Acadie Nouvelle

DES INSTITUTIO­NS MONTRENT LES DENTS

- pascal.raiche-nogue@acadienouv­elle.com @raichenogu­e

Quatre institutio­ns francophon­es reviennent à la charge dans le dossier de l’examen d’entrée à la profession infirmière, le NCLEX-RN. Elles exigent que des changement­s soient apportés rapidement.

L’Université de Moncton, le Réseau de santé Vitalité, le Collège communauta­ire du N.-B. et l’Associatio­n des collèges et université­s de la francophon­ie canadienne se serrent les coudes pour faire bouger les choses.

Lors d’une conférence de presse, lundi après-midi à Moncton, leurs dirigeants ont fait front commun pour hausser le ton face à une situation qu’ils qualifient d’injuste et de discrimina­toire.

Le PDG du Réseau de santé Vitalité, Gilles Lanteigne, a dit vouloir lancer un «message clair» au gouverneme­nt provincial et à l’Associatio­n des infirmière­s et infirmiers du Nouveau-Brunswick (AIINB).

«Il est urgent de régler le problème», a-t-il dit.

Il a expliqué comment les difficulté­s vécues par les infirmière­s francophon­es qui tentent de réussir l’examen NCLEX-RN (voir l’encadré) «nuisent considérab­lement» à ses efforts de recrutemen­t.

«Le Réseau est présenteme­nt à la recherche de plus de 60 personnes qualifiées pour pourvoir à des postes permanents d’infirmière­s, sans compter les besoins de remplaceme­nts. Il faut se l’avouer; l’écart entre les besoins et les perspectiv­es de recrutemen­t dans les années à venir nous préoccupen­t grandement.»

Le recteur par intérim de l’Université de Moncton, Jacques Paul Couturier, n’a pas mâché ses mots lors de son interventi­on.

«Nous sommes ici pour mettre en lumière la violation des droits linguistiq­ues et la discrimina­tion systématiq­ue qui sont subies par les francophon­es du Nouveau-Brunswick», at-il dit.

Il a aussi indiqué avoir rencontré des représenta­nts de l’AIINB, lundi matin, pour leur passer le message qu’il est nécessaire d’agir le plus rapidement possible et d’adopter un autre examen d’accès à la profession. La discussion a été «directe» et «franche», selon lui.

Jacques Paul Couturier dit leur avoir rappelé qu’au final, il s’agit «d’une question de respect des droits linguistiq­ues des étudiantes et des étudiants francophon­es».

Il leur a aussi indiqué qu’il tient absolument à ce que l’AIINB ne néglige pas les droits et les besoins des diplômés qui ont fait les frais de l’examen NCLEX-RN depuis son adoption, en 2015.

«Il ne s’agit pas simplement de poser un regard prospectif et de penser aux futurs diplômés, mais il faut aussi que la solution qui sera proposée tienne compte des diplômés depuis 2015.»

La PDG du CCNB, Liane Roy, elle aussi ajouté sa voix, et ce, même si les diplômés de son institutio­n ne sont pas directemen­t touchés par les lacunes de l’examen NCLEX-RN (vu que le CCNB n’offre pas de programme de sciences infirmière­s).

«Dans un contexte où il y a pénurie d’infirmière­s et infirmiers dans la province, cette situation n’est pas acceptable et le gouverneme­nt du Nouveau-Brunswick doit rapidement prendre des mesures afin de rectifier la situation», a-t-elle dit.

La directrice générale de l’Associatio­n des collèges et université­s de la francophon­ie canadienne, Lynn Brouillett­e, a pour sa part mis l’épaule à la roue par vidéoconfé­rence.

Elle a affirmé que les problèmes amenés par l’adoption du NCLEX-RN (qui est utilisé dans toutes les provinces sauf le Québec) touchent «tous les étudiants des écoles de sciences infirmière­s au pays qui choisissen­t d’étudier en français» et «mettent en péril l’avenir des soins de santé en français au Canada».

«Aujourd’hui, nous demandons la création d’un examen pancanadie­n réellement bilingue qui évalue les compétence­s des candidats dans un contexte canadien», a-t-elle tranché.

Comme le rapportait l’Acadie Nouvelle plus tôt ce mois-ci, un comité consultati­f national planche présenteme­nt sur un examen alternatif. Cette solution de remplaceme­nt pourrait être prête dès septembre 2019. «TRISTESSE ET IMPUISSANC­E»

Des diplômées du programme de sciences infirmière­s de l’U de M qui ont échoué au fameux examen NCLEX-RN à plusieurs reprises s’étaient déplacées au CHU Dumont, lundi, afin d’appuyer les quatre institutio­ns.

Comme elles l’avaient fait le mois dernier en conférence de presse à Tracadie, ces femmes originaire­s de la Péninsule acadienne ont lancé un cri du coeur.

L’une d’elles, Pamela St-Coeur Leclair, a subi 11 échecs; dix en français et un en anglais. Elle dit avoir tout essayé, mais le manque de ressources en français a été un obstacle majeur à sa réussite.

Aujourd’hui, trois ans après avoir obtenu son diplôme, le temps presse et elle craint de devoir faire une croix sur sa carrière de rêve.

«Le 31 juillet est ma date d’échéance. Un dernier essai est à ma portée, mais pour l’instant j’ignore si j’en ferai usage, car psychologi­quement, c’est très éprouvant et aucun outil français n’a été mis à notre portée par l’AIINB. Pour ma part et pour tous les diplômés de 2015, le temps joue contre nous.»

Elle demande à l’AIINB de remplacer le NCLEX-RN par un examen canadien dans les plus brefs délais. Elle veut aussi que le premier ministre intervienn­e.

Une autre diplômée, Gaétane Blanchard, a pour sa part confié qu’elle a jusqu’au 31 juillet pour réussir l’examen. «C’est un dernier sprint, un dernier souffle, mais surtout un dernier espoir de pouvoir finalement travailler comme infirmière», a-t-elle dit d’une voix tremblotan­te.

Elle a aussi parlé du stress et de la détresse psychologi­que vécue par ceux et celles qui ont échoué à l’examen à de nombreuses reprises.

«L’insomnie, les malaises gastriques, le stress, l’anxiété, l’isolement, l’épuisement profession­nel, le stress financier et même familial est ce que je vois parmi les diplômés qui n’ont pas réussi l’examen», a-t-elle dit.

«Le beau sourire que je vous fais camoufle une tristesse et un immense sentiment d’impuissanc­e. Nombreuses sont les fois où les larmes coulent d’elles-mêmes, car je ne sais plus quoi étudier ou comment réagir face à tous ces événements.»

Comme si cela ne suffisait pas, ils doivent encaisser des ragots qui circulent à leur sujet et gérer la pression sociale.

C’est sans parler des commentair­es et des regards désobligea­nts de leurs anciennes collègues de classe.

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 ??  ?? Gaétane Blanchard a témoigné du parcours du combattant qu’elle vit pour accéder à la profession d’infirmière. - Acadie Nouvelle: Pascal Raiche-Nogue
Gaétane Blanchard a témoigné du parcours du combattant qu’elle vit pour accéder à la profession d’infirmière. - Acadie Nouvelle: Pascal Raiche-Nogue
 ??  ?? Le PDG du Réseau de santé Vitalité souhaite que les choses changent rapidement dans ce dossier. - Acadie Nouvelle: Pascal Raiche-Nogue
Le PDG du Réseau de santé Vitalité souhaite que les choses changent rapidement dans ce dossier. - Acadie Nouvelle: Pascal Raiche-Nogue
 ??  ?? Le recteur par intérim de l’Université de Moncton, Jacques Paul Couturier. - Acadie Nouvelle: Pascal Raiche-Nogue
Le recteur par intérim de l’Université de Moncton, Jacques Paul Couturier. - Acadie Nouvelle: Pascal Raiche-Nogue
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