Dans le mémoire en question, dont l’Acadie Nouvelle a obtenu copie, la SANB propose que le caractère unique de du N.-B. en matière linguistique soit inscrit noir sur blanc dans la LLO.
Elle note les choses ont bien changé depuis l’adoption de la LLO en 1969, puisque l’égalité des droits linguistiques des anglophones et des francophones du Nouveau-Brunswick est désormais codifiée dans la Charte des droits et libertés du Canada (qui est enchâssée dans la Constitution). Aucune autre province ne peut dire la même chose.
«À vrai dire, l’entièreté du régime constitutionnel du Nouveau-Brunswick en matière de droits linguistiques, un régime de bilinguisme institutionnel tout à fait unique au pays et l’objet d’une codification détaillée dans la Charte, est ignorée dans la LLO. Cette incongruité doit être réglée!»
Concrètement, la SANB demande plusieurs changements à la LLO qui pourraient avoir des conséquences importantes au Nouveau-Brunswick. On ne parle pas simplement d’ajouter des virgules ou d’apporter des changements esthétiques.
PARTOUT AU N.-B.
Dans sa forme actuelle, la Loi sur les langues officielles du Canada contraint les institutions fédérales à offrir des services en français partout au pays, mais avec des exceptions.
Par exemple, la LLO prévoit que ces institutions doivent veiller à ce que le public puisse communiquer et recevoir des services auprès de leur siège (ou de leur administration centrale) dans les deux langues officielles.
C’est une autre histoire pour les bureaux ou les points de service répartis un peu partout dans le pays. Dans ces cas, les institutions doivent fournir des services bilingues si leur mandat le justifie ou s’il y a une «demande importante».
Afin de déterminer si un bureau donné doit être désigné comme étant bilingue, les institutions fédérales doivent suivre un règlement qui définit ce qui constitue au juste une «demande importante».
La SANB avance que «le gouvernement fédéral fait violence à l’esprit de la Charte (des droits et libertés) et à la spécificité du Nouveau-Brunswick lorsqu’il calcule, tant bien que mal, là où la demande pourrait ne pas être suffisamment importante pour justifier la prestation de services et les communications dans les deux langues officielles».
Le cadre réglementaire actuel «encourage les institutions fédérales à négocier leurs obligations linguistiques à la baisse», selon la SANB.
Dans son mémoire, elle explique que cette façon de faire n’a pas sa place au NouveauBrunswick, qui compte une minorité francophone de 32%. Selon elle, il y a une «demande importante» partout dans la province.
Elle souhaite que la loi soit modifiée pour que «tous les bureaux des institutions fédérales situés au Nouveau-Brunswick», sans exception, soient contraints d’offrir des services bilingues.
MAINTENIR L’ÉQUILIBRE LINGUISTIQUE
L’un des autres axes majeurs dans laquelle la SANB s’engage dans son mémoire est l’immigration et son impact sur l’équilibre linguistique au Nouveau-Brunswick.
C’est qu’à l’heure actuelle, malgré les plans et les objectifs que se sont donnés les gouvernements, le pourcentage d’immigrants francophones est moindre que le pourcentage de francophones dans la province.
En 2016, seuls 17% des immigrants au Nouveau-Brunswick étaient des francophones, tandis que la minorité francophone représentait 32% de la population. Cela «trouble» l’équilibre linguistique, selon la SANB.
Dans le mémoire qu’elle a présenté au comité sénatorial lundi en début de soirée, elle avance que «la communauté francophone du N.-B. n’a pas autant profité de l’immigration que la communauté anglophone».
Dans ce cas là, comme pour les services bilingues offerts dans les bureaux des institutions fédérales, la SANB souhaite que la Loi sur les langues officielles reconnaisse que le Nouveau-Brunswick est différent des autres provinces.
Elle propose qu’un article abordant cette question soit ajoutée à la LLO notamment pour obliger Ottawa à tenir «tenir compte de l’équilibre linguistique spécifique de la province» dans «l’élaboration et l’application de ses politiques en matière d’immigration».