Place à la scène littéraire émergente au féminin
La soirée Prélude du Festival Frye ouvre une fenêtre sur de nouvelles voix de la littérature. On les dit émergentes, mais cela ne les empêche pas de porter des univers personnels bien assumés. Portraits de Julie Aubé, Brigitte Lavallée et Sheedy Petit Jean.
La passion d’écrire et le rôle crucial que joue la poésie dans leur vie relient ces trois auteures qui empruntent différentes formes d’art.
DE LA MUSIQUE À LA POÉSIE
Bien connue sur la scène musicale comme étant l’une des trois Hay Babies, Julie Aubé mène aussi une carrière solo en écriture et en musique. En plus de son album solo Joie de
vivre sorti en 2017, l’artiste de Memramcook a publié en 2016 un premier recueil de poésie La poétrie de l’écrivante inspiré de son parcours d’artiste. Même si elle se consacre davantage à sa musique actuellement, avec un album solo et un disque des Hay Babies en préparation, l’écriture ne s’arrête pas à la chanson.
«J’essaie d’écrire des chansons, mais des fois, je réalise que je n’ai pas envie de mettre de la musique dessus ou que le texte n’entre pas dans la mélodie, ça devient alors des poèmes.»
Pour la soirée Prélude, elle envisage de lire des textes tirés de son recueil. Celle qui adore performer devant public estime qu’elle n’a pas eu souvent l’occasion de présenter les poèmes de son recueil depuis sa parution. En publiant à compte d’auteur, elle admet que c’est plus difficile de rejoindre un vaste public. Ce n’est pas comme dans le monde de la musique. La reconnaissance est plus grande à l’égard d’un disque autoproduit que d’un ouvrage littéraire, note-t-elle.
«En littérature, on dirait qu’il y a plus de règles. Quand on autopublie un livre, ça ne veut presque rien dire. Si les lecteurs ne te connaissent pas personnellement, le livre peut demeurer inconnu.»
Or, Julie Aubé précise qu’elle n’écrit pas de la poésie dans un dessein lucratif ni pour se faire connaître, mais plutôt pour exprimer son élan créatif dans une autre forme. La poésie lui permet d’écrire tous les jours.
RÉCITS DE FEMME
Par un heureux hasard, la poète et dramaturge de Petit-Rocher, Brigitte Lavallée, a choisi de lire une suite poétique autour du thème de la femme. Cette suite poétique se retrouvera dans son tout premier recueil qu’elle prépare avec l’aide de la poète gaspésienne France Cayouette.
Celle qui baigne dans les livres puisqu’elle travaille dans les bibliothèques publiques de la région de Bathurst, espère toucher les gens avec sa poésie. Même son théâtre – tel que la pièce Lettres à Gabrielle – a une couleur poétique. Dans son projet de recueil, elle revient aux sources en abordant des sujets immensément personnels comme le décès de sa soeur jumelle, la maladie mentale, sa mère et l’enfant qu’elle n’a jamais eu.
Brigitte Lavallée raconte qu’elle a choisi la voie de la lumière pour aborder ces thématiques difficiles. La poète est ravie de pouvoir partager cette poésie introspective avec le public, bien qu’elle ressent une certaine nervosité parce que c’est très personnel.
«Je ne parle pas fort, mais c’est une position ferme dans ma vie de ferme. Voilà où je suis rendue avec mes réflexions et il y a aussi un côté universel à ça. Il y a forme de libération là-dedans.»
L’auteure qui voyage à travers différentes formes d’écriture a participé à des projets de la revue Ancrages et publié des textes dans des ouvrages collectifs, dont le plus récent Des
paysages sous nos paupières du cercle littéraire La Tourelle.
DES HISTOIRES À DORMIR DEBOUT
Sheedy Petit Jean écrit de la poésie et de courtes histoires inspirées un peu d’ellemême, de son vécu et de son entourage. Diplômée en sciences humaines (majeure en économie), l’artiste d’origine haïtienne qui habite Moncton depuis cinq ans confie que l’écriture et le chant constituent ses deux passions.
«C’est une manière de m’exprimer parce que la première chose que je fais quand je veux m’exprimer, je prends une plume et un cahier et j’écris», a-t-elle raconté.
Après avoir fait paraître un premier recueil en ligne avec la maison d’édition alternative française Edilivre, elle espère que son prochain recueil Histoires à dormir debout sera publié par une maison d’édition de l’Acadie.
«J’aimerais me forger davantage une place dans le milieu artistique acadien.»
Pour la soirée Prélude, elle a concocté un assemblage de textes spécialement pour l’occasion. De la fiction, du chant et de la poésie.
«J’ai plusieurs styles d’écriture en fonction de l’inspiration. Tout ce que j’écris est inspiré de moi et des gens autour de moi, mais c’est très fictif. Ce sont des histoires dont les personnages me ressemblent un peu.»
Enfin, la poète salue le Festival Frye d’ouvrir la porte aux poètes émergents. C’est l’occasion de faire des rencontres, de former un réseau et de susciter un intérêt pour son travail. Sheedy Petit Jean a aussi participé à des projets de la revue Ancrages.
La soirée Prélude, présentée jeudi à 20h30 au Centre culturel Aberdeen, réunira aussi les écrivaines Vanessa Hawkins, Sloane Ryan et Martha Vowles.