Protection des baleines noires: LeBlanc ne reculera pas
Le ministre des Pêches et des Océans du Canada, Dominic LeBlanc, n’entend pas faire marche arrière sur les mesures prises pour protéger les baleines noires, une espèce menacée d’extinction. Une importante zone de 14 000 km carrés dans le sud du golfe du Saint-Laurent restera donc fermée à la pêche au crabe des neiges à compter du 28 avril.
Le ministre LeBlanc s’est déplacé à Shippagan jeudi afin de rencontrer des intervenants du milieu de la pêche au crabe et au homard ainsi que d’autres représentants économiques régionaux.
Tous espéraient un assouplissement des mesures annoncées par Ottawa.
«On s’attendait à ce que le ministre LeBlanc soit réceptif à nos idées, étant donné qu’il a pris la peine de se déplacer ici pour nous rencontrer. On s’attendait à de bonnes nouvelles. Finalement, il est venu nous expliquer les raisons pourquoi il n’était plus en mesure de changer sa position», regrette Jean Lanteigne, directeur général de la Fédération régionale acadienne des pêcheurs professionnels (FRAPP).
Au cours des dernières semaines, l’équipe du ministre LeBlanc a sollicité l’avis de scientifiques canadiens et américains sur la question des baleines noires. Il est parvenu à la conclusion qu’un changement de cap pourrait avoir un impact négatif sur l’économie.
Il craint notamment que le décès d’une autre baleine noire occasionne une fermeture du marché américain, en raison du Marine Mammal Protection Act, qui permet aux États-Unis d’imposer un moratoire si un pays ne prend pas suffisamment d’actions pour protéger une espèce en voie de disparition.
Environ 80% des crabes pêchés dans le golfe du Saint-Laurent sont exportés vers les États-Unis, précise M. LeBlanc.
«Alors imaginez-vous les conséquences économiques à long terme si le Canada ne prend pas toutes les mesures possibles pour protéger cette baleine.»
La mort de 17 baleines noires au large de la côte est du Canada et des ÉtatsUnis, dont 12 dans le golfe du SaintLaurent en 2017, a déjà entraîné des répercussions. En mars, l’industrie canadienne de la pêche au crabe des neiges a perdu sa certification durable du Marine Stewardship Council, un organisme international.
«On va travailler fort en partenariat avec l’industrie pour s’assurer que la suspension soit pour cette année seulement. La suspension pourrait avoir des conséquences économiques en terme d’accès au marché si nous ne prenons pas toutes les mesures nécessaires cette année. La certification est aussi menacée dans les années à venir.»
La protection des baleines noires est aussi prise très au sérieux par Serge Cormier, mais le député d’Acadie-Bathurst s’engage à ne pas laisser tomber l’industrie de la pêche du Canada Atlantique.
«La prochaine saison va poser des défis, mais les mesures qu’on prend le sont pour le futur de cette industrie. Imaginez l’impact d’une interdiction de nos produits aux États-Unis. J’ai rencontré des intervenants de l’industrie d’ici, à plusieurs reprises, et ils nous ont proposé des solutions, mais le fait de revenir sur notre décision pourrait avoir des conséquences majeures. On va tout faire pour protéger ces mammifères, mais on va aussi soutenir l’industrie.»
Bien que la visite du ministre LeBlanc dans la Péninsule acadienne ait initialement suscité de grands espoirs, les acteurs de l’industrie de la pêche se croisent maintenant les doigts en espérant qu’il n’y aura pas d’incident majeur cette année.
«Il faut pouvoir passer à autre chose. On va essayer de maximiser cette pêche tout en sortant de là correctement, sans qu’il ait d’incident impliquant une baleine à déplorer. On sait que ce serait problématique pour nous», dit Jean Lanteigne de la FRAPP.
L’homme rappelle d’ailleurs que l’industrie de la pêche au crabe a déjà connu des soubresauts.
«Je pense qu’on va être capable de se tourner de bord. On va sensibiliser nos pêcheurs à l’importance d’être le plus prudent possible.»
En raison de l’état des glaces, aucune date n’a encore fixé pour le début de la saison de pêche au crabe des neiges. Jean Lanteigne prévoit maintenant que les pêcheurs puissent prendre la mer seulement à compter du début du mois de mai.