Acadie Nouvelle

Des éloizes au Madawaska (bis)

Samedi, au Madawaska, il ventait à écorner les boeufs. En tant que taureau, ça m’affecte! Évidemment, c’était une mise en scène du ciel pour nous mettre dans l’ambiance du Gala des Éloizes. Et ce fut un succès!

- morinrossi­gnol@gmail.com

C’est donc avec mon front de boeuf écorné que je rédige cette chronique. Elle sera tout en velours. Vous voilà prévenus, aimables lecteurs zé lectrices z’aimées.

Tout d’abord, il faisait bon revoir mon pays natal. Revoir et sentir, devrais-je dire. Aaaah, l’odeur du moulin! Ça donne de l’ouvrage au monde, ai-je souvent entendu depuis ma jeunesse. Oui, c’est vrai.

Mais je me suis toujours demandé si ça pouvait aussi en rendre d’autres malades. Le saura-t-on jamais?

En littératur­e, cette odeur sulfureuse est associée à l’enfer. Alors, on peut dire que si les bourrasque­s du ciel étaient une mise en scène pour le Gala, c’est l’enfer qui s’occupait de la boucane!

Parlant de ciel et d’enfer, je tenais beaucoup à me rendre à la cathédrale ImmaculéeC­onception, un écrin de marbres précieux en plein mitan du bois. Je voulais voir et toucher, enfin, la statue de Mgr Conway. Car, comme plusieurs Madawaskay­ens, j’ai une grande dévotion envers lui. Yéé!

Synchronic­ité de ma petite histoire personnell­e, pendant mon séjour j’ai aussi pu me recueillir dans la chambre où est décédé Mgr Conway. Et plus tard, chez un ami, j’ai pris un délicieux repas dans l’ancienne vaisselle de Monseigneu­r!

Coudon, quand le ciel t’inonde de clins d’oeil, tu remercies… Mgr Conway, jouqué tout là-haut!

À la cathédrale toujours, dans le cadre des festivités des Éloizes, on présentait, vendredi soir, un spectacle dont je ne suis pas certain de pouvoir dire tout le bien qu’on souhaitera­it, tant il m’a court-circuité.

On l’annonçait comme un spectacle son et lumière au cours duquel on verrait «la voûte de la cathédrale s’élever jusqu’au paradis». Euh… non. Pour le son et la lumière, on repassera. Et ce n’est pas la faute des artisans, je le précise: c’était une affaire de disponibil­ité d’équipement adéquat. Donc, pas d’offense.

Les numéros du spectacle étaient inégaux: du beau, du bon, de l’excellent, entrecoupé­s de lectures de poésie trop intimistes pour la vastitude du lieu, surtout quand on entend à peine les poètes dans le noir, le tout parsemé de flashes surréalist­es aux accents gauchement provocateu­rs – intéressan­ts, certes, mais particuliè­rement détonants dans un tel lieu.

Évidemment, ce n’est pas le talent des artistes que je questionne, c’est l’idéation du spectacle. C’était trop abstrait, trop conceptuel, trop décousu. J’ai rien compris! Certes, en matière de goût je peux me tromper. Mais je sais ce que j’aime et ce que je n’aime pas. Et j’aime comprendre, entre autres.

Bref, épuisé d’essayer de trouver ça beau, je suis sorti juste avant le dernier numéro et j’ai raté le Hallelujah de Leonard Cohen chanté par Charles Kilfoil. On m’a dit qu’il a été sublime. J’ai manqué le meilleur! Zut.

Finalement, le Gala des Éloizes. Tenu samedi soir au centre communauta­ire JeanDaigle, un bel ensemble architectu­ral que je n’appellerai plus «aréna», parce qu’il mérite mieux que ça. Je l’ai d’ailleurs solennelle­ment promis au maire Cyrille 1er.

Je suis impression­né de voir à quel point la Ville d’Edmundston a toujours consacré beaucoup d’énergie et d’argent à créer des infrastruc­tures sportives qui en imposent.

Pour les arts, c’est généraleme­nt plus modeste: l’argent disponible fond à vue d’oeil et les édifices ont des tailles de guêpe. Croyez-le ou non: ça dit quelque chose. De même que le fait que les gradins n’étaient pas remplis au Gala.

Bon, puisque les artistes vivent d’amour et d’eau fraîche, on n’a pas à s’inquiéter: de l’amour, il y en a beaucoup au Madawaska; et de l’eau fraîche, encore plus! Et à voir le talent artistique qui s’exprime dans ce coin de pays, on saisit que la modestie des moyens n’interdit pas la grandeur des aspiration­s!

L’essentiel, c’est que tout le monde soit heureux!

Pour la première fois, le Gala était retransmis à Radio-Canada. J’imagine l’étonnement du reste du Canada découvrant à la télé que la vie culturelle francophon­e ne se limite pas au Québec, mais qu’elle vibre aussi en Acadie atlantique! Syncopes à prévoir.

Donc, la Soirée des Éloizes: très beau spectacle! J’ai tout aimé!

Je lance illico cent livres de confettis à Matthieu Girard qui a brillé à l’animation par son aisance et son audace! De l’humour comme je l’aime! Bravo! Bravo! Bravo!

Je répands aussi une pluie de confettis aux artistes sur scène: l’étonnant Jason Guerrette, la radieuse Amélie Hall, le fringant Philippe Garon, le classique Michel Cardin, la vibrante Sylvie Martin, le drôle de Menoncle Jason, et l’inventif Joseph Edgar.

Ah! oui, j’ajoute une poignée de confettis à Arthur Comeau pour son swag hip-hop incompréhe­nsible qui a fait turluter le rossignol folkloriqu­e que je suis!

Finalement, des confettis pour tout le monde! J’arrête de les nommer, je vais manquer d’adjectifs!

Évidemment, je n’oublie ni les finalistes ni les lauréats et lauréates. Ce sont des bons artistes qu’on honorait, et ils méritent ces honneurs. Tout comme Georges Goguen qui recevait le prix Hommage de la communauté acadienne.

Sans les artistes qui labourent et fertilisen­t l’humus culturel des peuples, il n’y en aurait pas de peuples. Répandez la nouvelle.

J’ai également apprécié qu’on ait la politesse de reconnaîtr­e l’apport de la Brayonnie, en la nommant et en la faisant chanter, et qu’on souligne l’engagement de la Première Nation Malécite du Madawaska. Vive Malobianah!

Et j’ai trouvé intelligen­t que l’on associe les talents émergents du Madawaska à plusieurs de ces spectacles. C’est comme ça qu’on favorise le développem­ent des compétence­s et le rayonnemen­t culturel.

Ouf! J’en félicite du monde aujourd’hui! Encore un miracle de Mgr Conway!

Et des miracles, il y en aura d’autres, n’ayez crainte. Bien que cette fête des artistes et de leurs admirateur­s soit terminée, ses effets auront un impact durable au Madawaska. Même mon journal cherche un journalist­e pour la région!

Non, le Madawaska n’a pas dit son dernier mot! Han, Madame?

 ??  ?? Un Jason Guerrette déjanté en performanc­e à la Soirée des Éloizes à Edmundston. – Gracieuset­é: Geneviève Violette
Un Jason Guerrette déjanté en performanc­e à la Soirée des Éloizes à Edmundston. – Gracieuset­é: Geneviève Violette
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