Acadie Nouvelle

UNE ÉGLISE «POUR UN NOUVEL ÂGE»

LES LEÇONS DE SAINTE-ANNE-DE-KENT

- Jean-marc.doiron@acadienouv­elle.com @jmdoironAN

L’incendie de l’église de Bas-Caraquet a «ramené des souvenirs» aux paroissien­s de Sainte-Anne-de-Kent. Treize ans après avoir perdu leur église, ils sont nostalgiqu­es, mais satisfaits de leur nouveau bâtiment moderne.

La paroisse de Sainte-Anne-de-Kent n’a pas seulement perdu un édifice, le 29 juin 2005, quand la foudre a frappé le clocher. Elle a perdu une importante partie de son patrimoine.

Le lieu de culte avait pignon sur rue dans la petite communauté voisine de Bouctouche depuis 1888. Ses visiteurs la surnommaie­nt «la chapelle Sixtine de l’Acadie», puisque sur ses murs et son plafond étaient exposées 24 fresques du peintre Édouard Gautreau. Les oeuvres comprenaie­nt 4 murailles de 8 pieds sur 15 pieds, et 20 toiles de 4 pieds sur 8 pieds.

Dans la lutte contre l’incendie, une seule peinture a été sauvée.

Rose-Eva Nowlan se souvient du vide au coeur de sa communauté quand elle a vu le site incendié pour la première fois. Elle était à l’extérieur de la province quand le brasier s’est déclaré. Sa fille lui avait appris la mauvaise nouvelle.

«Quand on s’en est venu, il n’y avait plus de clocher ou quoi que ce soit. On s’est dit “quel vide!’’ Ç’a été tout un deuil.»

«Édouard Gautreau était un grand peintre. Ils n’ont pas pu sauver les choses directemen­t peintes sur les murs et les plafonds, et il y avait de grandes peintures en bas, grands comme les arbres à l’extérieur de l’église», mentionne le responsabl­e de l’entretien Charles Bernard, qui s’est marié dans l’ancien édifice en 1997.

Après l’incendie, les paroissien­s de la communauté de Kent ont assisté aux services dans le sous-sol de l’école Calixte-F.-Savoie, située tout près du site de l’église.

3,5 MILLIONS $

Deux semaines après le brasier, l’Acadie Nouvelle apprenait que des évaluateur­s avaient revu à la hausse la valeur de l’église de 1 million $ à plus de 3 millions $, deux années plus tôt. Un représenta­nt de l’assureur de l’établissem­ent avait laissé entendre que la paroisse pourrait disposer de la somme de 3,5 millions $ pour rebâtir l’église et remplacer le mobilier.

La grogne a cependant monté quand la communauté a appris que les responsabl­es de la reconstruc­tion s’étaient entendus sur un paiement fixe de 2 millions $ de l’assureur. L’archevêque de l’époque, Mgr André Richard, avait justifié la décision en expliquant que cette somme permettrai­t d’effectuer le projet indépendam­ment de l’assureur, et qu’elle était suffisante pour répondre aux besoins de la communauté. De plus, les paroissien­s auraient un coussin financier de quelques centaines de milliers de dollars pour l’entretien.

Les paroissien­s ont enfin célébré la première messe dans le nouvel édifice le 9 décembre 2007, soit près de deux ans et demi après l’incendie.

STYLE ARCHITECTU­RAL MODERNE

Si la perte de l’église vieille de 118 ans a été un coup dur dans la communauté, la reconstruc­tion a permis d’assurer la pérennité de la paroisse.

«On a perdu un joyau. Mais il faut se souvenir qu’avec le temps, on a des églises qui ferment parce qu’elles n’arrivent plus financière­ment. Maintenant, on a un bâtiment plus économique», affirme Mme Nowlan.

Les paroissien­s ont choisi de construire une église «pour un nouvel âge», sans tenter de reproduire ce qui a été perdu. Elle est d’un style architectu­ral moderne, avec des toits en pente qui créent une forme extérieure dynamique, et une «couleur osée qui rappelle la déterminat­ion de la culture acadienne».

L’intérieur est conçu afin de célébrer deux toiles d’Édouard Gautreau, rapatriées de l’ancienne église d’Edgmont Bay, à l’Île-duPrince-Édouard. La Nef - capable d’accueillir 200 personnes - a un plafond en pente qui s’élève au-dessus du sanctuaire. Cela attire l’attention sur les deux tableaux peints en 1955, qui mesurent environ 8 pieds sur 15 pieds. Leur valeur était estimée à 50 000$ chacun, en 2007.

Les bancs de la nouvelle église sont les anciens de l’église de Bathurst Est. Quelques pierres sauvées des flammes ont été utilisées comme le piédestal de la statue de SainteAnne située près de la route, et d’autres comme la tablette de la lumière du tabernacle.

Il faut dire que les églises ayant des oeuvres de M. Gautreau n’ont pas eu de chance au cours des dernières décennies. Plusieurs de ses tableaux ont été perdus dans les incendies des églises de Sainte-Marie, en 1953, de SaintIgnac­e, en 1961, et de Lewisville, en 1971. ■

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 ??  ?? L’intérieur de la nouvelle église a été conçu afin de célébrer deux toiles d’Édouard Gautreau, rapatriées de l’ancienne église d’Edgmont Bay, à l’Île- du-Prince-Édouard. - Acadie Nouvelle: Jean-Marc Doiron
L’intérieur de la nouvelle église a été conçu afin de célébrer deux toiles d’Édouard Gautreau, rapatriées de l’ancienne église d’Edgmont Bay, à l’Île- du-Prince-Édouard. - Acadie Nouvelle: Jean-Marc Doiron
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Les paroissien­s de Sainte-Anne-de-Kent ont choisi de construire une église «pour un nouvel âge», sans tenter de reproduire ce qui a été perdu. - Acadie Nouvelle: Jean-Marc Doiron
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